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des monuments non moins authentiques, que nous ne devions pas espérer de découvrir.

On ne peut douter de la vérité de l'authenticité de ce rituei des brachmanes dont je parle. L'auteur assurément ne flatte pas sa secte; il ne cherche point à déguiser les superstitions, à leur donner quelque vraisemblance par des explications forcées, à les excuser par des allégories. Il rend compte des lois les plus extravagantes avec la simplicité de la candeur. L'esprit humain paraît là dans toute sa misère. Si les brames observaient toutes les lois de leur Veidam, il n'y a point de moine qui voulût s'assujettir à cet état. A peine le fils d'un brame est-il né, qu'il est l'esclave des cérémonies. On frotte sa langue avec de la poix résine dé trempée dans de la farine; on prononce le mot Oum; on invoque vingt divinités subalternes, avant qu'on lui ait coupé le nombril; mais aussi on lui dit: »Vivez pour commander aux hommes;« et, des qu'il peut parler, on lui fait sentir la dignité de son être. En effet, les brachmanes furent long-temps souverains dans l'Inde, et la théocratie fut établie dans cette vaste contrée plus qu'en aucun pays du monde.

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Bientôt on expose l'enfant à la lune: on prie l'Etre suprême d'effacer les péchés que T'enfant peut avoir commis, quoiqu'il ne soit né que depuis huit jours: on adresse des an tiennes au feu; on donne à l'enfant, avec cent

cérémonies, le nom de Chormo, qui est lé titre d'honneur des brames.

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Des que cet enfant peut marcher, il passe sa vie à se baigner et à réciter des prières; il fait le sacrifice des morts; et ce sacrifice est institué pour que Brama donne à l'âme des ancêtres de l'enfant une demeure agréable dans d'autres corps.

On fait des prières aux cinq yents qui peuvent sortir par les cinq ouvertures du corps humain. Cela n'est pas plus étrange que les prières récitées au dieu Pet par les bonnes vieilles de Rome.

Nulle fonction de la nature, nulle action chez les brames, sans prières. La première fois qu'on rase la tête de l'enfant, le père dit au rasoir dévotement: »Rasoir, rase mon >>fils comme tu as rasé le soleil et le dieu >>Indro.« Il se pourrait après tout que le dieu Indro eût été autrefois rase; mais pour le soleil, cela n'est pas aisé à comprendre, à moins que les brames n'aient eu notre Apollon, que nous représentons encore sans, barbe.

Le récit de toutes ces cérémonies serait aussi ennuyeux qu'elles nous paraissent ridicules; et, dans leur aveuglement, ils en disent autant des nôtres: mais il y a chez eux' un mystère qui ne doit pas être passé sous silence; c'est le Matricha Machom. On se donne par ce mystère un nouvel être, une nouvelle vie.he

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L'âme est supposée être dans la poitrine, -et c'est en effet le sentiment de presque toute l'antiquité. On passe la main de la poitrine à la tête, en appuyant sur le nerf qu'on croit aller d'un de ces organes à l'au tre, et, l'on conduit ainsi son âme à son cerveau. Quand on est sûr que son âme est bien montée, alors le jeune homme s'écrie que son âme et son corps sont réunis à l'Être suprême, et dit: »Je suis moi-même une par>>tie de la divinité.<<

Cette opinion a été celle des plus respectables philosophes de la Grèce, de ces stoïciens qui ont élevé la nature humaine audessus d'elle-même, celle des divins Antonins; et il faut avouer que rien n'était plus capable d'inspirer de grandes vertus. Se croire une partie de la divinité, c'est s'imposer la loi de ne rien faire qui ne soit digne de Dieu même.

On trouvé, dans cette loi des brachmanes, dix commandements, et ce sont dix péchés à éviter. Ils sont divisés en trois espèces, les péchés du corps, ceux de la parole, ceux de la volonté. Frapper, tuer son prochain, le voler, violer les femmes, ce sont les péchés du corps; dissimuler, mentir, injurier, ce sont les péchés de la parole; ceux de la volonté consistent à souhaiter le mal, à regarder le bien des autres avec envie, à n'être pas touché des misères d'autrui. Ces dix commancements font pardonner tous les rites ridicules. On voit évidemment que la mo

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rale est la même chez toutes les nations civilisées, tandis que les usages les plus consacrés chez un peuple paraissent aux autres ou extravagants ou haïssables. Les rites établis divisent aujourd'hui le genre humain, et la morale le réunit.

4 La superstition n'empêcha jamais les brachmanes de reconnaître un Dieu unique. Strabon, dans son quinzième livre, dit qu'ils adorent un Dieu suprême; qu'ils gardent le silence plusieurs années avant d'oser parler, qu'ils sont sobres, chastes, tempérants; qu'ils vivent dans la justice, et qu'ils meurent sans regret. C'est le témoignage que leur rendent saint Clément d'Alexandrie, Apulée, Porphire, Palade, saint Ambroise. N'ou

blions pas surtout qu'ils eurent un paradis terrestre, et que les hommes qui abusèrent des bienfaits de Dieu furent chassés de ce paradis.

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La chute de l'homme dégénéré est le fondement de la théologie de presque toutes les anciennes nations. Le penchant naturel de l'homme à se plaindre du présent, et à van ter le passé, a fait imaginer partout une espèce d'âge d'or auquel les siècles de fer ont succédé. Ce qui est plus singulier encore, c'est que le Veidam des anciens brachmanes enseigne que le premier homme fut Adimo, et la première femme Procriti. Cheux eux, Adimo signifiait seigneur, et Procriti voulait dire la vie; comme Eva, chez les Phéniciens, et même chez les Hébreux

leurs imitateurs, signifiait aussi la vie ou le serpent. Cette conformité mérite une grande attention.

DE LA CHINE.

OSELONS-NOUS parler des Chinois sans nous en rapporter à leurs propres annales? elles sont confirmées par le témoignage unanime de nos voyageurs de différentes sectes, jacobins, jésuites, luthériens, calvinistes, anglicans; tous intéressés à se contredire. Il est évident que l'empire de la Chine était formé il y a plus de quatre mille ans. Ce peuple antique n'entendit jamais parler d'aucune de ces révolu tions physiques, de ces inondations, de ces incendies, dont la faible mémoire s'était conservée et altérée dans les fables du déluge de Deucalion et de la chute de Phaeton. Le climat de la Chine avait donc été préservée de ces fléaux, comme il le fut toujours de la peste proprement dite, qui a tant de fois ravagé l'Afrique, l'Asie et l'Europe.

Si quelques annales portent un caractère de certitude, ce sont celles des Chinois, qui ont joint, comme on l'a déjà dit ailleurs, l'histoire du ciel à celle de la terre. Seuls de tous les peuples, ils ont constamment marqué leurs époques par des éclipses, par les conjonctions des planètes; et nos astronomes, qui ont examiné leurs calculs, ont été étonnés de les trouver presque tous véritables. Les autres nations inventèrent des fables allégoriques, et les Chinois écrivirent leur histoire, la plume et l'astrolabe à la main, avec une

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