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de brave, me menace, et son fils inhumain
Sar l'élu du Seigneur ose lever la main.
Lze indigne servante outrage sa maîtresse,
Insulte à mes vieux ans et punit ma faiblesse.
Oh! si tu m'appelas jadis du plus doux nom,
S pour toi je bravai l'amour de Pharaon,
Si toujours avec toi je traversai la vie,
Pans la tombe avec toi si je dois être unic,
Si tu chéris ce fils à nos vœux accordé,
Protege son berceau, Dieu te l'a commandé;
Classe un coupable enfant, chasse l'Egyptienne,
Dat la haine empoisonne et ma vie et la tienne. >
Eje dit, et succombe à ses vives douleurs;
Sa defaillante voix expire dans les pleurs.
Oui, s'écrie Abraham, toi seule es mon épouse;
Vous, portez loin d'ici votre fureur jalouse,
Fayez, cachez demain dans le fond des déserts
L'exces de votre audace et vos justes revers.
Toi qui frappas mon fils de la main criminelle,
To ne reverras plus la tente paternelle. »
Ajar, sans être émue, entend l'arrêt cruel;

Sua front est plein d'orgueil, son cœur est plein de fiel :
Lain que son repentir pleure, s'accuse, implore,
Son silence irrité les menaçait encore.
Alakam toutefois n'aura pas oublié
Aafond d'un cœur pieux les soins de la pitić;
Sar le foyer brûlant sa bouche haletante
Excite avec effort une flamme éclatante,
Li sous la cendre il place un généreux froment,
Dernier secours, hélas ! préparé tristement.
Sara même, aux lueurs d'une lampe qui veille,
L'enferme avec l'eau pure au fond d'une corbeille;
Duas penser d'une mère! y glisse de sa main,
Pour le jeune Ismaël un vêtement de lin.

Deja l'astre du jour, au bord de sa carrière,
hondait l'orient des flots de sa lumière,
La déjà s'éloignait la dédaigneuse Agar,
Saus même d'Abraham chercher un seul regard.
Dans le désert muet elle marche en silence,
En sonde sans effroi la profondeur immense.
Son jeune enfant la suit, mais d'un pas inégal,
Li tourne un œil en pleurs vers le toit pastoral:
Cependant le soleil, dans sa course indomptable,
Fail ruisseler ses feux sur une mer de sable;
bientôt l'enfant épuise un breuvage indigent;
La soif brûle son sein, et se décourageant :
Retournons, disait-il, retournons vers mon père.
-llélas! mon pauvre enfant, tu n'as plus que ta mère.
- Mon père m'abandonne, et je me sens mourir.
Agar ne peut répondre; elle le voit souffrir,
Lutte encore, soutient sa marche défaillante,
Le presse sur sa bouche, et sa bouche est brûlante;
Lui présente son sein, son sein est desséché :

be wous côtés en vain ses regards ont cherché,
Elle n'entend répondre à sa voix gémissante
Que du tigre affamé la rage rugissante.
Un seul palmier frappait son œil épouvanté,
Un seul, percé des traits d'un soleil irrité :

Eie en couvre Ismaël; mais sa voix est mouranie,
Mais son âme est déjà sur ses lèvres errante.
Agar, que désespère un si cruel trépas,

Pousse des hurlements, fuit au loin à grands pas,

Déchire ses habits, se couvre de poussière,
Pour la première fois courbe sa tête altière:
‹ Dieu de miséricorde, ô mon dernier recours,
Laisseras-tu mon fils expirer sans secours?
Mon Dieu! daigne en pitié regarder ma misère :
Seul tu connais l'excès des douleurs d'une mère;
Ah! laisse-moi mon fils, laisse-moi mon seul bien!
Sans mon fils, sur la terre, hélas ! je n'ai plus rien.
Dieu! si mon juste orgueil à tes yeux est un cri:ne,
Frappe, me voilà prête, iminole ta victime:
Que, riant de mes maux, Sara dicte ses lois,
Dévore en m'insultant ma dépouille et mes droits,
Mais épargne mon fils! mon fils n'est point coupable.
Grand Dieu! mon fils n'est plus! où suis-je ? misérable!
Ma douleur, mon effroi l'arrachant de mes bras,
Nous ne serons pas même unis dans le trépas. ▸
Sa voix meurt: chancelante, accablée, éperdue,
Sur l'arène embrasée elle tombe étendue.

O prodige! à l'instant l'Ange de la pitié,
Cet Ange qui relève un cœur humilié,

Du haut des cieux descend sur la nue enflammée;
A sa voix consolante Agar s'est ranimée.

‹ Agar, dit-il, Agar, Dieu vient te secourir;
Vois ces flots bienfaisants près de ton fils courir.
Oui, le Dieu de bonté qui nourrit l'indigence,
Qui du pauvre orphelin soutient la faible enfance,
Ce Dieu sauve ton fils, l'adopte en son malheur;
Ismaël grandira sous l'aile du Seigneur.
Je le vois père heureux d'une race féconde,
Qui ne fixe jamais la tente vagabonde:
Habile à courber l'arc, à dompter les coursiers,
Elle jette l'effroi dans les rangs des guerriers,

Et comme un cèdre altier étend son vaste ombrage,
Peuple au loin les déserts, et s'accroît d'âge en åge. »
L'Ange s'éloigne : Agar désaltère Ismaël,

Le presse avec transport sur le sein maternel,
Et le front radieux, fière d'un tel miracle,
Au désert de Pharan court accomplir l'oracle.
MOLLEVAUT.

AGAR DANS LE DESERT.
Solitude immense et profonde...
Partout le silence et l'effroi...

Plus d'espoir... je suis seule au monde :
Que dis-je, hélas! mon fils est avec moi.
Mon fils! ô douleur accablante !...

Le sommeil un moment a suspendu ses maux:
Mais bientôt une soif brûlante,

Et des vents du désert l'haleine dévorante
Vont l'arracher à ce fatal repos.

Que ses traits sont changés! qu'il respire avec peine!
Couché sur une ardente arène,
Qu'embrasent les feux du midi,
Vainement de mon corps je lui prête l'abri...
Seul témoin des maux que j'endure,

Dieu de clémence et de bonté,
Mon cœur supporte sans murmure
Le malheur que j'ai mérité.
Punis ma coupable imprudence:
Sous la main de ta Providence
Je courbe un front religieux;
Mais de mon fils soutiens l'enfance,

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Le vent souffle au désert, mon fils, arrêtons-nous; Ta bouche est presque sans haleine;

R posons-nous ici tes yeux s'ouvrent à peine;

Tu dormiras sur mes genoux.

Non, laisse-moi chercher un fruit qui te soutienne; L'ombre de ce palmier du soleil te défend;

En attendant que je revienne,

Dors, si tu peux, mon cher enfant. ›

Et la mère, tremblante, et cachant ses alarmes,
Ne vit qu'un sable aride, et se prit à courir :
Puis s'assit à l'écart, s'écriant tout en larmes :
Je ne veux pas le voir mourir !

Il pleure, et, pour calmer la soif qui le dévore,
Dans ce vaisseau d'argile, il ne reste plus rien ;

Nous ne sommes pourtant qu'à la troisième aurore: La tente d'Abraham à Gessen brille encore,

Et mon fils est aussi le sien!

Lui qui fut si joyeux de ton premier sourire,
Mon fils, tes derniers plears l'ont à peine attendri :
Et moi, qui l'aime encor, dans mon fatal délire,
Je maudis ma beauté, ce sein qui t'a nourri;
Mais lui, je ne puis le maudire.

Que me reproche-t-il? ai-je pris du repos,
Lorsque ses moissonneurs descendaient des montagues;
Ai-je de la citerne écarté ses troupeaux?

Ne l'ai-je pas aimé plus tôt que mes compagues?

Debout, près de sa tente, où j'ai cru demeurer,
Fuyez, nous a-t-il dit; j'ai fui sans murmurer :
Je sais que son cœur me regrette;

Car, en obéissant, j'ai détourné la tête,

Et j'ai vu mon maître pleurer.

A ceux de Chanaan un Dieu s'est fait connaître :
Ce Dieu, jaloux des siens, me proscrit aujourd'hui ;
Moi, je suis de Moab, j'appartiens à mon maître,
Et n'ai point d'autre dieu que lui.

De mes pleurs cependant ma rivale se vante,
Et mon maître me chasse, et l'exil est cruel...
Je n'étais, il est vrai, que son humble servante,
Mais j'étais mère d'Ismaël.

Un grand peuple, dit-on, est promis à sa race:
Eh bien! mon Ismaël n'est-il pas jeune et beau?
Mais à ses yeux, mon fils, tu n'as pu trouver gråce;
Et tu vas, de mes bras, passer dans le tombeau.
Bientôt, sous ce palmier je creuserai la terre;
Car, je l'espère au moins, tu mourras avant moi.
Puis, sur la fosse solitaire,

Moi, je me coucherai pour dormir comme toi.
Mes restes, je le sais, j'en suis presque contente,
Ne seront pas ensevelis.

Quand mon maître, du moins, sortira de sa tente,
Mes os lui marqueront la tombe de son fils. ›

Se levant à ces mots, inquiète, égarée,

Elle court au palmier, dans un trouble mortel,
Puis s'arrête et frémit, et sa voix altérée

Appelle tout bas Ismaël.

Elle écoute, elle hésite, enfin elle s'élance :
L'enfant était debout; son doigt mystérieux
Semblait chercher sa mère, et, montrer à ses yeu
L'eau pure d'un ruisseau qui coulait en silence...
Puis le doigt de l'enfant se leva vers les cieux.
Alexandre GUIRAUD.

AH! SI J'ETAIS PETIT OISEAU.

C'était le plus beau jour de tous les jours d'automne
Un de ces jours brillants, jours aux mille couleurs
Où la terre ravie, effeuillant sa couronne,
Nous jette ses fruits et ses fleurs.

La mère travaillait à la fenêtre assise,
Mère au front gracieux, au regard calme, doux,
Et l'enfant apprenait, en silence et soumise,
Une leçon sur ses genoux.
Relevant quelquefois sa tête rose et blanche,
Pour sourire au soleil, au splendide horizon,

Elle écoutait l'oiseau qui sautait sur la branche,
En chantant gaiement sa chanson.

La pauvre mère alors, et bonne et généreuse,
Pour ne pas la gronder feignait de ne rien voir,
Ou ramenait d'un mot sa chère paresseuse
Au dous sentiment du devoir.

se sa voix était tendre et pleine d'indulgence! Alons, chère Marie, allons, tu n'apprends pas. Ton livre déchiré trahit ta négligence,

Que vois-tu de si beau là-bas ? ›
Elle invitait encore la gentille rêveuse
A reprendre courage, à lire de nouveau,

Quand l'enfant s'écria: Que je suis malheureuse!
Ah! si j'étais petit oiseau !

Ah! si j'étais l'oiseau qui toujours saute et chante,
Qui n'a souci de rien, qu'on voit toujours joyeux,
Si j'étais cet oiseau, que je serais contente,

Et que mon sort serait heureux !

Plas de livre ennuyeux, plus de leçon sévère;
Voltiger tout le jour, courir et s'amuser,
Causer avec les fleurs, caresser la bruyère,

Sur le gazon se reposer ;

Toujours nouveau plaisir, toujours nouvelle fête ;
Sous les arbres touffus j'arrêterais mon vol,
E m'en irais souvent appeler la fauvette,

Pour rise avec le rossignol.

Tu dis que c'est là-haut qu'on chante les louanges
Que la terre répète en tout temps, en tout lieu :
Jy volerais aussi pour entendre les anges

Chanter dans le ciel du bon Dieu.

Sans regrets, sans chagrins, toujours libre et ravie,
Chaque jour le soleil me paraîtrait plus beau;
Aisi s'écouleraient les heures de ma vie...

Ah! si j'étais petit oiseau! ›

-Sans doute, chère enfant, cette vie a des charmes,
Mais elle compte aussi plus d'un jour douloureux.
L'oiseau n'est pas exempt de craintes ni d'alarmes,
Il est souvent bien malheureux.

Quand l'hiver couvre tout de glace et de tristesse,
Lorsque tu dors, enfant, sous de légers rideaux,
On n'entend plus dans l'air que les cris de détresse
Poussés par les petits oiseaux.

Os! que leur voix alors est touchante et plaintive!
Ls vont mourir de faim, de froid et de douleur,
Car ils n'ont plus de mère inquiète, attentive,
Pour les réchauffer sur son cœur.

Has heureux que l'oiseau, dont la vie est amère,
L'enfant reçoit du ciel un regard plein de feu,
La cœur intelligent pour comprendre sa mère,
Une ame pour adorer Dieu.

Regarde cet oiseau qui frôle de son aile,
El la branche de l'arbre, et le gazon fleuri;
Ita nous faire entendre une chanson nouvelle...
Qu'il est mignon, qu'il est joli!

I parait bien joyeux, les airs sont sa patrie!
Sans craindre le péril, sans songer à son sort,
chante, court, s'envole, et légère est sa vie;
Denain peut-être il sera mort. ›

Sa mère encor parlait, quand soudain l'éclair brille,
Bientôt l'air retentit sous le grand peuplier,
Et l'oiseau qui chantait tombe sous la charmille
Frappé par le plomb meurtrier.

On s'élance, on accourt, de terreur palpitantes :
Ilélas! il est trop tard! Oh! le cruel chasseur !
L'oiseau fermait déjà ses paupières mourantes ;
Que de regrets, que de douleur !

On essaya pourtant de rappeler la vie,
Longtemps on espéra qu'il rouvrirait les yeux;
Tout en le réchauffant, la gentille Marie

Versa bien des pleurs douloureux.

Elle lui dit tout bas beaucoup de douces choses
(Car l'enfant sut de Dieu comprendre la leçon );
Puis on l'ensevelit dans des feuilles de roses
Que l'on cacha sous le gazon.

Elle revint alors désolée et pensive,

Le cœur gros de soupirs rêvant au pauvre oiseau;
Et puis, sans dire un mot, sérieuse, attentive,
Elle étudia de nouveau.

Puis, un moment après, elle dit en prière :
Seigneur ! Seigneur mon Dieu! de ton ciel triom-
[phant,

Ah! conserve toujours un enfant à sa mère,
Et garde la mère à l'enfant !»

Mile Isabelle RODIER.

AIMER JESUS-CHRIST

PAR DESSUS TOUTES CHOSES.

Traduction du livre de l'Imitation.

Oh! qu'heureux est celui qui, de cœur et d'esprit,
Sait goûter ce que c'est que d'aimer Jésus-Christ,
Et joindre à cet amour le mépris de soi-même !
Oh! qu'heureux est celui qui se laisse charmer
Aux célestes attraits de la beauté suprême,
Jusqu'à quitter tout ce qu'il aime

Pour un Dieu qu'il faut seul aimer !...
Qui de la créature embrasse les appas
Trébuchera comme elle, et suivra pas à pas
D'un si fragile appui le débris infaillible.
L'amour de Jésus-Christ a un tout autre effet :
Qui le sait embrasser en devient invincible,
Et sa défaite est impossible

Au temps par qui tout est défait.
Aime-le donc, chrétien, comme le seul ami
Qui puisse enfin te faire un bonheur affermi,
Et sans cesse à ta perte opposer son mérite;
Attends de tout le reste un entier abandon,
Puisque c'est une loi dans le ciel même écrite,
Qu'il faut un jour que tout te quitte,
So que tu le veuilles, ou non.

Pierre CORNeille.

AIMEZ JESUS.

Enfants, aimez Jésus dont la voix paternelle
Dit Laissez jusqu'à moi s'avancer les petits; >
Aimez-le pour qu'un jour, réunis sous son aile,

Anges de sa cour éternelle,

Vous l'adoriez au paradis.

Adolescents, aimez le Dieu de la Jeunesse,

Abritez dans son cœur votre cœur enflammé.
Il connut l'amitié, cette angélique ivresse :

Reposez-vous dans sa tendresse
Comme fit Jean le bien-aimé.

Vierges qui, vous couvrant de pudiques mystères,
Dérobez vos fronts purs à ce monde insensé,
Colombes des autels, roses des monastères,
Portez vos soupirs solitaires

Vers le céleste Fiancé.

Vous tous qu'à son banquet l'existence convie,
Dans la gloire élevés, dans l'ombre inaperçus,
Mortels qui gravissez les sommets de la vie,
Vieillards à la tête blanchie,
Aimez Jésus! aimez Jésus !

Paul REYNIER (1).

A JESUS.

PRIÈRE D'UN ENFANT.

A l'enfant qui te révère
Tu ne te dérobes pas :

Si jusqu'au mont du Calvaire
Il ne peut suivre les pas,
S'il ne vient pas à ta table
Manger le pain des élus,
Ta l'appelles dans l'étable,
O Jésus, petit Jésus !
L'étable est le petit temple
Que ton amour fit pour nous;
Là souvent je te contemple
Et je te parle à genoux.
A ton berceau ma prière
N'a point de vœux superflus
Elle cherche ta lumière,
O Jesus, petit Jésus!

Que la bonté me retire

Loin des chemins hasardeux,
Pour que nous puissions sourire
En nous regardant tous deux;
Que ta sagesse m'instruise
De ce qui te plaît le plus ;
Que ta grâce me conduise,
O Jésus, petit Jésus!

Si ta parole me reste

En tout temps au fond du cœur;
Si de tout penchant funeste
Je puis demeurer vainqueur;
Si jamais je ne dévie
Dans la route des vertus,
Prolonge beaucoup ma vie.
O Jésus, petit Jésus!
Mais si mon adolescence
Marche dans l'iniquité;
Si ma robe d'innocence
Doit perdre sa pureté,
N'attends pas ce jour, arrête
L'essor de mes pas perdus !

Frappe ma jeune âme est prête,

O Jésus, petit Jésus !

Hippolyte VIOLEAU.

A JESUS CHRIST.

Toi qui suas le sang dans ta détresse affreuse,
Qui tombas d'épouvante à l'heure ténébreuse
Où tu vis le calice aux mains du Séraphin,
O Christ! de tes douleurs je comprends le mystère
Les crimes, les erreurs et les maux de la terre
S'étendaient devant toi comme une mer sans fin.
Dans les âges sans nombre où ton regard pénètre,
L'esprit te révélait qu'un siècle devait naître,
Effréné dans sa voie, audacieux, moqueur:
Il passait lentement devant ta face sainte.
Aiguisant tous les dards dont elle sera ceinte,
Et versant dans la coupe une affreuse liqueur.
Tu détournas la tête... Hélas! l'absinthe amère
Qu'au soir de tes douleurs te présenta la mère
N'était que miel, au prix de l'horrible boisson:
Une sueur rougeâtre inonda ton visage;
Il fallut que l'archange éloignât le présage,
Car déjà de la mort tu sentais le frisson.
Oui, je comprends, ô Christ! cette agonie intime,
Il te blessait au cœur ce fils illégitime;

I brisait à sang froid l'ouvrage de les mains;
Laissant l'erreur commune et le crime vulgaire,
Il n'avait pas daigné te déclarer la guerre:

Il doutait! Dernier terme aux erreurs des humains.

Tandis que chaque siècle en sa course terrestre
T'exhala ses douleurs comme un plaintif orchestre,
Lui passait, sombre, froid, vagabond, effaré:
Comme Satan roulant dans l'espace sans borues,
Son vol était sans bruit, ses douleurs étaient mornes.
Pour un mutisme affreux l'enfer l'avait taré.
Qui, souvent quelque voix de l'abîme échappée,
T'avait maudit, jadis; mais, de douleur frappée,
La terre avait gémi, pleuré, prié plus bas;
Des chants d'amour convraient ces actes de dentence...
Mais lui reste muet! négation immense,
Lui, l'infàme, il dédaigne et ne blaspheme pas!
Vois au fond de ses marécages

S'enfoncer toute vérité,

Des biens que se lèguent les âges

Il semble seul déshérité.

Avorton reniant son père,

I n'aime, ne croit, ni n'espère;

Il veut se suffire à lui seul.
Son origine est effacée,
Et son impiété glacée

L'enveloppe comme un linceul.

Vois dans leur sombre indifférence
Dormir ses générations ;
L'astre béni de l'espérance
Semble éteint pour les nations;

A travers un dédale informe

On s'égare et nul ne s'informe
Quand donc reviendra le soleil :

Le temps rapide nous emporte,

Tout s'efface, tout meurt.... Qu'importe? Pourvu qu'on dorme son sommeil.

Pour le plaisir seul on végéte,

(1) Jeune poëte chrétien de grande espérance, né à Marseille, le 10 mai 1852, mort à Paris, le 11 mars 1856, avant d'avoir accompli sa vingt-quatrième année.

La chair a seule des besoins,
Et l'esprit abruti rejette

Tout ce qui tend à d'autres soins:
Une vie animale immense
Nail, s'étend, s'use, recommence,
Et si le prophète altéré

Au nom de Dieu parle et commande,
La foule s'étonne et demande :

Quoi ! Dieu ! n'est-il pas enterré ? ›

Le vieillard courbé sur la tombe
Ne s'informe point au delà;
Il meurt : c'est l'atome qui tombe
Dans le sein qui le recéla.
La jeunesse avide s'élance
Où l'emporte sa turbulence,
Vers le vin, l'or ou le plaisir;
Chacun s'agite dans sa sphère :
Vivre, voilà l'unique affaire,
Jouir, voilà le seul désir.
Oh! parlez donc à cette tourbe
De lois, de vertus, de devoir !
A ce troupeau que Salan 'courbe,
Parlez d'un souverain pouvoir !
Le savant, bercé dans ses songes,
Traite vos dires de mensonges,
El l'impie en est irrité;
Le plus grave de rire éclate,
Et le plus sage avec Pilate
Dit:Qu'est-ce que la vérité?

Etu vis ce cloaque... Une céleste honte,
a! la boute d'être homme à ta figure monte :
Car voilà ceux à qui tu daignes ressembler !

Christ! jusqu'à cette heure, et le coup fut terrible,
Tu n'avais pas compris notre misère horrible...
Les lors tu commenças à pâlir, à trembler.
Ces outrages directs à ta gloire ineffable !
Ton amour dédaigné ! ton nom traité de fable!
Taat de bienfaits payés par d'indignes forfaits!
Ta majesté bravée et livrée à l'insulte,

Quand le néant, s'élève et se fait rendre un culte !...
Len était trop Tu dus succomber sous le faix.
Mais encore en tombant tu restais Dieu. Ta bouche
Ne prononça qu'un mot, et la horde farouche
Qui vint une heure après, devant toi recula.

Eh bien ! a'es-tu plus Dieu? Un mot, un geste encore,
La ce siècle maudit, l'abîme le dévore.....
Extends-tu terre et cieux s'écrier : Es- tu là ?

Lève-toi donc, roi du calvaire,
Confonds ces vils blasphémateurs;
Montre-leur, d'un regard sévère,
Que tu n'es plus ce roi d'acteurs
Trainé de Caiphe à Pilate,
Veto de lambeaux d'écarlate,
Objet de haine ou de pitié;
Mais bien ce monarque suprême
Qui prend les cieux pour diadème,
Et la terre pour marche-pied.
A peine échappé des supplices

Ta daignas rentrer au chemin,

Dans l'homme cherchant tes délices,

Tu vins le prendre par la main ;
Devenant, par un doux miracle,
Son pain, son guide, son oracle,
Ton amour, présent en tout lieu,
A le rendre heureux s'étudie :
Et lui, l'ingrat, te répudie,
Et va jusqu'à nier son Dieu.

Il u'est rien pourtant qu'il ne scrute,
Il perd sa vie en mouvements.
Il anatomise la brute,

Il fouille tous les éléments,

Mais toi seul, & Christ! il t'ignore ;

Et la science qui s'honore

De deux atomes découverts,
Ou ne te voit pas, ou t'oublie;
Il trouve tout, dans sa folie,
Hormis le Dieu de l'univers.
Oh! lève-toi donc, car l'injure
Me semble dépasser ton front :
Jésus! lève-toi, je t'adjure,
Et venge-toi de cet affront.
Pousse du pied leur fourmilière,
Ils rentreront dans la poussière
Où ton œil les voit s'égarer:
Lève-toi, prends ton sceptre et tonne,
Et qu'au moins leur foule s'étonne,
Puisqu'elle ne peut adorer.

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La tombe a des secrets, l'enfer des lacs de soufre...
Rien n'échappe à ton bras, et ton bras ne les souffre
Que parce qu'il peut tout et qu'il est éternel.
L'abbé A. DETOILLE.

A LA GLOIRE DE MARIE.
D'un triomphe éternel je vais tracer l'image...
Est-ce un peuple sauvé ? Non, c'est tout l'univers.
Vaincre la mort, briser ses fers,

Ne fut de ce combat que l'ombre et le présage,
Ici l'enfer succombe et les cieux sont ouverts.
Dissipe notre nuit, parais, divine Aurore,
Toi, qui dois enfanter le Solcil immortel,
Athènes consacre un autel

Au Dieu que l'on attend sans le connaître encore,
Et le druide t'offre un culte solennel.
C'était dans nos forêts que ces prêtres sauvages,
Par un instinct secret, l'adressèrent leurs vœux.
Plus éclairés que nos aïeux,

O Vierge, nous t'offrons de plus dignes hommages :
Le bien qu'ils attendaient est présent à nos yeux.
Qui n'ouvre en ce moment les portes éternelles ?
Je te vois sur ton trône aux plus hauts cieux placé.
Si le tonnerre est balancé,

Tu détournes les coups de nos têtes rebelles,

Tu nous couvres du sang qu'un Dieu même a versé.

Hlé! sans toi des mortels eût-il lavé le crime?
Ton amour et le sien se sont unis pour nous.
Mère tendre, au juge en courroux

IEÇONS ET EXEMples de litt. Chretienne II.

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