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imitations font donc des modéles que je me ferois fait un fcrupule de refufer aux jeunes Poétes, & même aux autres Ecrivains en tout genre.

Quant aux Changemens, je les ai fupprimés en entier pour me conformer aux intentions de l'Auteur même. Je me fuis fait une loi de le rendre tel qu'il a defiré de paroître aux yeux du Public, & je n'ai point hé→ fité de profcrire après fa mort, ce qu'il a jugé digne de changement durant fa vie dans la dernière édition qu'il a fait faire de fes Ouvrages. (3) Ainfi j'efpera que le Savant & l'Homme du monde feront également contens de la mienne. Elle eft, je l'ofe dire, la plus correcte qu'on ait donnée jufqu'à préfent des Oeuvres de ce célébre Poéte.

PRÉFACE

DE

L'EDITEUR.

(Edition de Paris 1740. en 2. Vol. in -4.) C'EST un ufage établi que tout Editeur cherche à relever par fes louanges le mérite des Ouvrages qu'il donne au public: foit defir de juftifier fon propre goût; foit uniquement zéle pour la gloire de l'Au

teur.

Ces deux motifs me font prefqu'également êtrangers. Le travail que j'ai entrepris, n'eft pas de mon REMARQUES.

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choix. J'ai été prié, fi je puis m'exprimer ainfi, & ceux qui me prioient, étoient en droit de m'ordonner. Pour M. Despréaux il n'a pas besoin de mes éloges. La réputation que fes Ecrits lui ont acquife eft confirmée par le tems; & toutes les Nations polies s'accordent à le placer au rang de ces Ecrivains rares qui doivent paffer à la poftérité. Non que durant fa vie il ait obtenu tous les fuffrages: il vit au contraire fe déchaifner contre lui un grand nombre d'Auteurs médiocres qu'il avoit ofé attaquer comme tels. Mais ily a long-temps que leurs critiques font tombées dans l'oubli avec leurs noms mêmes.

Je ne me prévaudrai donc point de l'ufage. Mon unique objet eft de rendre compte du plan que je me fuis propofé: heureux fi j'avois fçû le remplir, puisqu'il a mérité la plus glorieuse approbation.

On s'eft principalement conformé pour le texte à TEdition qui parut en 1713. fous les yeux de M. de Valincourt: & l'ortographe qu'il a fuivie étant celle de l'Auteur même (1), on s'est fait une loi de la copier. Quand une ortographe différente ne changeroit rien à la mesure du vers, ni à la rime: pourquoi envier aux Ecrivains qui ont immortalifé le dernier regne un honneur qu'on rend tous les jours aux Anciens, & qu'on a rendu, pour me renfermer dans la claffe de nos Poëtes, à Marot, & à Regnier ?

Quant aux éclairciffemens, je m'en fuis tenu à l'idée précise du mot: c'est-à-dire, que j'ai tâché de prendre un jufte milieu entre des notes, qui, pour être trop concises, n'éclairciffent pas, & un commen

REMARQUES.

(1) Cette Ortographe n'eft nullement celle de M. Despréaux, comme on peut aifément s'en convaincre en la comparant à Edition de 1701. C'eft l'Ortegraphe de M. l'Abbé Renaudot:

du moins eft-elle prefque par tout conforme à celle des Ouvrages de ce favant Abbé, qui, prenant foin de l'Edit, de 1713. avec M. de Valincour , en revie lui-même toutes les Epreuves.

taire chargé de faits étrangers, ou amenés de loin, qui détourne & fatigue l'attention. Je suis bien éloigné, au refte, de m'attribuer ce qui ne m'appartient pas. J'avoue ingenument & avec reconnoiffance que j'ai profité du travail de M. Broffette, & que s'il m'eft arrivé quelquefois de le rectifier, je n'ai prefque fait d'ailleurs que choifir dans fon commentaire ce qui étoit convenable à mes vûës, fans m'affujettir néanmoins à fes expreffions.

Le même efprit m'a guidé dans les imitations. Je n'ai point envifagé fous cette idée les endroits où M. Despréaux s'eft rencontré avec des Auteurs modernes fans le vouloir, & fans les avoir peut-être jamais lûs. Je n'ai regardé comme imités que les endroits remarquables, où l'on voit clairement que le Poëte a eu les Anciens en vûe, & qu'il a, pour ainfi dire, lutté

contr'eux.

A propos de ces vers :

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Comme un Pilote en mer qu'épouvante l'orage, Dés que le bord paroît, fans fonger où je fuis Je me fauve à la nage, & j'aborde où je puis. (2) Qu'on dife que le Bembe a dit la même chofe en Latin; un Lecteur judicieux n'y prend nul interêt parce qu'il ne trouve rien qui le frappe, ni dans le fonds de la pensée, ni dans le tour. Mais, fi à l'occafion de ce vers,

La colére fuffit, & vaut un Apollon.

on lui rappelle celui-ci de Juvenal:

Si natura negat, facit indignatio verfum.

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Alors il lui femble qu'il voit deux Athletes qui fe difputent la victoire; & que, juge du combat, il couronne lui-même le vainqueur.

REMARQUES.

(2) Qu'on dife &c.] Voïés, Tom. I. page 11. Remarques, ·

xxviij PRE'F. DE L'EDITEUR DE 1740.

Je dois maintenant parler des additions & des ornemens dont on a enrichi cette édition.

Les additions les plus confidérables font l'éloge de M. Defpréaux compofé par M. de Boze, & le Bolaana.

Le public eft redevable du Bolaana à M. de Monchefnay fi connu par fes fuccès dramatiques, & par fes liaisons avec M. Defpréaux dont il à partagé la plus étroite confiance. C'est par là qu'il a été à portée de nous communiquer des fingularités, des jugemens, des traits qui feroient reftés dans l'oubli, s'ils avoient eû pour témoin un ami moins zélé, ou moins éclairé.

A l'égard des ornemens on n'a point fongé à les multiplier, moins encore à les annoncer ici d'un air faftueux (3). On s'eft propofé feulement de les rendre convenables pour le deffein, & dignes du Public par l'exécution.

REMARQUES.

(3) L'Editeur en veut aux Editions d'Amfterdam, enrichies de Gravures de Bernard Picart. On a mis à la tête de ces Editions

une Explication des Figures & Vi gnettes; & je n'ai rien vu de faf tueux dans cette explication toute fimple.

xxix

ELOGE

DE M. DESPRÉAUX,

Tiré du Difcours (1) que M. DE VALINCOUR, Secretaire du Cabinet du Roi, Chancelier de l'Academie, prononça à la réception de M. Abbé D'ESTREES (2).

JE ne crains point ici, MESSIEURS, que l'amitié me rende fufpect fur le fujet de Monfieur Defpreaux. Elle me fourniroit plûtoft des larmes hors de faifon, que des loüanges exagérées. Ami dés mon enfance, & ami intime de deux des plus grands Perfonnages, qui jamais ayent efté parmi vous, je les ai perdus tous deux (3) dans un petit nombre d'années. Vos fuffrages m'ont élevé à la place du premier, que j'aurois voulu ne voir jamais vacante. Par quelle fatalité faut-il que je fois encore deftiné à recevoir aujourd'huy en voftre nom l'Homme illuftre qui va remplir la place de l'autre ; & que dans deux occafions. où ma douleur ne demandoit que le filence & la folitude, pour pleurer des Amis d'un fi rare merite, je me fois trouvé engagé à paroiftre devant vous pour faire leur éloge!

Mais quel éloge puis-je faire ici de Monfieur Def

REMARQUES.

(1) M. de Valincour fit imprimer fon Difcours entier à la têse de l'Edition de 1713.

(2) M. l'Abbé d'Eftrées, Arshevêque de Cambrai, mourus

le 3. Mars 1718. dans fa 52. année. Du MONTEIL.

(3) M. Racine, mort en 1699. M. Despréaux, mort en 1711. Bross,

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