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régler les affaires de la Macédoine, & celles du Péloponnèfe où il y avoit beaucoup de troubles, fur tout entre les Achéens d'un côté, & les Meiféniens & les Lacédémoniens de l'autre. Ils avoient tous envoié des AmPolyb. baffadeurs à Rome. Il paroit que le in Legat. Sénat ne fe mettoit pas fort en peine cap. 51. de mettre fin à leurs difputes. Il ré

pondit aux Lacédémoniens que le peuple Romain ne vouloit plus defor-. mais le mêler de leurs affaires. Les Achéens demandoient que le peuple Romain leur fournit du fecours contre les Mefféniens, conformément au Traité ou que du moins il ne permît pas qu'on envoiât d'Italie aux Mefféniens des armes ou des vivres. On leur ré pondit que fi quelques villes fe retiroient de la Ligue des Achéens le Sénat ne croioit point devoir entrer dans ces difputes: ce qui étoit ouvrir une porte à des ruptures & à des divifions, & même en quelque forte les autorifer.

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On reconnoit dans ces procédés la politique jaloufe & artificieuse des Romains, qui ne tendoit qu'à affoiblir Philippe & les Achéens qui leur faifoient ombrage, & couvroit leurs

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deffeins ambitieux du prétexte de fecourir les foibles opprimés

§. X.

Philopémen attaque Messéne. Il eft pris par les Mefféniens, &mis à mort. Melléne fe rend aux Achéens: Célebre convoy de Philopénien, dont les cendres font portées à Mégalopolis. Suite de Paffaire des Bannis de Sparte. Mort de Ptolémée Epiphane. Philométor fon fils lui fuccéde.

An. M.

3821.

Plut. in

DINOCRATE le Meffénien, ennemi particulier de Philopémen, avoit dé- Av.J.C. taché Mefféne de la Ligue des Achéens, 283. & fongeoit à s'emparer d'un pofte con- Liv. lib. fidérable près de cette ville, nommé 39.n.48. Corone. Philopémen, âgé pour lors Philop. de foixante-dix ans, & Général des p. 366. Achéens pour la huitiéme fois, étoit 368. actuellement malade. Dès qu'il eut Polyb. appris cette nouvelle, il partit malgré in Legat.

fon incommodité, fit une marche forcée, & s'avança vers Mefféne avec un efcadron peu nombreux, mais compofé de l'élite des jeunes gens de Mé. galopolis. Dinocrate, qui étoit venu à fa rencontre, fut d'abord enfoncé & mis en fuite: mais cinq cens che

C.52-53.

Vaux, qui gardolent le plat pavs de Mef féne, étant furvenus, & l'aiant renforcé, il tourna vifage, & mit à fon tout Philopémen en déroute. Celuici, uniquement attentif à fauver les jeunes gens qui l'avoient suivi, fit des actions extraordinaires de courige: mais étant tombé de fon cheval, & fa chute l'aiant bleffé confidérablement à la tête, il fut pris par les ennemis, qui le menérent à Melléne. Plutarque regarde ce malheur de Phi lopéen comme la punition d'une parole téméraire & arrogante qui lui étoit échapée à l'occafion des louanges que l'on donnoit à un Général. Comment, dit-il, peut-on faire cas d'un homme, qui les armes à la main s'eft laifSé prendre en vie par les ennemis?

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A la prémiére nouvelle qui fut portée à Mefféne qu'il étoit pris & qu'on l'amenoit les Mefféniens furent fi transportés de joie, qu'ils coururent tous aux portes de la ville, ne pouvant croire que ce qu'on leur annonçoit fût vrai, s'ils ne le voioient de leurs yeux, tant cet événement leur paroiffoit hors de toute vraisemblance. Pour fatisfaire l'avide curiofité des habitans, dont plufieurs n'avoient pu venir à

bout

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bout de le voir, il falut produire l'illuftre prifonnier fur le théatre, où la multitude s'étoit rendue en foule. Quand ils virent Philopémen qu'on traînoit lié & garroté, la plupart en furent touchés de compaffion jufqu'à verfer des larmes. Il fe répandit mê me parini le peuple un bruit fourd, qui partoit d'un fond d'humanité & de reconnoiffance bien louable » Qu'on " devoit fe fouvenir des bienfaits qu'on avoit reçus de lui, & de la liberté qu'il avoit confervée à l'A" chaïe en chalant le Tyran Nabis. Les Magiftrats ne le laifferent pas lontems en fpectacle, craignant les fuites de l'attendriffement qu'ils remarquoient dans le peuple. Ils l'enlevérent brusquement, & après avoir tenu confeil entr'eux, ils le firent conduire dans un lieu appellé Le Tréfor. C'étoit un caveau fous terre, qui ne recevoit aucun air ni aucun jour du dehors, & qui n'avoit point de porte, mais qui fe bouchoit avec une groffe pierre qu'on rouloit à l'entrée. Peufern érent dans ce caveau, & mirent des foldats tout autour pour le garder.

Dès

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que

la nuit fut venue,

& que

le

le peuple fe fut retiré, Dinocrate ouvrit la prifon, & y fit defcendre l'exé cuteur pour porter le poifon à Ph lopémen, avec ordre de fe tenir là jufqu'à ce qu'il l'eût avalé. Dès qu'il vit de la lumiére, & cet homme près de lui tenant fa lampe d'une main la coupe de poifon de l'autre, il se releva avec peine à cause de fa grande foibleffe, fe mit en fon féant, & prenant la coupe il demanda à l'exécuteur s'il n'avoit rien entendu dire de fes Cavaliers, & fur tout de Lycortas. L'exécuteur lui dit qu'il avoit ouï dire qu'ils s'étoient prefque tous fauvés. Philopémen le remercia d'un figne de tête, & le regardant avec douceur Tu me donnes la une bonne nouvelle, lui dit-il. Nous ne sommes donc pas tout-àfait malheureux. Et fans faire la moindre plainte, il prit le poifon, & fe recoucha fur fon manteau. Le poiton fit bientôt fon effet : car il étoit fi ab. battu & fi foible, qu'il fut éteint dans

un moment.

Quand le bruit de fa mort fut répandu parmi les Achéens, toutes leurs villes furent plongées dans un deuil & dans un abbattement qu'on ne peut exprimer; & auffitôt tous leurs jeunes

gens

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