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COMPARAISON

DE SOLON ET DE PUBLICOLA.

PUBLICOLA, plus grand et plus heureux que Solon

par sa conduite et par ses actions guerrières, est inférieur à ce dernier, comme législateur.

La haine des tyrans fut plus forte dans Publicola que dans Solon; car celui-ci voulut qu'on ne condamnât à la mort ceux qui étoient accusés d'aspirer à la tyrannie, qu'après leur entière conviction; et Publicola permit de les tuer avant que de les mettre en justice. Solon se glorifioit avec raison d'avoir refusé la monarchie, lorsque les affaires l'y appeloient, et que les citoyens étoient disposés à le recevoir pour maître ; mais il n'est pas moins glorieux à Publicola d'avoir rendu douce et populaire la puissance tyrannique du consulat, et de ne s'être pas servi de toute l'autorité qu'il avoit. Aussi Solon avoit-il bien connu, avant Publicola, que c'étoit la meilleure manière de gouverner un Etat: car, "jamais, disoit-il, le peu>> ple n'est plus obéissant et plus souple, que lorsqu'on >> ne lui donne ni trop ni trop peu de liberté.

Mais une chose particulière à Solon, c'est l'abolition des dettes, qui fut le moyen le plus efficace pour assurer la liberté de ses concitoyens.

En considérant l'ensemble du gouvernement de ces deux grands hommes, on trouve les commencemens de

COMP. DE SOL. ET DE PUBLICOLA.

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Solon plus éclatans et plus illustres; mais la fin de Publicola paroît plus heureuse et plus digne d'envie.

Quant à leurs exploits de guerre, il y a entr'eux une grande différence; car Deimachus de Platée n'attribue pas même à Solon l'entreprise contre les Mégariens, au lieu Publicola gagna plusieurs grandes batailles, où il ne remplit pas seulement les devoirs de général, mais ceux de soldat.

que

Si l'on examine leur conduite dans les affaires civiles, on trouvera que Solon n'osa conseiller aux Athéniens d'aller reprendre Salamine, et que Publicola s'exposa sans balancer à un danger encore plus évident, dans une occasion plus importante. Il s'éleva contre Tarquin découvrit les intelligences qu'il avoit à Rome, empêcha seul les complices d'échapper, et les ayant fait punir comme ils méritoient, il ne chassa pas seulement les rois, mais il acheva de ruiner toutes leurs espérances,

THÉMISTOCLE.

La naissance de Thémistocle étoit obscure; il étoit fils de Néoclès, un des moins considérables des citoyens d'Athènes, et l'on prétend que du côté de sa mère il étoit étranger.

Thémistocle, dès son enfance, étoit entreprenant et hardi, il avoit un sens droit, et il étoit naturellement porté aux grandes choses et à la politique ; on le voyoit rarement perdre son temps à jouer ou à ne rien faire, comme les autres enfans, mais on le trouvoit toujours méditant et composant quelques discours graves pour accuser ou pour défendre quelqu'un de ses camarades ; aussi son maître d'école lui disoit souvent : « Mon fils, › tu ne seras jamais un homme vulgaire ; tu deviendras » nécessairement ou un grand bien ou un grand mal. » En effet, toutes les sciences, qu'on ne cherche que pour quelque plaisir honnête, ou pour l'agrément, il les il les apprenoit avec lenteur, et sans faire paroître qu'il eût quelqu'attrait pour elles, mais si l'on disoit quelque chose qui pût nourrir et augmenter la prudence, et rendre propre au maniement des affaires d'Etat, il l'écoutoit avec une attention et avec une application au-dessus de son âge. On cite une réponse remarquable qu'il fit dans une assemblée à des personnes qui le railloient : « Je ne sais dit-il, »ni accorder la lyre, ni toucher le psaltérion ; mais qu'on » me donne une ville, quelque petite et quelque inconnue

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