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On trouve fouvent dans l'Ecriture Sainte Jacob, Ifrael, Juda, qui font des noms de Patriarches, pris dans un fens étendu pour mar quer tout le Peuple Juif. M. Fléchier, parlant du fage & vaillant Machabée, auquel il compare M. de Turène, a dit » cet home Oraison fus » qui réjouiffoit Jacob par fes vertus & par fes exploits. Jacob, c'est-à-dire le Peuple Juif. Au lieu du nom de l'éfet, on fe fert fouvent du nom de la cause instrumentale qui fert à le produire : ainfi pour dire, que quelqu'un écrit bien, c'est-à-dire, qu'il forme bien les caractères de l'écriture, on dit qu'il a une belle main.

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La plume eft auffi une cause inftrumentale de l'Ecriture, & par conféquent de la composition ; ainsi plume se dit par métonymie de la manière de former les caractères de l'écriture & de la manière de composer.

Plume fe prend auffi pour l'auteur même, c'est une bone plume, c'est-à-dire, c'est un auteur qui écrit bien : c'est une de nos meilleures plumes, c'est-à-dire, un de nos meilleurs auteurs.

Stile fignifie auffi par figure la manière d'exprimer les pensées.

Les anciens avoient deux manières de former les caractères de l'écriture; l'une étoit

nebre deM. de Turènc

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pingendo, en peignant les lettres, ou fur des feuilles d'arbres, ou fur des peaux préparées, ou fur la petite membrane intérieure de l'écorce de certains arbres; cette membrane s'apèle en latin liber, d'où vient livre ; où fur de petites tablètes faites de l'arbriffeau papýrus, ou fur de la toile, &c. Ils écrivoient alors avec de petits rofeaux, & dans la fuite ils fe fervirent auffi de plumes come nous.

L'autre manière d'écrire des anciens étoit incidendo, en gravant les lettres fur des lames de plomb ou de cuivre ; ou bien fur des tablètes de bois, enduites de cire. Or pour graver les lettres fur ces lames, ou fur ces tablètes ils fe fervoient d'un poinçon, qui étoit pointu par un bout & aplati par l'autre : la pointe servoit à graver, & l'extrémité aplatie fervoit à éfacer ; & c'eft pour cela qu'Horace a Lib. 1. fat. dit ftilum vértere, tourner le ftile, pour dire, éfacer, coriger, retoucher à un ouvrage. Ce poin* de súos. çon s'apeloit Stilus, * Stile: tel eft le fens propre de ce mot; dans le fens figuré, il fipetite colo- gnifie la manière d'exprimer les pensées. C'est en ce fens que l'on dit, le ftile fublime, le ftile fimple, le ftile médiocre, le stile soutenu, le stile grave, le ftile comique, le stile hiftorique, le ftile poétique, le ftile de la conversation, &c.

X. V. 72.

Columna,

columella,

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Outre toutes ces manières diférentes d'exprimer les pensées, manières qui doivent convenir aux fujets dont on parle, & que pour cela on apèle ftile de convenance ; il y a encore le stile perfonel; c'est la manière partìculière dont chacun exprime fes pensées. On dit d'un auteur que fon ftile eft clair & facile, ou au contraire que fon ftile eft obscur, embaraffe, &c: on reconoit un auteur à son stile, c'est-à-dire, à sa manière d'écrire, come on reconoit un home à fa voix, à fes geftes, & à fa démarche.

Stile fe prend encore pour les diférentes manières de faire les procédures felon les difé rens usages établis en chaque jurisdiction : le ftile du Palais, le ftile du Confeil, le ftile des Notaires, &c. Ce mot a encore plufieurs autres ufages qui viènent par extenfion de ceux dont nous venons de parler.

Pinceau, outre fon fens propre, fe dit auffi quelquefois par métonymie, come plume & Stile: on dit d'un habile peintre, que c'est un favant pinceau.

*

Voici encore quelques exemples tirés de l'Ecriture Sainte où la caufe eft prise pour l'éfet. Si peccaverit ánima portábit iniquitátem Levit. cl fuam, elle portera fon iniquité, c'est-à-dire,

*

V. Y.

1.

Mich.c.v11 la peine de fon iniquité. Iram Dómini portabo

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quoniam peccávi, où vous voyez que par la co lère du Seigneur, il faut entendre la peine qui eft une fuite de la colère. Non morabitur opus X1X. V. 13o mercenárii tui apud te usque manè, opus, l'ouvrage,

Levit. Ca

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c'est-à-dire, le falaire, la récompenfe qui eft

due à l'ouvrier à cause de fon travail. Tobie a dit la même chose à fon fils tout fimpleTob. c. tv. ment: Quicúmque tibi áliquid operátus fuerit, ftatim ei mercédem reftitue, & merces mercenárii tui apud te omninò non remaneat. Le Prophète Ofée dit » que les Prêtres mangeront les péchés du peuOsée ̧c ¡v. ple, peccáta pópuli mei cómedent, c'est-à-dire, les victimes ofertes pour les péchés.

3. 8.

II. LEFET POUR LA CAUSE: come

lorfqu'Ovide dit que le mont Pélion n'a Metam, L point d'ombres, nec habet Pélion umbras ; c'est*14. V. S13. à-dire, qu'il n'a point d'arbres, qui font la caufe de l'ombre; l'ombre, qui eft l'éfet des arbres, eft prise ici pour les arbres mêmes. Dans la Généfe, il eft dit de Rébecca que deux nations étoient en elle; c'est-à-dire, Efau & Jacob, les péres de deux nations; Jacob des Juifs, Efau des Iduméens.

Duæ gentes funt in útero tuo, & duo pópuli ex ventre tuo dividéntur. Gen. c, xxv, V. 23、

Les Poètes difent la pâle mort, les pâles mala-. dies, la mort & les maladies rendent pâle. Pallidámque Pirénen, la pâle fontaine de Pyrène: Perfe. Prol. c'étoit une fontaine confacrée aux Mufes. L'aplication à la poéfie rend pâle, come toute autre aplication violente. Par la même raison Virgile a dit la trifte vieilleffe.

Æn. L. trà

Lib.1.Od.4

Palléntes hábitant morbi triftifque Senéctus. Et Horace, pallida mors. La mort, la maladie, V.275. & les fontaines confacrées aux Muses ne font point pâles; mais elles produifent la pâleur: ainfi on done à la cause une épitète qui ne convient qu'à l'éfet.

III. LE CONTENANT POUR LE CONTENU : Come quand on dit,il aime la bouteille,c'eft-à-dire,il aime le vin. Virgile dit que Didon ayant préfenté à Bitias une coupe d'or pleine de vin, Bitias la prit & fe lava, s'arofa de cet or plein 5 c'eft-à-dire, de la liqueur contenue dans cette coupe d'or.

ille ímpiger haufit

Spumántem páteram, & pleno fe próluit auro. Auro eft pris pour la coupe, c'eft la matière pour la chofe qui en eft faite, nous parlerons bientot de cette espèce de figure, enfuite la coupe eft prife pour le vin.

Le ciel, où les anges & les faints jouiffent

Æn. I. V

743.

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