L'âne d'un jardinier se plaignoit au Destin Et pourquoi? pour porter des herbes au marché. Le Sort, de sa plainte touché, Lui donne un autre maître; et l'animal de somme J'attrapois, s'il m'en souvient bien, Quelque morceau de chou qui ne me coûtoit rien; Il fut couché tout le dernier. Autre plainte. Quoi donc! dit le Sort en colère, Que cent monarques pourroient faire! Le Sort avoit raison. Tous gens sont ainsi faits : La pire est toujours la présente. Nous fatiguons le Ciel à force de placets. Nous lui romprons encor la tête. Aux noces d'un tyran tout le peuple en liesse Le Soleil, disoit-il, eut dessein autrefois Aussitôt on ouït, d'une commune voix. Se plaindre de leur destinée. Les citoyennes des étangs. Que ferons-nous, s'il lui vient des enfants? Dirent-elles au Sort. Un seul Soleil à peine Se peut souffrir; une demi-douzaine Mettra la mer à sec, et tous ses habitants. Adieu joncs et marais notre race est détruite; A l'eau du Styx. Pour un pauvre animal, Grenouilles, à mon sens, ne raisonnoient pas mal. Ésope conte qu'un manant, Aperçut un serpent sur la neige étendu, N'ayant pas à vivre un quart d'heure. Le villageois le prend, l'emporte en sa demeure; Et, sans considérer quel sera le loyer D'une action de ce mérite, |