Est-ce que vous voulez qu'un père ait la mollesse Il seroit beau, vraiment, qu'on le vît aujourd'hui Non, non c'est mon intime, et sa gloire est la mienne; Et force de son fils tous les attachements. ORONTE. C'est parler comme il faut, et, dans cette alliance, CHRYSALDE, à Arnolphe. Je suis surpris, pour moi, du grand empressement ARNOLPHE. Je sais ce que je fais, et dis ce qu'il faut dire. ORONTE. Oui, oui, seigneur Arnolphe, il est... CHRYSALDE. Ce nom l'aigrit; C'est monsieur de la Souche, on vous l'a déja dit. ARNOLPHE. Il n'importe. HORACE, à part. Qu'entends-je? ARNOLPHE, se retournant vers Horace. Oui, c'est là le mystère; Et vous pouvez juger ce que je devois faire. En quel trouble... HORACE, à part. SCÈNE VIII.-ENRIQUE. ORONTE, CHRYSALDE, HORACE, ARNOLPHE, GEORGETTE. GEORGETTE. Monsieur, si vous n'êtes auprès, Nous aurons de la peine à retenir Agnės; ARNOLPHE. Faites-la-moi venir; aussi bien de ce pas (à Horace.) Prétends-je l'emmener. Ne vous en fàchez pas; Quels maux peuvent, ô ciel, égaler mes ennuis! Pressez vite le jour de la cérémonie; J'y prends part, et déja moi-même je m'en prie. C'est bien là mon dessein. SCÈNE IX. ORONTE. AGNÈS, ORONTE, ENRIQUE, ARNOLPHE, HORACE, CHRYSALDE, ALAIN, GEORGETTE. ARNOLPHE, à Agues. Venez, belle, venez, Qu'on ne sauroit tenir, et qui vous mutinez. Adieu. L'événement trompe un peu vos souhaits; AGNES. Me laissez-vous, Horace, emmener de la sorte? HORACE. Je ne sais où j'en suis, tant ma douleur est forte. Allons, causeuse, allons. ARNOLPHE. AGNES. Je veux rester ici. ORONTE. Dites-nous ce que c'est que ce mystère-ci. Nous nous regardons tous, sans le pouvoir comprendre. ARNOLPHE. Avec plus de loisir je pourrai vous l'apprendre. Jusqu'au revoir. ORONTE. Où donc prétendez-vous aller? Vous ne nous parlez point comme il nous faut parler. ARNOLPHIE. Je vous ai conseillé, malgré tout son murmure, D'achever l'hyménée. ORONTE. Oui. Mais pour le conclure, CHRYSALDE. Je m'étonnois aussi de voir son procédé. Quoi! ARNOLPHE. CHRYSALDE. D'un hymen secret ma sœur eut une fille, Dont on cacha le sort à toute la famille. ORONTE. Et qui, sous de feints noms, pour ne rien découvrir, Par son époux, aux champs fut donnée à nourrir. CHRYSALDE. Et dans ce temps, le sort, lui déclarant la guerre, L'obligea de sortir de sa natale terre. ORONTE. Et d'aller essuyer mille périls divers, Dans ces lieux séparés de nous par tant de mers. CHRYSALDE. Où ses soins ont gagné ce que dans sa patrie ORONTE. Et, de retour en France, il a cherché d'abord Celle à qui de sa fille il confia le sort. CHRYSALDE. Et cette paysanne a dit avec franchise Qu'en vos mains à quatre ans elle l'avoit remise. ORONTE. Et qu'elle l'avoit fait sur votre charité CHRYSALDE. Et lui, plein de transport, et l'allégresse en l'ame, ORONTE. Et vous allez enfin la voir venir ici, Pour rendre aux yeux de tous ce mystère éclairci. Je devine à peu près quel est votre supplice; Ouf! ARNOLPHE, s'en allant tout transporté, et ne pouvant parler. SCÈNE X. ENRIQUE, ORONTE, CHRYSALDE, AGNÈS, HORACE. ORONTE. D'où vient qu'il s'enfuit sans rien dire? HORACE. Ah! mon père, Vous saurez pleinement ce surprenant mystère. Ce que votre sagesse avoit prémédité. J'étois, par les doux nœuds d'une amour mutuelle, Et c'est elle, en un mot, que vous venez chercher, ENRIQUE. Je n'en ai point douté d'abord que je l'ai vue, CHRYSALDE. J'en ferois de bon cœur, mon frère, autant que vous; Et rendre grace au ciel, qui fait tout pour le mieux. FIN DE L'ÉCOLE DES FEMMES. DE L'ÉCOLE DES FEMMES. COMÉDIE EN UN ACTE 1663. NOTICE. Cette pièce fut représentée, pour la première fois, sur le théâtre du Palais-Royal, le 1er juin 1663. «L'idée m'en vint, dit Molière, après les deux ou trois premières représentations de ma pièce (l'Ecole des Femmes). Je la dis, cette idée, dans une maison où je me trouvai un soir; et d'abord une personne de qualité, dont l'esprit est assez connu dans le monde, et qui me fait l'honneur de m'aimer, trouva le projet assez à son gré, nonseulement pour me solliciter d'y mettre la main, mais encore pour l'y mettre lui-même ; et je fus étonné que deux jours après il me montra toute l'affaire exécutée d'une manière à la vérité beaucoup plus galante et plus spirituelle que je ne puis faire, mais où je trouvai des choses trop avantageuses pour moi; et j'eus peur que, si je produisois cet ouvrage sur notre théâtre, on ne m'accusat d'abord d'avoir mendié les louanges qu'on m'y donnoit.» Cette personne de qualité qui offrait ainsi à Molière de prendre sa défense, était, suivant de Visé, l'abbé du Buisson, que Somaize appelle grand introducteur des belles ruelles. L'obligeant abbé proposait naïvement à Molière de travailler à son propre éloge; mais le poëte avait un sentiment trop élevé des choses littéraires, pour accepter cette proposition qui eût donné beau jeu à ses adversaires. Cependant, comme les rumeurs des coteries devenaient de jour en jour plus menaçantes, il sentit qu'il fallait prendre l'offensive avec l'arme toujours redoutable du ridicule, et pour se défendre en attaquant, il donna la Cri Préface de l'École des Femmes. |