On cherche les rieurs; et moi je les évite. Les méchants diseurs de bons mots. J'en vais peut-être en une fable Introduire un; peut-être aussi Que quelqu'un trouvera que j'aurai réussi. Un rieur étoit à la table D'un financier, et n'avoit en son coin Que de petits poissons tous les gros étoient loin. Il prend donc les menus, puis leur parle à l'oreille; D'écouter leur réponse. On demeura surpris, Le rieur alors, d'un ton sage, Dit qu'il craignoit qu'un sien ami, N'eût depuis un an fait naufrage: Il s'en informoit donc à ce menu fretin: Mais tous lui répondoient qu'ils n'étoient pas d'un âge A savoir au vrai son destin; Les gros en sauroient davantage. N'en puis-je donc, messieurs, un gros interroger? De dire si la compagnie Prit goût à sa plaisanterie, J'en doute; mais enfin, il les sut engager A lui servir d'un monstre assez vieux pour lui dire Et que depuis cent ans sous l'abîme avoient vus Un rat, hôte d'un champ, rat de peu de cervelle. Des lares paternels un jour se trouva soul. Crut voir, en les voyant, des vaisseaux de haut bord. Il n'osoit voyager, craintif au dernier point. N'étant pas de ces rats qui, les livres rongeants, Parmi tant d'huîtres toutes closes Une s'étoit ouverte, et, bàillant au soleil, Humoit l'air, respiroit, étoit épanouie, Blanche, Cette fable contient plus d'un enseignement : Que ceux qui n'ont du monde aucune expériencé Que tel est pris qui croyoit prendre. Certain ours montagnard, ours à demi léché, Il fût devenu fou la raison d'ordinaire Il est bon de parler, et meilleur de se taire; Mais tous deux sont mauvais alors qu'ils sont outrés. |