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Sommaire : Le développement de l'œuvre de la foi; Luc XVII, 5-8. Un lit de mort à Berne. La fin d'un impie. La Parole de Dieu. Nouvelles religieuses: Suède; Bulgarie; Ile Ste-Hélène. Bulletin bibliographique: Israël aux derniers jours, etc. - De la prédication apostolique.

LE DÉVELOPPEMENT DE L'ŒUVRE DE LA FOI.

(On lira Luc XVII, 5-8.)

Un jour que notre divin Sauveur s'entretenait avec ses disciples, ils lui firent cette demande : Seigneur, augmente-nous la foi. Nous dirons aujourd'hui quelque chose de cette prière, condition indispensable de toute vie spirituelle.

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Un homme possède déjà quelque foi, quand il sent le besoin qu'il en a et qu'il s'attend uniquement à Christ pour l'obtenir. Aussi la demande des disciples est-elle une preuve de leur foi, d'une foi faible encore, il est vrai, mais qui tend à se fortifier. - Nous avons tous besoin de faire cette prière, et souvent nous ne savons pas mieux que les apôtres ne le savaient alors, quelle en est la portée. Ils demandaient sincèrement au Sauveur d'employer tous les moyens qu'il jugerait convenables pour produire dans leurs cœurs une foi plus grande. Ils s'imaginaient que le St-Esprit, se communiquant à leurs âmes, y produirait des effets immédiats, et ne rencontrerait aucun obstacle de leur part.

Grande était leur erreur; cependant, comme leur désir était sincère, le Seigneur l'exauça, non selon leurs pensées, mais de la manière et dans le temps qu'il jugea convenables.

Les disciples n'avaient aucune idée de la mer de difficultés et d'épreuves sur laquelle leur requête allait les lancer. Le développement de leur foi demandait qu'ils fussent placés sous une discipline qu'ils n'auraient pu alors envisager sans frémir; et quand ils se trouvèrent en présence des épreuves par lesquelles ils devaient être exaucés, elles s'offrirent à eux comme des obstacles insurmontables à l'accomplissement de leur désir. — Le développement de la foi demande une discipline tant intérieure qu'extérieure, qui nous paraît souvent bien mystérieuse; parfois, au moment même où le grand Médecin nous applique les remèdes qui conviennent le mieux à notre état, nous croyons n'être ni entendus, ni exaucés. Quelquefois la prière semble n'avoir d'autre effet que celui d'augmenter nos difficultés, de donner une nouvelle force à la tentation, de nous révéler d'une manière plus vive notre culpabilité et notre misère. Nous nous croyons abandonnés de Dieu, et nous sommes prêts à nous détourner de la foi, à cause des moyens mêmes par lesquels Dieu veut l'augmenter. Nous ne connaissons pas la méthode qu'il emploie et ne voyons pas loin devant nous. Dans les choses spirituelles, il nous faut souvent, comme dans les montagnes, descendre beaucoup avant de pouvoir gravir les sommets qui sont devant nous. Que dirait-on d'un voyageur qui, obligé de passer à travers un pays désert et aride pour arriver au lieu de sa destination, renoncerait à continuer son voyage, sous prétexte que si cette route était la bonne, elle serait certainement plus agréable? Or, le chrétien n'est pas moins insensé lorsqu'il dit: « Je ne puis être dans le chemin du salut, »> toutes les fois que ce chemin est triste ou pénible, que la prière s'élève avec effort, que la Parole de Dieu ne réchauffe pas son cœur, qu'il marche dans l'obscurité, et que son âme abattue est comme attachée à la poudre. Non, nous devons poursuivre notre route, que le chemin soit rude ou uni, que le ciel soit clair ou couvert de nuages. Nous sommes dans la voie de Dieu, quoique cet abattement, cette impatience, ce découragement et cette incrédulité soient bien loin d'être des sentiments que Dieu inspire. La route du devoir nous est tracée de Dieu, mais les sentiments avec lesquels nous la suivons, sortent de notre cœur défiant et porté au mécontentement. Le pélerin chrétien, loin

d'y céder, doit leur résister; la discipline de la foi veut que l'on poursuive sa marche sans se laisser arrêter par de tels obstacles, et en tenant les yeux fixés sur le but.

Vous avez besoin de patience, afin qu'après avoir fait la volonté de Dieu vous receviez l'objet de sa promesse 1. Le chemin par lequel Dieu nous fait marcher est souvent un désert, et plus d'un pélerin s'en est détourné pour en chercher un plus agréable. Mais ce chemin qui nous semble facile, conduit à un désespoir bien plus funeste que tous nos découragements. Le découragement lui-même exerce notre foi, car comment serait-elle exercée si nous n'avions ni difficultés à vaincre, ni découragement à combattre? Un chemin toujours uni, un ciel loujours serein, peuvent éprouver notre reconnaissance, mais non notre foi.

La foi elle-même, l'habitude de la foi obtenue par la fidélité à remplir son devoir, est une des récompenses de la foi. A celui qui utilise le talent que lui a confié son Maître, il sera donné davantage; mais on ôtera son talent à celui qui n'a pas su le faire valoir. Il semble, d'après la suite du discours de Jésus, que les apôtres demandaient de recevoir tout d'un coup cette foi miraculeuse et active que l'on n'obtient que peu à peu par une vie de fidélité et d'obéissance.. Mais notre divin Sauveur leur apprend qu'elle ne s'obtient que par degrés. S'ils ont un germe de foi et qu'ils marchent avec simplicité devant Dieu, cherchant à le servir et à le glorifier par leur obéissance, cette petite semence croîtra, se développera,`et finira par porter des fruits; car le royaume des cieux et la foi, qui est l'essence de ce royaume, sont semblables à un grain de semence de moutarde, qui, bien que la plus petite de toutes les graines, devient peu peu un grand arbre, sur les branches duquel les oiseaux du ciel font leur nid, et que les vents les plus violents ne pourront déraciner. Les disciples viennent demander la foi à Jésus comme ils lui demanderaient d'accomplir quelque miracle extérieur. Mais la foi n'est pas seulement un miracle: elle est aussi leur vie; elle germe comme le blé qui d'abord produit une herbe, puis un épi, et enfin le grain formé dans l'épi. Comme la foi qu'ils demandent à Jésus dépend aussi en bonne partie de leur fidélité, de leur persévérance, de leur obéissance simple et humble, il ne peut pas plus leur donner cette foi avant de les avoir disciplinés à son obéissance, qu'un maître ne saurait ré4 Hébr. X, 36.

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compenser un domestique avant d'en avoir reçu aucun service. La foi doit croître par l'exercice, et à celui qui a, il sera donné encone davantage. Si nous cultivons notre grain de foi et si nous utilisons journellement le peu que nous avons reçu de cette grâce, nous serons bientôt en état de tout supporter et aucune œuvre ne nous sera trop difficile. Mais une vie de foi est nécessaire au développement de la foi, appelée à rencontrer des épreuves que l'habitude de la foi sera seule en état de surmonter. Priez, jeûnez, veillez, combattez, travaillez, soumettezvous à la conduite de Dieu, soyez ouvriers avec Lui quand il travaille en vous, et vous aurez bientôt une foi solide et habituelle, une foi qui transportera les montagnes.

Peu de choses, dans le domaine des expériences spirituelles, sont aussi importantes à connaître que cette loi de gradation dans la foi. Il faut en quelque degré savoir de quelle manière Dieu nous conduit pour ne pas nous soustraire à sa discipline ou contrarier ses desseins, pour ne pas nous angoisser inutilement ou nous priver du bien qu'il veut nous faire. Les voies par lesquelles Dieu nous conduit, la discipline à laquelle il nous soumel, font notre éducation pour l'éternité. D'abord sa discipline a pour but de nous préparer pour son service, de former, de développer, de fortifier nos facultés spirituelles, de les exercer en les faisant servir à sa gloire, à l'avancement de son règne et au bien de nos semblables dans ce monde de péché et de douleur. Ensuite l'habitude de l'obéissance, du dévouement et de l'amour, nous prépare à la félicité du ciel, où nous attend une activité tout autrement bénie et étendue. Dieu nous traite comme des êtres libres, qui doivent faire volontairement le bien pour qu'on puisse l'appeler de ce nom. La foi dans ses divers développements doit être un acte et une habitude de l'âme, en même temps qu'un don de Dieu; elle doit être l'œuvre commune de notre esprit et de son Esprit, et c'est par elle que Dieu produit en nous le vouloir et l'exécution.

C'est par le travail qu'il nous donne à faire ici-bas, que Dieu nous prépare pour le repos éternel. C'est par la foi, qui se développe au milieu des difficultés de la terre, que Dieu nous prépare à la vue des biens éternels dans la gloire. Plus notre travail est grand ici-bas, plus notre repos à venir sera délicieux; plus nous aurons eu de foi au milieu des épreuves de la terre, plus notre vue sera claire, étendue et ravissante. Notre soumission actuelle à la volonté de Dieu, l'habitude du renoncement créée

par la foi, celle de travailler pour Dieu au milieu des doutes et des difficultés, seront suivis d'un état où le renoncement cessera, parce que l'âme, entièrement dépouillée du péché, sera remplie de Dieu et absorbée par son bienheureux service. Maintenant le Seigneur prépare ses enfants à jouir de la gloire et des joies du ciel, en les faisant passer par un feu purificateur; il les y conduit à travers les difficultés, les luttes, le renoncement. En leur accordant les grâces que réclame son service, et qui sont nécessaires pour lutter, pour prier et pour travailler avec fruit, il les prépare à porter son image et à être éternellement unis à Lui dans son ciel.

Durant son séjour terrestre, Jésus semait et faisait germer la foi dans l'âme de ses disciples par ses directions et ses enseignements. Mais la vue de leur Maître empêchait leur foi de se développer, et ce ne fut qu'après qu'il leur eut été enlevé, qu'elle devint un grand arbre, capable de braver les plus rudes tempêtes. Lorsque tout appui sensible disparut avec Christ; lorsque sa mort, sa résurrection et son ascension leur eurent arraché toute espérance d'une délivrance et d'un règne terrestres, leur foi s'attacha à un Sauveur invisible et spirituel. Les semences qu'il avait répandues et cultivées, poussèrent avec force, et cette parole qu'ils n'avaient pas comprise fut accomplie : Il vous est avantageux que je m'en aille; car si je ne m'en vais, le Consolateur ne viendra point à vous 1. Si Christ ne s'en était pas allé, l'œuvre du Consolateur, l'œuvre de la foi, n'aurait jamais pu se développer entièrement. Il est souvent nécessaire que tout appui sensible soit enlevé à l'âme pour qu'elle se repose entièrement sur ce qui est invisible, éternel et spirituel.

Quand la lumière du jour s'éteint, notre âme, jusque-là distraite par les objets extérieurs et le mouvement de la vie, se recueille et contemple les cieux où mille étoiles racontent la gloire du Dieu fort; et lorsque les vents déchaînés tourmentent notre nacelle, qu'un abîme répond à un autre abîme au bruit de ses canaux, et que l'âme agitée ne sait où chercher un asile ici-bas, il ne lui reste que Dieu, et elle se réfugie auprès de lui par la foi.

UN LIT DE MORT A BERNE,

pendant l'épidémie de 1855.

(1er article.)

Après un séjour de quelques semaines à Paris, nous revînmes à Berne. Cette ville jouit de grands avantages, car la

1 Jean XVI, 7.

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