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cendans des Brutus, des Scipion et de tous les grands hommes que nous avons pris pour modèles.

Rétablir le Capitole, y placer avec honneur les statues des héros qui le rendirent célèbre, réveiller le peuple romain engourdi par plusieurs siècles d'esclavage, tel sera le fruit de vos victoires. Elles feront époque dans la postérité. Vous aurez la gloire immortelle de changer la face de la plus belle partie de l'Europe.

Le peuple français libre, respecté du monde entier, donnera à l'Europe une paix glorieuse qui l'indemnisera des sacrifices de toute espèce qu'il a faits depuis six ans. Vous rentrerez alors dans vos foyers, et vos concitoyens diront en vous montrant: Il fut de l'armée d'Italie ».

Cette pièce est tellement anecdotique et si précieuse par les vues qu'elle manifeste . qu'encore bien que, pour accélérer la marche des événemens relatifs à une cam pagne aussi rapide que celle de l'Italie nous ne transcrivións aucune des nom” breuses pièces authentiques qui la concer

ment, nons aurions cru faire une infidélité au lecteur en la retranchant, et plus qu'une maladresse en cherchant à l'analyser. - Malgré l'enthousiasme qui s'étoit manifesté dans le Milanais à l'approche de Bonaparte, malgré les démonstrations de joie qu'on avoit fait éclater, et qu'une partie du peuple faisoit éclater encore en sa présence, il ne fut pas longtems sans s'appercevoir que des innovations aussi subites ne s'opèrent pas sans secousses, chez des peuples où la superstition propagée par la noblesse et le clergé, lui faisoit entrevoir les républicains comme les ennemis jurés de leur culte et de leurs usages. Partout on met aisément la lie du peuple en mouvement, mais plus particulièrement encore en Italie que partout ailleurs,

Une révolte, attisée par les prêtres et les partisans de la noblesse, éclata dans Milan au moment où on s'y attendoit le moins. Le général Despinoi, qui commandoit dans cette place, fit marcher sur le lieu de l'attroupement et dissipa les séditieux par une décharge de mousqueterie. Mais le mouvement insurrectionnel étoit combiné; E?

il avoit lieu en même tems à Varèse, à Pavie, à Lodi: on sonnoit le tocsin dans les campagnes; les paysans assassinoient sur les routes les soldats isolés. La garni. son de Pavie, surprise chez les bourgeois qui logeoient les soldats, avoit été désarmée ; partout les insurgés répandoient que Nice étoit prise par les Anglais, que l'armée de Condé arrivoit en Italie par les montagnes de la Suisse, et que Beaulieu, renforcé de soixante mille Autrichiens, marchoit sur Milan, pour livrer bataille aux Français qu'il falloit égorger pour seconder ses projets: le peuple étoit dans une fermentation étonnante: le danger étoit pressant; il falloit un prompt remède pour étouffer l'incendie qui eût tout dévoré si on lui eût laissé le tems de se propager: Bonaparte se porta partout et l'étouffa.

A peine a-t-il quitté Milan pour se ren dre sur les lieux où il croit sa présence nécessaire, qu'en prenant la route de Pavie où étoit le fort de l'insurrection, il rencontre sur son passage le village de Bignasco que sept à huit cents paysans armés entreprennent de défendre, pour couper sa mar

che; il ordonne à une compagnie de les attaquer ; ils sont aussitôt culbutés, dispersés, et le général français fait à l'instant mettre le feu au village qui devient en un moment la proie des flammes: exemple ter rible mais nécessité par la circonstance. Cette expédition douloureuse est à peine rerminée, qu'en suivant sa route vers Pavie, on lui annonce une nouvelle insurrection dans Milan; il s'y rend lui-même et déclare aux habitans, que s'ils ne rentrent dans le devoir, leur ville va avoir le sort de Bignasco: la menace produit son effet, tout rentre dans l'ordre; mais il reste Pavie à soumettre. Bonaparte amène avec lui l'archevêque de Milan et le charge d'aller ramener les habitans de Pavie à leur devoirs ses exhortations et les menaces de ce prélat furent infructueuses.

Le peuple de Pavie, soutenu par cinq à şix mille paysans, investit les trois cents hommes que le général français avoit laissés dans le château et les fait prisonniers Bonaparte voyant que les discours de l'archevêque n'ont aucun pouvoir sur la mule E;

titude, s'avance sur la ville qui paroissoit garnie de beaucoup de monde, avec trois cents cavaliers et un bataillon de grenadiers; il place son artillerie en avant eţ somme les rebelles de poser les armes ; mais ils répondent que tant que Pavie conservera şes remparts, ils ne se rendront pas. A ces mots les grenadiers ont ordre de se former en colonne serrée, la hache à la main et deux pièces de huit en tête ; le pas de charge s'exécute, le boulet enfonce les portes, le şoldat entre dans la ville l'arme au poing ; une première décharge fait fuir les rebelles à pas précipités, la garnison prisonnière est délivrée, Bonaparte s'empare de deux cents ôtages et fait fusiller les plus coupables,

Pavie soumise, il revint dans Milan, ou une proclamation du commandant de la place, Despinoi, acheva de terrasser les séditieux et de rendre la tranquillité à cette ville populeuse qui fut entièrement désarmée, à l'exception des habitans qui, incorporés dans les gardes civiques milanaises, avoient montré le plus vif attache

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