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lui donna un peloton de fil, et lui enseigna comment avec çe secours il pourroit se tirer aisément de tous les détours du labyrinthe; qu'il tua le minotaure ; qu'il enleva Ariane, et qu'il la conduisit à Athènes avec les jeunes enfans qu'il avoit amenés: Phérécyde ajoute qu'il détruisit les vaisseaux qui étoient dans le port, et les mit hors d'état de le poursuivre ; et Damon prétend que le général Taurus fut tué sur ces vaisseaux, en combattant pour empêcher Thésée de s'embarquer.

Après avoir échappé aux dangers qui l'attendoient en Crète, Thésée s'arrêta à Délos, où il fit un sacrifice à Apollon.

Quand ils approchèrent de l'Attique, Thésée et son pilote, dans les transports de leur joie, oublièrent de mettre la voile blanche, qui devoit avertir Egée de leur retour. Egée ne voyant que la voile noire, se précipita du rocher où il étoit, et se tua. Cependant Thésée entra dans le port de Phalère. D'abord il se mit en devoir de s'acquitter des sacrifices qu'il avoit promis avant son départ; mais auparavant il envoya à la ville un héraut pour apprendre à son père son arrivée. Ce héraut ayant appris la mort du roi, retourna à Phalère avant que Thésée eût achevé son sacrifice, et s'arrêta à la porte du temple, pour ne pas troubler la cérémonie. Quand elle fut finie, il annonça à Thésée la mort de son père. Théséé et ceux qui étoient avec lui, entrèrent sur le champ dans la ville en remplissant l'air de leurs gémissemens. Après avoir fait les funérailles de son père, Thésée offrit des sacrifices à Apollon, et institua des jeux pour célébrer l'heureuse époque de son retour.

Après ces établissemens, Thésée conçut et exécuta un

très-grand projet, il réduisit en un seul corps de ville tous les habitans de l'Attique, qui étoient dispersés dans des bourgs, et par conséquent très-difficiles à assembler, quand il falloit les réunir. Il fit abattre dans tous les bourgs, les palais et les salles destinés à tenir le conseil, cassa tous les officiers et les magistrats, fit bâtir un palais commun dans le lieu où il est encore aujourd'hui, appela la vieille et la nouvelle ville, Athènes, et unit tout le peuple par un sacrifice commun, qu'il appela par cette raison les Panathénées. Il déposa ensuite l'autorité royale, et ne s'occupa qu'à policer la république.

Pour peupler et augmenter sa ville, Thésée appela les étrangers, et leur accorda tous les droits et les priviléges dont les citoyens jouissoient. Il joignit à l'Attique le territoire de Mégare, et à l'imitation d'Hercule, il fut le premier qui établit des jeux.

Il entreprit ensuite le voyage du Pont-Euxin: Philochorus et autres, écrivent que ce fut pour imiter Hercule dans son expédition contre les Amazones, et qu'il obtint Antiope pour prix de sa valeur; mais la plupart, et surtout Phérécyde, Hellanicus et Hérodote, assurent que Thésée fit ce voyage seul, long-temps après Hercule, et qu'il fit cette reine prisonnière; ce qui est beaucoup plus vraisemblable, et ce qui donna lieu à la guerre des Amazones, dont les suites furent si terribles, puisqu'elles eurent l'audace d'attaquer les Athéniens jusques dans leurs murailles.

Le poëte de la Théséïde dit, que les Amazones entreprirent cette guerre pour venger l'affront que Thésée avoit fait à Antiope, en la quittant pour épouser Phèdre, et qu'Hercule les mit à mort; mais c'est évidemment une

fable. Il est certain que Thésée n'épousa Phèdre qu'après la mort d'Antíope, dont il avoit eu un fils nommé Hippolyte, ou, selon Pindare, Démophoon. Quant aux malheurs que Phèdre et son fils Hippolyte lui firent éprouver, on ne peut les révoquer en doute, puisque les poëtes tragiques qui les racontent sont d'accord avec les historiens.

On parle encore de beaucoup d'autres mariages de Thésée. Hellanicus rapporte qu'à cinquante ans il ravit Hélène, qui étoit encore trop jeune pour être mariée : cette disproportion d'âge a fourni à quelques auteurs un prétexte pour justifier Thésée de ce crime, en disant que ce ne fut pas lui qui l'enleva, mais qu'Ida et Lyncée, ses ravisseurs, la mirent en dépôt entre ses mains, et qu'il la garda sans vouloir la rendre à ses frères Castor et Pollux. Mais voici ce qu'il y a de plus vraisemblable: Thésée et Pirithoüs allèrent ensemble à Sparte, et enlevèrent Hélène, qui dansoit à une fête dans le temple de Diane surnommée Orthia. Ceux qu'on envoya à leur poursuite, se contentèrent d'aller à Tégée. Ces ravisseurs se voyant en sûreté, après avoir traversé le Péloponèse, tirèment au sort, et convinrent que celui qui auroit cette princesse, aiḍeroit son compagnon à en enlever une autre. Le sort favorisa Thésée, qui, en attendant qu'Hélène fût en âge, la mena à Aphidnes, où il fit venir Æthra, sa mère, afin qu'elle en eût soin, la confia au maître de cette place, qui étoit son ami; et après lui avoir recommandé le secret, il ne songea qu'à accomplir l'engagement qu'il avoit pris avec Pirithous. Ils allèrent donc tous deux en Epire pour enlever la fille d'Aidoneus, roi des Molosses, qui avoit donné à sa femme le nom de

Proserpine, et à sa fille celui de Coré. Ce prince avoit un chien appelé Cerbère; tous les amans de sa fille étoient condamnés à le combattre, et sa main n'étoit destinée qu'à ceux qui l'auroient vaincu.

Thésée et Pirithous ne furent pas plutôt arrivés en Epire, qu'Aidoneus averti qu'ils étoient venus à dessein, non de demander ouvertement sa fille, mais de l'enlever, les fit arrêter sur l'heure même, livra Pirithous à Cerbère qui le déchira, et garda Thésée prisonnier.

Pendant l'absence de Thésée, Mnesthée, fils de Pétéus, et petit - fils d'Ornée, fils d'Erechthée, flatta le peuple et parvint à gagner ses bonnes grâces. Par cet artifice, il excita contre Thésée les plus puissans d'entre les nobles, qui ne le supportoient déjà qu'avec beaucoup de peine. D'un autre côté il anima le peuple, en lui persuadant que sous les apparences d'une liberté fausse et chimérique, ils étoient réellement privés de leur patrie, de leurs fêtes et de leurs sacrifices, qu'ils n'avoient plus le bonheur d'être gouvernés par leurs rois légitimes, qu'ils étoient soumis à un étranger et à un inconnu. Mais ce qui favorisa le plus ses projets, ce fut la guerre des Tyndarides, qui, dans ce même temps-là, entrèrent en armes dans l'Attique. Il y a des auteurs qui prétendent que Mnesthée les y avoit attirés,

D'abord ils ne commirent aucune hostilité; ils demandèrent seulement qu'on leur rendît. Hélène. Les Athéniens répondirent qu'ils ne savoient pas où elle étoit. Les Tyndarides prenant cette réponse pour un refus, ne songeoient plus qu'à se venger, et alloient commencer la guerre, lorsqu'Académus, qui avoit appris le lieu où on l'avoit cachée, leur découvrit qu'elle étoit à Aphidnes.

En récompense, Castor et Pollux lui rendirent les plus grands honneurs pendant sa vie ; et les Lacédémoniens, après sa mort, ayant souvent ravagé l'Attique, épargnèrent le parc de l'académie en sa considération. Castor et Pollux allèrent attaquer Aphidnes, la prirent d'assaut et la rasèrent.

La prise de cette place jeta la consternation parmi les 'Athéniens. Castor et Pollux s'étant rendus maîtres dans Athènes, ne demandèrent qu'à être initiés, alléguant pour raison qu'ils étoient parens des Athéniens au même degré qu'Hercule. Ils furent donc admis aux grands mystères, après avoir été adoptés auparavant par Aphidnes, comme Hercule l'avoit été par Pylius. On leur rendit des honneurs divins, et on les appela Anaces.

Le roi Aidoneus ayant reçu chez lui Hercule, on parla par hasard de Thésée et de Pirithous. Aidoneus raconta à Hercule le dessein qu'ils avoient eu, et la vengeance qu'il en avoit tirée. Hercule fut affligé d'apprendre que l'un étoit déjà mort, et que l'autre étoit tous les jours en danger de périr; mais voyant qu'il étoit inutile de se plaindre du malheur de Pirithoüs,'il ne pensa qu'à sauver Thésée, et il demanda sa liberté comme une faveur à laquelle il seroit extrêmement sensible : Aidoneus la lui accorda. Thésée étant sorti de sa prison, s'empressa de se rendre à Athènes, où son parti n'étoit pas encore entièrement écrasé. Ses premiers soins furent de témoigner sa reconnoissance à son libérateur; il consacra à Hercule tous les parcs et toutes les terres dont les Athéniens lui avaient fait présent; et au lieu de Theseia, il les appela Heraclia, d'Hercule, excepté quatre qu'il se réserva, comme le rapporte Philochorus,

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