Page images
PDF
EPUB

Or, il semblait que le concordat de 1817 était libellé tout exprès pour faire sentir, et rendre comme palpable cette rétrogradation, jusque là comminatoire. Trois cents ans en arrière, Léon X et François Ier., les concordats de 1801 et de 1813 franchis ou abolis, rien n'y manquait. Des bénéfices à recréer, des formules de toute antiquité, des clauses comminatoires, d'autres éventuelles et indéfinies des explications relatives aux obligations du prince et des sujets, il n'en fallait pas tant pour mettre en mouvement cette fibre délicate dont nous venons de peindre l'extrême irritabilité.

[ocr errors]

Ici nous n'entendons pas dire que la France dût s'irriter, mais seulement pourquoi elle à cru devoir s'irriter.

3o. Rien n'est plus important que le choix des négociateurs. Ce n'est pas tout qu'ils soient accrédités auprès d'une cour, bien vus d'elle; il faut de plus qu'ils soient accrédités auprès de la nation dont les intérêts leur sont confiés.

autre ministre, qui disait que la révolution était une révolte de vingt-cinq ans ; et à un autre ministre encore, qui avait découvert que la moitié de la nation avait marché droit, et l'autre de travers. Et puis étonnez-vous des 20 mars !

S'ils bronchent, le faux pas est attribué à qui les a nommés; sa considération propre baisse d'autant. Les nations demandent de leurs hommes d'affaires, et tel est l'état des négociateurs, comme faisait le cardinal Mazarin: Est-il heureux? Lorsqu'un homme a paru dans des affaires qui ont eu des suites très - malheureuses, lorsqu'il s'est montré sous un titre de faveur très-peu en faveur lui-même aux yeux d'une nation, lorsque cet homme n'a à lui présenter aucun antécédent de séjour, de service, de contact parmi elle, pour elle, avec elle, et que cependant elle retrouve son nom en tête des actes qui lui importent le plus à elle-même; alors la sévérité de ses jugemens est grande, elle est légitime, elle s'étend de la personne à l'ouvrage; et, dans le cas même de l'erreur, il y a excuse dans la défiance de l'inconnu et de l'étranger, défiance qui est la sauvegarde des peuples. Je suis bien loin d'adopter rien qui soit défavorable au négociateur du concordat, je ne le crois pas plus propre à jeter à la côte le vaisseau de l'État que ne l'étaient la plupart de ses collègues ; j'adhère de toute ma force à l'hommage public que madame de Staël lui a rendu : je me borne à

noter un fait, c'est que les souvenirs de 1814, compagnons inséparables de M. de Blacas; comme ceux de beaucoup d'autres, étant venus à revivre, l'application qui s'en faisait au négociateur n'a pas ajouté à la considération du traité qui était censé son ouvrage.

Surtout il est un principe sur lequel le public ne s'est point égaré, et ne pouvait le faire, le sentiment des convenances, qui lui a fait demander dès l'abord, comment un acte ecclésiastique de cette gravité pouvait être commis aux seules mains d'un laïc.

4°. Le concordat de 1817 abolit celui de 1801 et rétablit le concordat de 1516. Mais pour rétablir une chose, il faut que ses élémens subsistent. Or le concordat de 1516 est tout de matière bénéficiale, et il n'y a plus de bénéfices: l'étoffe du rétablissement manquait donc.' De plus, si elle existait, si on la recréait, recréera-t-on aussi la prévention, la course en cour de Rome, le dévolu, et toutes les indi→ gnités consacrées par le concordat de 1516? Où conduit l'irréflexion et l'amour du vieux temps!

Le concordat de 1817 parle des bénéfices à recréer. En quelle qualité? en quel nombre? qui les paiera?

Les actes publics, obligatoires pour les États, ne doivent renfermer que des clauses positives. Les vœux, les regrets, les promesses ne peuvent y trouver place, parce que les traités sont des lois positives, et non pas des expansions sentimentales. Quels sont les maux de l'Église de France que l'on déplore, quels sont les remèdes qu'on se propose d'y appliquer ? Tout cela est vague, et prête à tout ce que l'inquiétude de l'esprit veut créer.

Il n'est pas naturel d'avoir voulu exprimer seulement un principe, ou bien un fait, en disant que le droit de nomination aux évêchés est inhérent à la couronne. En principe, on ne peut dire que la couronne ne peut exister sans la nomination aux évêchés, pas plus qu'on ne dirait que les évêchés ne peuvent exister sans la nomination de la couronne, car les chapitres et les républiques nomment : le droit général et établi des rois de France à la nomination des évêchés, date du concordat de 1516. Il n'est donc inhérent à la couronne que par le droit positif établi à cette époque. Cependant il y avait une couronne de France, et des évêchés avant ce temps; mais comme ce n'est point un simple fait matériel dont rien ne

nécessitait le rappel qu'on peut avoir eu en vue d'exprimer par l'expression de ce droit d'inhérence à la couronne, il faut aller chercher plus loin le sens véritable de cet article. C'est un mot de légitimité, qui applique aux nominations faites les droits de cette légitimité, et qui sert à la constater. On peut consulter sur cela M. l'évêque d'Orthosia et M. Frayssinous: ils ont dit le vrai mot.

5o. La revendication d'Avignon, à la suite du congrès de Vienne, est un acte fait pour rouvrir les blessures de la France. Ce congrès a tout réglé en Europe. Il a fixé les droits de chacun. Le pape est l'heureux du congrès de Vienne, car c'est à lui qu'il a le plus rendu. Au contraire la France, la malheureuse France est la disgraciée de ce congrès, dans ce qui l'a concerné, car c'est elle qui a dû boire le calice jusqu'à la lie; et, lorsqu'elle croyait l'avoir épuisé, voilà qu'elle trouve encore au fond une main, et la main la plus faible de toutes, qui s'avance pour lui ravir le faible dédommagement que la carte de géographie semblait seule suffire pour avertir de la convenance de cette cession l'œil des régulateurs du sort de la Fran

« PreviousContinue »