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Je vois quel est mon crime et quelle est ta justice,
Et je sais que le ciel n'est pas pur devant toi.
Tes anges devant toi n'ont pas été sans tache,
L'orgueil les a perdus et leur sort est affreux !
Et moi, plein de péchés, serai-je plus heureux?
Ta justice me suit partout où je me cache.
Elle a précipité jusqu'au fond de l'enfer
Ces astres si brillants de gloire et de lumière;
Et moi, Seigneur, et moi qui ne suis que poussière,
Croirai-je avec raison que je te sois plus cher !
Les grands dévots comme eux font des chutes
[étranges,

J'ai vu dégénérer leurs plus nobles travaux,
Et les sales rebuts des plus vils animaux
Plaire à leur mauvais goût après le pain des anges.
Que je dois m'abaisser, que je dois m'avilir,
Sous tes saints jugements, sous leurs profonds
[abîmes,

Où je ne vois en moi qu'un néant plein de crimes,
Qui, tout néant qu'il est, ose s'enorgueillir.
O néant, ô vrai rien, mais pesanteur extrême,
Mais charge insupportable à qui veut s'élever !
Mer sans rive, où partout chacun se peut trouver,
Mais sans trouver partout qu'un néant en soi-même!
Tout se confond, Seigneur, dans cette mer profonde,
Que les grands jugements ouvrent de toutes parts:
Et si tous les mondains y jetaient leurs regards,
Il ne serait jamais de vaine gloire au monde.
Que verraient-ils en eux qu'ils pussent estimer,
S'ils voyaient devant toi ce qu'est leur chair fragile?
Comment souffriraient-ils qu'une masse d'argile
S'enflåt contre la main qui vient de la former?
Un cœur vraiment à toi ne prend jamais le change;
Et qui goûte une fois l'esprit de vérité.
Qui se peut y soumettre avec sincérité,
Ne saurait plus goûter une vaine louange!
Pierre CORNEILLE.

LE JUIF.

De ton Dieu méconnu le pouvoir se révèle : Je t'ai maudit, ô Juif! la vengeance éternelle, Comme un astre ennemi se lève sur tes jours. J'ai reculé bien loin l'horizon de ta vie; Jérusalem, adieu! la terre est ta patrie :

Tu marcheras toujours.

Et que l'importe à toi le bruit lointain des âges; Que le ciel sur ta tête amasse les nuages; Que le soleil achève ou commence son cours! De les pas chancelants je marquerai la place, Ma main te poussera dans la pénible trace: Tu marcheras toujours.

Interprète muet des décrets du Messie, Va témoigner du Dieu que ta bouche renie; Avec les derniers temps luiront tes derniers jours; Les peuples te verront, dans leur stupeur pro[ fonde,

T'arrêter halctant sur les débris du monde :

Tu marcheras toujours. ›

Et lentement la croix montait vers le Calvaire;
Et le Juif étourdi du poids de la colère,
Jette un dernier regard sur le sacré chemin.
C'en est fait; il soupire en secouant la tête,
Voyageur sans retour, il saisit la boulette
Du pèlerinage sans fin.

Le voilà donc proserit, exilé dans la vie;
Triste, et du grand supplice accomplissant les lois,
Il marche, il marche encor... Sa tête appesantie
S'incline sous les jours, comme Dieu sous la crois.
Et du Dieu dont la main l'enchaîne sur la terre,
Sa bouche vainement abjurerait le nom;
Car son front est signé du sceau de la colère;
Et les peuples ont dit à l'aspect de leur frère :
Voilà l'exilé de Sion.

Ces monuments fameux dont le regard s'étonne,
Etalent devant lui l'éclat de leur couronne;
L'indifférent Hébreu ne connaît point leur nom :
Il foule, au bruit égal de son pas monotone,
Et les débris de Babylone,

Et les pavés du Parthenon.
Cette voix de l'airain qui s'adresse à la terre,
Pour lui du temps jaloux mesure en vain les pas;
C'est l'accent inconnu d'une langue étrangère,
C'est un son qu'il ne comprend pas.
Mourir! Oh! si la mort, à tant de vœux contraire,
Détournait son poignard du cœur d'un fils, d'un

Sur ce cœur ulcéré d'ennui! [père, Mais sur l'élu maudit la faux n'a point d'empire; Penché sur les tombeaux, c'est en vain qu'il res Ipire

Cet air qui n'est point fait pour lui. Dormir! Si du trépas cet emblème fidèle, Le sommeil qu'il appelle, S'abaissait un instant sur son front soucieux! Mais prêt à l'éveiller, lugubre sentinelle, L'ange vengeur est là, dont l'épée éternelle D'un éclat menaçant importune ses yeux. Plus tard il repassa, quand, sur sa base antique, Du temple de Sion frémissait le portique; Quand des chariots d'airain se beurtaient dans le [ciel;

Quand, mêlés aux accents d'une voix prophe

[tique,

Ces mots : Sortons d'ici! s'échappaient de l'autel. Ensuite il repassa: puis voulut dans sa course

Retrouver la fertile source

Où l'homme du désert baptisait de sa main...
Et le pâtre, écartant une berbe vénéneuse,
Dans les stagnants détours d'une onde limoneuse
A ses regards surpris désigna le Jourdain.
Victor PAVIE.
LES JUIFS DISPERSÉS AU MILIEU DES NATIONS.
PUNITION MANIFESTE DU DÉCIDE.
Dieu l'avait annoncé d'une voix solennelle,
Il maudit sans retour la ville criminelle :

Pleure, Jérusalem, comme l'a mérité
Du plus noir attentat l'horrible iniquité,

Le sang de l'homme-Dieu retombe sur la tête;
Dejà dans les horreurs d'une affreuse tempête
La foudre a renversé tes remparts orgueilleux :
J'ai vu, j'ai vu périr ce temple merveilleux,
Objet de ton amour, gloire de ta patrie;
J'ai vu dans ses fureurs l'aveugle idolâtrie
Déchirant en lambeaux tes prêtres massacrés,
Boire le sang hébreu dans tes vases sacrés.

Si du moins l'Eternel, touché de ta misère,
Attendri par les pleurs, bornait là sa colère !
Mais non, ce Dieu terrible, autrefois si clément,
Prépare à tes forfaits un plus long châtiment !
Sur la postérité son courroux va s'étendre :
O Sion! souviens-toi des cris que fit entendre
Tout un peuple entraîné par le crime et l'erreur,
Quand au sein du prétoire éclata sa fureur.
Comme il l'a demandé, la divine puissance
Sur les derniers neveux vengera l'innocence !
Pleure, triste Sion, sous le toit paternel
Tu n'iras plus t'asseoir au banquet fraternel,
Et la postérité boira jusqu'à la lie

La coupe du malheur et de l'ignominie!
Le ciel a désormais horreur de ton encens

Et rit dans son courroux de tes vœux impuissants.
Du fortuné Jourdain les rives poétiques
Ne résonneront plus de tes joyeux cantiques!
Les palmiers de Cadès, les murs de Jéricho,
Les cèdres du Liban pour toi n'ont plus d'écho!
L'Eternel a maudit tes pompes et les fêtes;
Comme l'ont proclamé tes antiques prophètes,
Désole-toi, Sion, ton vieux culte est proscrit,
Et sur ton front déjà l'anathème est écrit.

Ab! d'où vient, réponds-nous, cette haine pro[ fonde

Qu'ont pour toi jusqu'ici tous les peuples du monde? Quel crime est donc le tien, et quel noir attentat A donc pu te réduire à cet horrible état?

Quand les pères, marchant vers la Terre promise,
Osèrent murmurer et condamner Moïse,
La main du Dieu vengeur châtia leur orgueil,
Tes pères au désert trouvèrent leur cercueil :
Mais le Dieu d'Israël limitant sa vengeance
Ouvrit à leurs neveux la terre d'espérance.
Lorsque outrageant ce Dieu si clément et si doux,
Israel de nouveau provoqua son courroux,
Au sein de Babylone et de la servitude,
Israel expia sa noire ingratitude;
Mais enfin l'Eternel, ému par ses malheurs,
L'Eternel eut pitié de ses longues douleurs;
Il appela Cyrus, et de Sion captive

Restaura par ses mains la grandeur primitive.
Mais ce Dieu patient semble avoir oublié
Pour son peuple chéri son antique pitié.
Oh! qui ne verrait pas, nation parricide,
Dans ce long châtiment le prix du déicide
Oui, si les chrétiens seuls maudissaient tes
[enfants,

Si je voyais ailleurs tes neveux triomphants,
Alors, triste Sion, je comprendrais sans peine
Des chrétiens prévenus les mépris et la haine,
Car nous savons jusqu'où le préjugé conduit :
Mais chez les musulmans l'opprobre te poursuit,
Et l'Hébreu dans Maroc porte une juste envie
A son frère opprimé d'Espagne ou d'Italie :
Mais sur les bords du Gange, au milieu des Indous,
Tu ne rencontres pas un traitement plus doux.
On ne peut le nier, l'anathème est visible,
Puisque en tous lieux pour toi la terre est in-
[flexible.
Comprends enfin ton sort, ô peuple infortuné!

A cet affreux destin le ciel t'a condamné.
Dans les livres cent fois tes yeux auraient pu liro
Et la longue misère et ton propre délire.
Dans ces livres sacrés tes enfants sont proscrits,
E: là de toutes parts tes malheurs sont écrits.
Dieu seul, qui prévoit tout dans les choses futures,
Dieu scul peut inspirer les saintes Ecritures,
Percer de l'avenir le voile ténébreux,

Et prédire aux humains ces prodiges nombreux
Qui devaient précéder et suivre le message
De cet humble Jésus si puissant et si sage.

LE JUSTE MOURANT.

N. ROSSET.

Seigneur, quand de ma triste couche
Sur la croix je vous vois mourir,

Mes maux n'ont plus rien qui me touche,
Les vôtres seuls me font souffrir:
Cet autel où je vous adore
Change mes larmes en douceurs ;
Et si mon cœur soupire encore,
C'est à l'aspect de vos douleurs.
Du sommet de votre Calvaire
Déjà je crois toucher les cieux ;
Sur cette cime salutaire

Qu'il m'est doux de fixer les yeux!
Là, le sacrifice s'opère;

Victime et sacrificateur,

Le Fils de Dieu, mon Roi, mon Père,
Verse son sang pour mon bonheur.
Thabor, ta cime lumineuse,
M'offrait un jour moins enchanteur
Que la montagne ténébreuse
Où meurt un Dieu libérateur.
Je la choisis pour ma demeure,
Mon Dieu, jusqu'au dernier moment,
Oui, mon amour veut que j'y meure
Pour revivre éternellement.

Le sang dont votre croix est teinte
De mon cœur dissipe l'effroi,
Et j'ose envisager sans crainte
La mort qui s'approche de moi.
La miséricorde propice
Aux portes de l'éternité,
Vient dépouiller votre justice

Des traits de sa sévérité.

O mort! tes coups rompront la chaîne
Des jours de ma captivité ;

Ta main abrégera ma peine
Pour håter ma félicité.

Tu n'as plus rien que je redoute,
Tombe sur moi sans différer :
Ton trait mortel m'ouvre la route
De la gloire où je vais entrer.
De mon salut gage adorable,
Bois sacré, règle de ma foi,
Dans cet instant si redoutable
Que mes yeux s'éteignent sur toi!
Que ma main mourante te presse,
Qu'elle t'attache sur mon cœur,
Et parmi les chants d'allégresse
Enfin que j'expire en vainqueur
De l'arrêt qui condamne l'homme
Je subirai donc la rigueur!

Mon sacrifice se consomme,

Mais c'est aux pieds de mon Sauveur.
Déjà ma débile paupière

Se couvre d'un nuage épais;

Et ma douloureuse carrière

Se termine au sein de la paix.
Mais mon courage m'abandonne

Et mes yeux se rouvrent aux pleurs ;
L'effroi, le trouble m'environne;
Mettez un terme à mes frayeurs!
C'est votre sang que je réclame,

Grand Dieu, je ne crains plus vos coups:
Dans vos mains je remets mon âme,
Mais rendez-la digne de vous !

De plus heureuses destinées

Vont commencer pour moi leur cours,
Et pour d'éternelles années

Je quitte des moments si courts.
Vole, mon âme, à des spectacles
Que le temps ne finira plus :
Hâte-toi! vole aux tabernacles
Où Dieu rassemble ses élus.

(ANONYME.)

LA JUSTICE DIVINE

PRÉSENTE A TOUTES NOS ACTIONS.

(Ode tirée du psaume xc.)

Paraissez, Roi des rois; venez, Juge suprême,

Faire éclater votre courroux
Contre l'orgueil et le blasphème
De l'impie armé contre vous.

Le Dieu de l'univers est le Dieu des vengeances.
Le pouvoir et le droit de punir les offenses

N'appartient qu'à ce Dieu jaloux.

Jusques à quand, Seigneur, souffrirez-vous l'ivresse

De ces superbes criminels,
De qui la malice transgresse
Vos ordres les plus solennels,

Et dont l'impiété barbare et tyrannique
Au crime ajoute encor le mépris ironique
De vos préceptes éternels.

Hs ont sur votre peuple exercé leur furie;
Ils n'ont pensé qu'à l'affliger;

Ils ont semé dans leur patrie
L'horreur, le trouble et le danger;
Ils ont de l'orphelin envahi l'héritage,
Et leur main sanguinaire a déployé sa rage
Sur la veuve et sur l'étranger.

Ne songeons, ont-ils dit, quelque prix qu'il en [ coûte,

Qu'à nous ménager d'heureux jours.
Du haut de la céleste voûte

Dieu n'entendra pas nos discours :
Nos offenses par lui ne seront point punies,
Il ne les verra point, et de nos tyrannies
Il n'arrêtera pas le cours.

Quel charme vous séduit, quel démon vous con

Hommes imbécilles et fous ? Celui qui forma votre oreille

Sera sans oreilles pour vous ?

{seille.

Celui qui fit vos yeux ne verra point vos crimes? Et celui qui punit les rois les plus sublimes Pour vous seuls retiendra ses coups?

Il voit, n'en doutez pas, il entend toute chose ; Il lit jusqu'au fond de vos cœurs. L'artifice en vain se propose

D'éluder ses arrêts vengeurs.

Rien n'échappe aux regards de ce juge sévère;
Le repentir lui seul peut calmer sa colère,
Et fléchir ses justes rigueurs,

Ouvrez, ouvrez les yeux, et laissez-vous conduire
Aux divins rayons de sa foi.

Heureux celui qu'il daigne instruire
Dans la science de sa loi!

C'est l'asile du juste, et la simple innocence
Y trouve son repos, tandis que la licence
N'y trouve qu'un sujet d'effroi.

Qui me garantira des assauts de l'envie?
Sa fureur n'a pu s'attendrir :

Si vous n'aviez sauvé ma vie,
Grand Dieu, j'étais prêt à périr.

Je vous ai dit: Seigneur, ma mort est infaillible,
Je succombe. Aussitôt votre bras invincible

S'est armé pour me secourir.

Non, non, c'est vainement qu'une main sacrilege
Contre moi décoche ses traits;
Votre trône n'est point un siége
Souillé par d'injustes décrets.

Vous ne ressemblez point à ces rois implacables,
Qui ne font exercer leurs lois impraticables
Que pour accabler leurs sujets.

Toujours à vos élus l'envieuse malice
Tendra ses filets captieux :

Mais toujours votre loi propice

Confondra les audacieux.

Yous anéantirez ceux qui vous font la guerre :

Et si l'impiété nous juge sur la terre,
Vous la jugerez dans les cieux.
Jean-Baptiste ROUSSEAU.

L

LE LABOUREUR CHRÉTIEN. Vous êtes juste et bon, Seigneur! Votre colère Cache un secret d'amour que nous devons bénir : Aujourd'hui votre main, vigilante à punir, Nous frappe à coups pressés comme le blé sur [l'aire.

La trombe emporte au loin nos ceps déracinés, Et le sol des coteaux, de ravins sillonnés,

Enfouit les prés des vallées.

Dans les champs épargnés par les torrents accrus, Hélas! je cherche en vain les épis disparus

Sous les grêles amoncelées.

Vous déchainez, Seigneur, tous les fléaux des [cieux, Les feux, les vents, les eaux... la foudre éclate [et roule

Et frappe sur le roc la maison des aïeux;
Sur mes derniers troupeaux le toit brûle et s'écroule.
Chars, outils du labour, tout est cendre ou dé-
[bris!

Devant nous la famine et l'hiver sans abris :

Notre désastre est sans mesure! Enfants! armez vos cœurs et tombons à genoux. Seigneur, tu peux pencher ton oreille vers nous, Tu n'entendras pas un murmure.

Pour nous garder vivants jusqu'au printemps nou[veau,

Nous comptons, ô mon Dieu, sur ta main qui [ nous frappe,

Durant les longs hivers elle nourrit l'oiseau,
Far elle aux durs frimas toujours un grain échappe.
Le travail est mon lot, Seigneur, je m'y soumets:
Je referai ce sol des vallons aux sommets :
Et, malgré le poids des années,

Mes bras toujours tendus, mes reins toujours [chargés

Rapporteront d'en bas la vigne et les vergers

Sur ces collines décharnées.

Dieu commande l'effort, c'est l'effort qu'il bénit!
L'effort doit vaincre un jour les éléments rebelles.
Un ongle patient peut rayer le granit,

J'y ferai mon sillon pour des moissons plus belles.
Seigneur, voici mes fils! sitôt qu'ils grandiront
Sous le joug du travail je courberai leur front;
Ils sauront que ta loi l'enseigne.
Toute vie est douleur, abstinence et combats;
Avant d'aller là-haut se guérir d'ici-bas,
Il faut que le cœur lutte et saigne.
Chacun boit, & Jésus, à ton vase de fiel;
Chacun touche le prix de son épreuve austère.

Notre façon, à nous, de mériter le ciel,
C'est de donner à flots nos sueurs à la terre.
Avec nos flears en vain la grêle abat nos fruits;
En vain notre moisson, nos vergers sont détruits,
En vain la terre se révolte.

Nous semons, près de Dieu, des jardins toujours [verts.

Où rien n'empêchera, ni le feu ni les vers,
L'âme de faire sa récolte.

Dieu nous voit! revenons aux travaux suspendus :
A l'œuvre, enfants! que nul encor ne se lamente,
Dans le ciel aujourd'hui notre richesse augmente
De tous ces beaux froments qui vous semblaient
[perdus.

Vous êtes juste et bon, Seigneur! votre colère Cache un secret d'amour que nous devons béniri Heureux quand votre main, vigilante à punir, Nous frappe à coups pressés comme le blé sur l'aire. Victor DE LAPRADE.

LÆTATUS SUM

IN HIS QUÆ DICTA SUNT MIHI IN DOMUM DOMINI BIMUS.

(Traduction du psaume cxx1.)

La maison du Seigneur.

David dépeint les transports que donne l'espoir d'habiter la maison du Seigneur, et célèbre l'amour et la concorde qui en sont les fondo

ments

Quelle joyeuse nouvelle

A fait tressaillir mon cœur!
Nous irons, peuple fidèle,
Dans la maison du Seigneur.
Vers sa majestueuse arche

Nos pas suspendaient leur marche :
Car tu veux des hôtes purs,
O mystérieuse enceinte!
Jérusalem, cité sainte,
Pour édifier les murs.

Déjà les tribus sacrées,
Tribus du Dieu d'Israël,
Avec ordre sont entrées
Au vestibule du ciel.
Par un immortel hommage
Elles rendent témoignage
Au puissant nom de mon Dieu.
Là, pour juges et pour maitres
Juda retrouve ses prêtres
Dans les splendeurs du saint lieu.
Qu'une main miraculeuse
Bénisse tous les enfants :

Jérusalem, sois heureuse
Sur les remparts triomphants!
A mes proches, à mes frères,
J'ai raconté les mystères
Du Dieu qui donne la paix.
C'est à ce Dieu qu'il faut croire :
Temple saint, c'est pour ta gloire
Que je chante ses bienfaits!

Alexandre GUILLEMIN.

LA LAMPE DU TEMPLE.

ου

L'AME PRÉSENTE A DIEU.
Påle lampe du sanctuaire,
Pourquoi, dans l'ombre du saint lieu,
Inaperçue et solitaire,

Te consumes-tu devant Dieu ?
Ce n'est pas pour diriger l'aile
De la prière ou de l'amour,
Pour éclairer, faible étincelle,
L'œil de celui qui fit le jour.

Ce n'est pas pour écarter l'ombre
Des pas de ses adorateurs :
La vaste nef n'est que plus sombre
Devant les lointaines lueurs.

Ce n'est pas pour lui faire hommage
Des feux qui sous ses pas ont lui ;
Les cieux lui rendent témoignage,
Les soleils brûlent devant lui.
Et pourtant, lampes symboliques,
Vous gardez vos feux immortels,
Et la brise des basiliques
Vous berce sur tous les autels.
Et mon œil aime à se suspendre
A ce foyer aérien,

Et je leur dis sans les comprendre :
Flambeaux pieux, vous faites bien.

Peut-être, brillantes parcenes
De l'immense création,
Devant son trône imitent-elles
L'éternelle adoration.

Et c'est ainsi, dis-je à mon âme,
Que de l'ombre de ce bas lieu,
Tu brûles, invisible flamme,
En la présence de ton Dieu.
Et jamais, jamais tu n'oublies
De diriger vers lui mon cœur,
Pas plus que ces lampes remplies
De flotter devant le Seigneur.
Quel que soit le vent, tu regardes
Ce pôle, objet de tous les vœux,
Et comme un nuage tu gardes,
Toujours ton côté lumineux.
Dans la nuit du monde sensible
Je sens avec sérénité

Qu'il est un point inaccessible

A la terrestre obscurité.
Une lueur sur la colline,
Qui veillera toute la nuit,
Une étoile qui s'illumine
Au seul astre qui toujours luit.

Un feu qui dans l'urne demeure
Sans s'éteindre et se consumer,
Où l'on peut jeter à toute beure
Un grain d'encens pour l'allumer.
Et quand sous l'œil qui te contemple,
◊ mon âme, tu t'éteindras,
Sur le pavé fumant du temple

Son pied ne te foulera pas.

Mais vivant au foyer suprême,

Au disque du jour sans sommeil,
Il te réunira lui-même
Comme un rayon à son soleil.

Et tu luiras de sa lumière,

De la lumière de celui

Dont les astres sont la poussière
Qui monte et tombe devant lui.
LAMARTINE.

LE PREMIER LARCIN.

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Il redouble d'efforts, lutte, se débarrasse;
Et sa main, d'une bêche empruntant le secours,
Etend le dogue sur la place.

Aux aboîments du chien, le maître est accouru.
Il voit son cher Azor sur la terre sanglante;
Et, d'un destin pareil menaçant l'inconnu,
Du tube meurtrier il presse la détente.
Le coup part, le plomb siffle à l'oreille tremblante
Du voyageur, qu'il n'a point abattu.

Mais cet infortuné, qu'emporte la colère,
De la bêche à son tour frappe son adversaire :
Et près de son Azor le maître est étendu.
Du criminel bientôt s'empare la justice.
Il pleure vainement son malheur et ses toris.

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