Page images
PDF
EPUB

Il étoit difficile que ni les Grecs ni les Romains réuffiffent beaucoup dans l'Arithmétique, n'employant pour Nombres les uns & les autres que les Lettres alphabétiques, dont la multiplication, dans les grands calculs, caufe néceffairement beaucoup d'embarras. Les chiffres Arabes dont nous ufons, qui n'ont pas plus de quatre cens ans d'antiquité, font infiniment plus commodes, & ont beaucoup contribué à la perfection de l'Arithmétique.

L'ALGEBRE eft une partie des Mathématiques, qui fait fur la grandeur en général exprimée par les Lettres de l'Alphabet toutes les mêmes opérations que l'Arithmétique fait fur les nombres. Les caracteres qu'elle emploie ne fignifiant rien par eux-mêmes peuvent défigner toutes fortes de grandeurs, ce qui eft un des principaux avantages de cette Science. Outre ces caracteres, elle fe fert encore de certains fignes, qui abregent infiniment fes opérations, & les rendent beaucoup plus claires. On peut, par le moyen de l'Algebre, réfoudre la plupart des problêmes de Mathematique, pourvu qu'ils foient de nature à pouvoir être réfolus. Elle n'étoit point entiérement inconnue aux Anciens. On croit que Platon en fut l'inventeur. Théon, dans fon traité fur l'Arithmétique, lui donne le nom d'Analyfe.

Il n'y a point d'habiles Mathématiciens qui ne fachent beaucoup d'Algebre, ou du moins affez pour l'ufage indifpenfable.

Mais cette Science pouffée au-delà de cer ufage ordinaire, eft fi épineufe, fi compliquée de difficultés, fi embarraffée de calculs immenfes, &, pour tout dire, fi affreuse que très-peu de gens ont un courage affez héroïque pour s'aller jetter dans ces abymes profonds & ténébreux. On eft plus flatté de certaines Théories brillantes, où la fineffe de l'efprit femble avoir plus de part que la dureté du travail. Cependant la haute Géométrie eft devenue inféparable de l'Algebré. M. Rolle, parmi nous, a pouffé auffi loin. qu'il étoit poffible cette connoiffance, pour laquelle il avoit un penchant & comme un inftinct naturel, qui lui fit dévorer, nonfeulement avec patience, mais avec joie, toute l'âpreté & je dirois prefque toute

[ocr errors]

I'horreur de cetre étude.

Je n'entre point fur l'Arithmétique, ni fur l'Algebre, dans un détail qui eft fort au-deffus de mes forces, & qui ne feroit ni agréable, ni utile à mes Lecteurs.

[ocr errors]

L'ufage s'établit, depuis quelques an nées, dans l'Univerfité de Paris, d'ex-. pliquer dans les Claffes de Philofophie les Elémens de ces Sciences, pour fervir d'introduction à la Phyfique. Cette derniere partie de la Philofophie dans l'état où elle fe trouve aujourd'hui, eft prefque une énigme pour ceux qui n'ont pas au moins une teinture des principes des Mathématiques. Auffi les plus habiles Maîtres ont fenti qu'il falloit commencer par là fi l'on vouloit y faire quelque progrès. Outre l'avantage.

qui résulte de l'étude des Mathématiques en faveur de la Phyfique, ceux qui les enfeignent dans leurs Claffes trouvent que les jeunes gens qui s'y appliquent, y acquierent une précifion & une jufteffe qu'ils portent dans toutes les autres Sciences. Ces deux confidérations fuffifent pour faire connoître l'obligation que l'on a aux Profeffeurs qui les premiers ont introduit cet ufage, devenu prefque général aujourd'hui dans l'Univerfité.

[ocr errors]

M. Rivard, Profeffeur de Philofophie au College de Beauvais a compofé fur cette matiere un Traité, qui renferme les Elémens d'Arithmétique, d'Algebre, & de Géométrie, où l'on dit que tout eft expofé avec l'étendue néceffaire, & avec toute l'exactitude & la clarté poffible. Il vient d'en paroître Chex Defaint, une feconde édition avec des additions confi- rue Saint Jean de Beauvais, dérables.

DE LA MECHANIQUE.

,

LA MECHANIQUE eft une Science qui enfeigne la nature des forces mouvantes l'art de faire le deffein de toutes fortes de machines & d'enlever toutes fortes de poids par le moyen des leviers, coins " poulies, mouffles, vis, &c. Quand on ne regarde les Méchaniques que du côté de la pratique, plufieurs perfonnes en font peu , d'eftime, parce qu'elles paroiffent être le partage des Ouvriers, & ne demander que des mains & non de l'intelligence :

&

mais on n'en juge pas ainfi, quand on les confidere du côté de la théorie, qui peut occuper les efprits les plus élevés. D'ailleurs c'eft la fcience des gens habiles qui dirige la main des Ouvriers, & qui perfectionne leurs inventions. Une légere idée fouvent, donnée même par des ignorans, née comme par hazard, eft enfuite portée par dégrés à une fouveraine perfection par ceux qui ont une profonde connoiffance de la Géométrie & de la méchanique. C'eft ce qui eft arrivé par rapport aux Lunettes d'approche, qui doivent leur naiffance au fils d'un Ouvrier Hollandois qui faifoit des Lunettes à porter fur le nez. Tenant d'une main un verre convexe, & de l'au tre un verre concave, & les ayant approchés de fes yeux fans deffein, il s'apperçut qu'il voyoit des objets éloignés plus grands & plus diftin&tement qu'il ne les voyoit auparavant à la vue fimple. Galilée, Képler, Defcartes, par les regles de la Dioptrique, poufferent fort loin cette invention, brute & groffiere dans fes commencemens; & l'on a depuis encore enchéri beaucoup

fur eux.

Les Auteurs les plus célebres de l'Antiquité qui ont écrit fur les Méchaniques, font Architas de Tarente; Ariftote; Æneas fon comtemporain de qui nous avons des Tactiques, où il eft parlé des machines de guerre, Ouvrage que Cinéas attaché à Pyrrhus avoit abrégé ; Archimede furtour, dont nous avons déja parlé ; Athé

née, qui dédia fon Livre fur les machines à Marcellus, connu par la prife de Syracufe; enfin Héron d'Alexandrie, dont on a plufieurs Traités.

Entre les Ouvrages de Méchanique qui nous reftent des Anciens, il n'y a que ceux d'Archimede où les principes de cette Science foient traités à fond; mais il s'y trouve fouvent beaucoup d'obfcurité. Le fiege de Syracufe fit voir jufqu'où il avoit porté l'habileté dans les Méchaniques. II n'eft pas étonnant que les Modernes, après toutes les découvertes qui fe font faites dans le dernier fiecle fur ce qui regarde la Phyfique, aient porté cette Science beaucoup plus loin que n'ont fait les Anciens. Les machines d'Archimede ont néanmoins de quoi étonner les plus habiles Méchaniciens de notre tems.

Si l'on vouloit faire voir en particulier toutes les utilités de la Méchanique, il faudroit faire la defcription de toutes les machines dont on s'eft fervi en différentes occafions & en différens tems, foit dans la guerre ou dans la paix, & dont on fe fert encore à préfent tant pour la néceffité, que pour le divertiffement. C'eft fur les principes de cette Science que font fondées toutes les conftructions des moulins à eau & à vent pour différens ufages; la plupart des machines qui fervent à la guerre, & dans l'attaque & la défense des places; celles qui font employées en grand nombre dans la conftruction des édifices

« PreviousContinue »