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Pour un ane enlevé deux voleurs se battoient : L'un vouloit le garder, l'autre le vouloit vendre. Tandis que coups de poing trottoient, Et que nos champions songeoient à se défendre, Arrive un troisième larron

Qui saisit maître Aliboron 1.
L'àne, c'est quelquefois une pauvre province :
Les voleurs sont tel et tel prince,
Comme le Transylvain, le Turc et le Hongrois.

Au lieu de deux, j'en ai rencontré trois :
Il est assez de cette marchandise.

De nul d'eux n'est souvent la province conquise :
Un quart voleur survient, qui les accorde net
En se saisissant du baudet.

1 Maître Aliboron, expression usitée autrefois pour désigner un ane, ou un ignorant. Rabelais, liv. m, chap. xx, appelle un avocat maître Aliborum.

2 Pour un quatrième voleur.

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On ne peut trop louer trois sortes de personnes :
Les dieux, sa maîtresse et son roi.
Malherbe le disoit : j'y souscris, quant à moi;
Ce sont maximes toujours bonnes.

La louange chatouille et gagne les esprits :
Les faveurs d'une belle en sont souvent le prix.
Voyons comment les dieux l'ont quelquefois payée.

Simonide avoit entrepris

L'éloge d'un athlète; et, la chose essayée,
Il trouva son sujet plein de récits tout nus.
Les parents de l'athlète étoient gens inconnus.

Son père, un bon bourgeois; lui, sans autre mérite :

Matière infertile et petite.

Le poëte d'abord parla de son héros.

Après en avoir dit ce qu'il en pouvoit dire,

Il se jette à côté, se met sur le propos
De Castor et Pollux; ne manque pas d'écrire
Que leur exemple étoit aux lutteurs glorieux;
Élève leurs combats, spécifiant les lieux
Où ces frères s'étoient signalés davantage :
Enfin l'éloge de ces dieux

Faisoit les deux tiers de l'ouvrage.
L'athlète avoit promis d'en payer un talent :
Mais, quand il le vit, le galant

N'en donna que le tiers, et dit fort franchement
Que Castor et Pollux acquitassent le reste.

Faites-vous contenter par ce couple céleste.
Je vous veux traiter cependant :
Venez souper chez moi; nous ferons bonne vie.
Les conviés sont gens choisis,

Mes parents, mes meilleurs amis;
Soyez donc de la compagnie.

Simonide promit. Peut-être qu'il eut peur
De perdre, outre son dû, le gré de sa louange.
Il vient: l'on festine, l'on mange.
Chacun étant en belle humeur,

Un domestique accourt, l'avertit qu'à la porte
Deux hommes demandoient à le voir promptement.

Il sort de table; et la cohorte

N'en perd pas un seul coup de dent.

Ces deux hommes étoient les gémeaux de l'éloge.
Tous deux lui rendent grâce; et, pour prix de ses vers,

Ils l'avertissent qu'il déloge,

Et que cette maison va tomber à l'envers.

La prédiction en fut vraie.

Un pilier manque; et le plafonds,

Ne trouvant plus rien qui l'étaie,

Tombe sur le festin, brise plats et flacons,

N'en fait pas moins aux échansons.

Ce ne fut pas le pis: car, pour rendre complète
La vengeance due au poëte,

Une poutre cassa les jambes à l'athlète,
Et renvoya les conviés

Pour la plupart estropiés.

La renommée eut soin de publier l'affaire.
Chacun cria: Miracle! On doubla le salaire

Que méritoient les vers d'un homme aimé des dieux.

Il n'étoit fils de bonne mère

Qui, les payant à qui mieux mieux,
Pour ses ancêtres n'en fît faire.

Je reviens à mon texte et dis premièrement,
Qu'on ne sauroit manquer de louer largement
Les dieux et leurs pareils; de plus, que Melpomène
Souvent, sans déroger, trafique de sa peine;
Enfin, qu'on doit tenir notre art en quelque prix.
Les grands se font honneur dès lors qu'ils nous font grâce :

Jadis l'Olympe et le Parnasse
Étoient frères et bons amis.

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