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& le vin: Au lieu que la liaison qui fe trouve entre les objets, dans la fynecdoque, fupofe que ces objets forment un ensemble come le tout & la partie; leur union n'est point un fimple raport, elle eft plus intérieure & plus dépendante : c'est ce qu'on peut remarquer dans les exemples de l'une & de l'autre de ces figures.

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V.

L'ANTONOMASE.

Antonomafe eft une efpèce de fynecdo- 'Avropa que, par laquelle on met un nom comun

cía, pronominátio :

un autre de

ἀντὶ

pour un nom propre, ou bien un nom propre nom pour pour un nom comun. Dans le premier cas,on avrà pour, veut faire entendre que la perfone ou la chofe contre & dont on parle excèle fur toutes celles qui peu- nome. ὀνομάζω, je vent être comprises fous le nom comun : & dans le fecond cas, on fait entendre que celui dont on parle reffemble à ceux dont le nom propre eft célèbre par quelque vice ou par quelque vertu,

I. Philofophe, Orateur, Poète, Roi, Vile, Monfieur, font des noms comuns ; cependant l'antonomafe en fait des noms particu

Virg. Ec.

IX. V. 1.

liers qui équivalent à des noms propres. Quand les anciens difent le Philofophe, ils entendent Aristote.

Quand les Latins difent l'Orateur, ils entendent Cicéron.

Quand ils difent le Poète, ils entendent Virgile.

Les Grecs entendoient parler de Démof thène, quand ils difoient l'Orateur, & d'Homère quand ils difoient le Poète.

Quand nos Théologiens difent le Docteur angélique, ou l'Ange de l'Ecole, ils veulent parler de S. Thomas. Scot eft apelé le Docteur fubtil, S. Auguftin le Docteur de la grace.

Ainfi on done par excèlence & par antonomafe, le nom de la fcience ou de l'art à ceux qui s'y font le plus diftingués.

Dans chaque royaume, quand on dit fimplement le Roi, on entend le Roi du pays où l'on eft; quand on dit la vile, on entend la capitale du royaume, de la province ou pays dans lequel on demeure.

du

Quò te, Mari, pedes? an quò via ducit in urbem? Urbem en cet endroit veut dire la vile de Mantoue: ces bergers parlent par raport au territoire où ils demeurent. Mais quand les anciens parloient par raport à l'Empire Ro

main, alors par urbem ils entendoient la vile de Rome.

de su ma

Dans les comédies grèques, ou tirées du grec, la vile [aftu] veut dire Athènes : An Tòäsu, in aftu venit? eft-il venu à la vile? Cornélius urbs, vile. Népos parlant de Thémistocle & d'Alcibia- neo. de, s'eft fervi plus d'une fois de ce mot en ce fens. **

Dans chaque famille, monfieur, veut dire le maitre de la maison.

Les adjectifs ou épitètes font des noms comuns que l'on peut apliquer aux diférens objets aufquels ils conviènent, l'antonomase en fait des noms particuliers l'invincible, le conquérant, le grand, le jufte, le fage, fe difent par antonomafe de certains Princes ou d'autres perfones particulières.

21. n. 8.

Tite-Live apèle fouvent Annibal le Car Tit. Liv. l thaginois le Carthaginois, dit-il, avoit un grand nombre d'homes: abundábat multitúdine bóminum Panus. Didon dit à sa foeur *** Dous mettrez fur le bucher les armes que le per

* Téren. Eun. act. v. fc. 6. selon Madame Dacier, & fc. 5.
▼. 17. felon les éditions vulgaires.

** Xerces prótinus accéffit aftu. Corn. Nep. Themist. 4.
Alcibiades poftquam aftu venit. idem Alcib. 6.
*** Arma viri, tálamo quæ fixa relíquit

Impius... fuper impónas. n. 1, iv. v. 495.

fide a laiffées, & par ce perfide elle entend Enée.

Le Deftructeur de Cartage & de Numance, figni fie par antonomase Scipion Emilien.

Il en eft de même des noms patronymiques dont j'ai parlé ailleurs, ce font des noms tirés du nom du pére ou d'un ayeul, & qu'on done aux defcendans; par exemple, quand En. 1. v. Virgile apèle Enée Anchisiades, ce nom est doné à Enée par antonomafe, il est tiré du nom de fon pére, qui s'apeloit Anchife. Diomède, héros célèbre dans l'antiquité fabuleuse, est souvent apelé Tydides, parce qu'il étoit fils de Tydée, Roi des Etoliens.

V. 407.

Nous avons un recueil ou abrégé des loix des anciens François, qui a pour titre, Lex Sálica:parmi ces loix il y a un article * qui exclut les femmes de la fucceffion aux terres faliques,c'est-à-dire, aux fiefs : c'eft une loi qu'on n'a observée inviolablement dans la fuite qu'à l'égard des femmes qu'on a toujours exclufes de la fucceffion à la courone. Cet ufage toujours obfervé est ce qu'on apèle aujourd'hui loi falique par antonomase, c'est-àdire, que nous donons à la loi particulière * De terrâ verò fálicâ, nulla pórtio hæreditátis mulíeri véniat, fed ad virílem fexum tota terræ hæréditas pervéniate Lex Sálica. art. 62. de Alode. §. 6.

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d'exclure les femmes de la courone, un nom que nos péres donèrent autrefois à un recueil général de loix.

11. La feconde espèce d'antonomase est lorsqu'on prend un nom propre pour un nom comun, ou pour un adjectif.

Sardanapale dernier Roi des Affyriens vivoit dans une extrème moleffe; du moins tel est le sentiment comun: delà on dit d'un voluptueux, c'eft un Sardanapale.

L'Empereur Néron fut un prince de mauvaises mœurs, & barbare jufqu'à faire mourir fa propre mére; delà on a dit des princes qui lui ont reffemblé, c'est un Néron.

Monach. fub fin.

Caton, au contraire, fut recomandable par l'austérité de fes moeurs: delà S. Jerome a dit Hier. 1. 2. d'un hipocrite, c'eft un Caton au dehors, & Ep.13.Ru un Néron au dedans, intus Nero, foris Cato. · Mécénas favori de l'Empereur Augufte, Lugd. P protégeoit les gens de lettres: on dit aujour- ris, edit. d'hui d'un seigneur qui leur acorde fa pro- 1718. p. tection, c'est un Mécénas.

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Mais fans un Mécénas à quoi fert un Augufte?
c'est-à-dire, fans un protecteur.
Irus étoit un pauvre de l'ile d'Itaque qui
étoit à la fuite des amans de Pénélope, il a
doné lieu au proverbe des anciens, plus pau-

227. & Pa

386.

Boileau, Sat. 1. v.86.

Homer. Odyff. l. 18.

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