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métaphore, provinciam fufcipere, être dans un

emploi, dans une fonction, faire quelque en. Ter. Phor. treprise. Provinciam cepifti duram, tu t'es chargé A&.1.fc.2. d'une mauvaise comiffion, d'un emploi dificile.

2. Mais lorsque la façon de parler latine eft trop éloignée de la françoife, & que la lettre n'en peut pas aifément être entendue, les Dictionaires devroient l'expliquer d'abord litéralement, & enfuite ajouter la phrase fran, çoife qui répond à la latine; par exemple: láterem crudum laváre, laver une brique crue, c'eft-à-dire, perdre fon tems & fa peine, perdre fon latin. Qui laveroit une brique avant qu'elle fût cuite, ne feroit que de la boue & perdroit la brique. On ne doit pas conclure de cet exemple, que jamais laváre ait fignifié en latin perdre, ni later tems ou peine.

Au refte, il est évident que ces diverses fignifications qu'une langue done à un même mot d'une autre langue, font étrangères à ce mot dans la langue originale; ainsi elles ne font point de mon fujet : je traite seulement. ici des diférens fens que l'on done à un même mot dans une même langue, & non pas des diférentes images dont on peut se servir en traduisant, pour exprimer le même fonds de penfée.

DES TROPES.

SECONDE

PART I E.

Des Tropes en particulier.

I.

LA CATA CHRESE.

Abus, Extenfion, ou Imitation.

Es langues les plus riches n'ont point un

Κατάκρισις.

Laffez grand nombre de mots pour expri- avalio

mer chaque idée particulière, par un terme qui ne foit que le figne propre de cette idée; ainfi l'on eft souvent obligé d'emprunter le mot propre de quelqu'autre idée, qui a le plus de raport à celle qu'on veut exprimer; par exemple: l'ufage ordinaire eft de clouer des fers fous les piés des chevaux, ce qui s'apèle ferrer un cheval: que s'il arive qu'au lieu de fer on fe ferve d'argent, on dit alors que les chevaux font ferrés d'argent, plutot que d'inventer un nouveau mot qui ne feroit pas entendu : on ferre auffi d'argent une cassète, &c. alors ferrer fignifie par extenfion, garnir d'argent au lieu de fer. On dit de même aler à cheval fur un bâton, c'est-à-dire, fe mettre fur un bâton

Abufio.

*

Hor. 2.Sat,

3. V. 248.

de la mème manière qu'on fe place à cheval.

Lúdere par impar; equitáre in arundine longâ. Dans les ports de mer on dit bâtir un viffeau, quoique le mot de bâtir ne fe dife proprement que des maifons ou autres édifices: Virgile 'An.2 v.16. s'est servi d'ædificáre, bâtir, en parlant du cheCic. pro le val de Troie ; & Cicéron a dit, adificáre clafn. 9. aiter fes, bâtir des flotes. Dieu dit à Moïfe, je

ge manília.

IV.

ferai pleuvoir pour vous des pins du Ciel, & ces pains, c'étoit la mâne: Moïfe en la monExod. ch. trant,dit aux Juifs, voila le pain que Dieu vous a X91. v.4. & doné pour vivre. Ainfi la mâne fut apelée pain

XVI.

15.

par extenfion.

Parricida, paricide, fe dit en latin & en fran çois, non feulement de celui qui tue 'fon pére, ce qui eft le premier ufage de ce mot; mais il fe dit encore par extenfion de celui qui fait mourir sa mére, ou quelqu'un de fes parens, ou enfin quelque perfone facrée.

Ainfi la Catachrèfe eft, pour ainsi dire, un écart que certains mots font de leur première fignification, pour en prendre une autre qui y a quelque raport, & c'eft auffi ce qu'on apèle extenfion: par exemple ; feuille se dit par extension ou imitation des chofes qui font plates & minces, come les feuilles des plantess

on dit une feuille de papier, une feuille de fer blanc, une feuille d'or, une feuille d'étain, qu'on met de rière les miroirs : une feuille de carton ; le talc fe leve par feuilles; les feuilles d'un paravent, &C.

La langue,qui eft le principal organe de la parole, a doné fon nom par métonymie & par extension au mot générique dont on fe fert pour marquer les idiomes, le langage des diférentes nations: langue latine, langue françoife.

Glace, dans le fens propre, c'eft de l'eau gelée ce mot fignifie enfuite par imitation, par extension, un verre poli, une glace de miroir, une glace de caroffe.

Glace fignifie encore une forte de compo fition de fucre & de blanc d'oeuf, que l'on coule fur les bifcuits, ou que l'on met fur les fruits confits.

Enfin, glace fe dit encore au plurier, d'une forte de liqueur congelée.

Il y a même des mots qui ont perdu leur premiére fignification, & n'ont retenu que celle qu'ils ont eue par extension : florir, florif fant, fe difoient autrefois des arbres & des plantes qui font en fleurs; aujourd'hui on dit plus ordinairement fleurir au propre & florir au figuré; fi ce n'eft à l'infinitif, c'est

'Att. L. 14.

au moins dans les autres modes de ce verbe; alors il fignifie être en crédit, en honeur, en réputation: Pétrarque floriffoit vers le milieu du 14. Siécle: une armée florissante, un empire floriffant. » La langue grèque, dit Madame Dacier, »fe maintint encore affez floriffante jufqu'à la » prise de Constantinople, en 1453.

Prince, en latin princeps,fignifioit feulement autrefois, premier, principal; mais aujourd'hui en françois il fignifie, un fouverain ou une perfone de maifon fouveraine.

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Le mot Imperátor, Empereur, ne fut d'abord qu'un titre d'honeur que les foldats donoient dans le camp à leur Général, quand il s'étoit diftingué par quelque expédition mémorable: on n'avoit ataché à ce mot au cune idée de fouveraineté, du tems même de Jules Céfar, qui avoit bien la réalité de fouverain, mais qui gouvernoit fous la forme de l'anciène République. Ce mot perdit fon anciène fignification vers la fin du regne d'Augufte, ou peut-être même plus tard.

Le mot latin fuccurrere que nous traduisons Cic. ad par fecourir, veut dire proprement courir fous Epift. 1. fub Ou fur. Cicéron s'en eft fervi plufieurs fois en finem. ce fens; fuccurram atque fubibo. Quidquid fucSenec. Ep. currit libet fcribere, & Sénéque dit, óbvios, fi no

III.

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