Réflexions critiques sur la poësie et sur la peinture, Volume 1

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Chez Pissot, quai de Conti, à la Sagesse., 1755 - Painting - 427 pages

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Page 40 - Si quelqu'un vous aborde avec la joie peinte sur le visage, il excite en nous un sentiment de joie; les larmes d'un inconnu nous touchent, avant même que nous en sachions la cause, et les cris d'un homme qui ne tient à nous que par l'humanité nous font courir à son secours, par un mouvement machinal qui précède toute délibération.
Page 6 - L'ennui qui suit bientôt l'inaction de l'âme est un mal si douloureux pour l'homme qu'il entreprend souvent les travaux les plus pénibles afin de s'épargner la peine d'en être tourmenté.
Page 306 - Le plaifir aftuel qui domine les hommes avec tant d'empire , qu'il leur fait oublier les maux paffés , & qu'il leur cache les maux à venir, peut bien nous faire oublier les fautes d'un poëme qui nous ont choqués davantage , dès qu'elles ne font plus fous nos yeux. Quant à ces fautes relatives, & qu'on ne démêle qu'en retournant fur fes.
Page 10 - Voilà pourquoi nous voyons les hommes s'embarraffer de tant d'occupations frivoles & d'affaires inutiles. Voilà ce qui les porte à courir avec tant d'ardeur après ce qu'ils appellent leur plaifir , comme à fe livrer à des paffions dont ils connoiflent les fuites fâcheufes , même par leur propre expérience.
Page 295 - Satyre doit être nourrie des images les plus propres à exciter notre bile. L'Ode monte dans les Cieux , pour y emprunter fes images & fes comparaifons du Tonnerre, des Aftres & des Dieux mêmes.
Page 30 - Nous ferions plufieurs jours avant que de pouvoir nous diftraire des idées noires & funeftes qu'un pareil fpeftacle ne manqueroit pas d'empreindre dans notre imagination. La tragédie de Racine , qui nous préfente l'imitation de cet événement , nous émeut & nous touche , fans laifler en nous la femence d'une triftefle durable.
Page 68 - Les hommes aimeront toujours mieux les livres qui les toucheront que les livres qui les instruiront. Comme l'ennui leur est plus à charge que l'ignorance, ils préfèrent le plaisir d'être émus au plaisir d'être instruits.
Page 9 - Mais , comme je l'ai dit , les perfonnes qu'un fang fans aigreur & des humeurs fans venin ont prédeftinées à une vie intérieure fi douce , font bien rares. La fituation de leur efprit eft même inconnue au commun des hommes , qui jugeant de ce que les autres doivent fouffrir de la folitude par ce qu'ils en fouffrent eux-mêmes , penfent que la folitude eft un mal don», ïoureux pour tout le monde.
Page 67 - ... entre les; mains du commun des hommes. Quel que foit le mérite de ces poemes, on en regarde la ledure comme une occupation férieufe, & non pas comme un plaifir.
Page 299 - La poésie du style fait la plus grande différence qui soit entre les vers et la prose. Bien des métaphores qui passeraient pour des figures trop hardies dans le style oratoire le plus élevé , sont reçues en poésie ; les images et les figures doivent être encore plus fréquentes dans la plupart des genres de la poésie, que dans les discours oratoires; la rhétorique qui veut persuader notre raison , doit toujours conserver un air de modération et de sincérité.

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