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et le tiers des amendes prononcées par les échevins desdits lieux (1).

La création d'un Échevinage à Halluin marque le troisième état de la Prévôté; elle n'apportait d'ailleurs d'autre changement que la substitution d'échevins choisis et nommés par le comte aux hommes cotiers ou rentiers qui, étant juges-nés, pouvaient n'avoir pas toujours les aptitudes nécessaires à des juges.

Enfin, une dernière et importante modification, apportée à la constitution de la Prévôté d'Halluin, fit au titulaire de cette Prévôté une situation analogue à celle du châtelain de Lille. A la tête de l'Échevinage, le comte établit un bailli substitué au prévôt dont l'office fut ainsi annihilé. De même que la Mairie, la Prévôté d'Halluin ne fut plus désormais qu'un fief auquel restèrent attachés, comme au fief du châtelain de Lille, certains droits utiles et certaines prérogatives dont le comte, en revendiquant son droit de justice, qui était un droit imprescriptible de sa souveraineté, ne put, ni ne voulut sans doute, dépouiller le possesseur.

Quand ce fait s'est-il produit? Probablement à la fin du XIIIe siècle. En 1290, Wautier [er d'Halluin est encore prévôt Watiers prouvos de Halewin (2). Au mois d'août 1297, il se qualifie seigneur: Sigillum domini Wateri de Halonin. (3) Ce n'est plus le prévôt, c'est le seigneur de la Prévôté d'Halluin.

Mais la Prévôté, c'était en fait la Seigneurie d'Halluin ; elle emportait, comme on disait alors, la hauteur du clocher. De bonne heure les prévôts s'étaient considérés comme les seigneurs de la paroisse et s'en étaient arrogé

(1) Mes Chatelains de Lille, chapitre 3.

(2) Preuves, no 19.

(3) Douët d'Arcq, Collection de Sceaux, No 2852.

les prérogatives; puis était venue la possession immémoriale; à défaut de concession souveraine, qui, après tout, peut avoir existé, mais dont on ne trouve pas de trace, il y eut au moins reconnaissance tacite ; on ne les mentionne plus dans l'histoire du pays que comme seigneurs d'Halluin, titre qui ne leur fut pas contesté que je sache et qu'on finit même par leur donner dans les actes publics. A vrai dire, le temps était arrivé pour cette transformation; les fonctions de prévôt étant devenues trop inférieures au rang social des nobles sires d'Halluin..

Le domaine du comte n'a pas changé pour cela de nature ni de maître; il existe parallèlement à la Seigneurie avec la dénomination d'Échevinage, sa juridiction propre et son ancien ressort Halluin comme siège ayant pour dépendances les terres qui doivent rentes au comte et qui sont disséminées entre les quatre ponts d'Halluin, de Quesnoy, de Marcq et de Grimonpont. C'est à peu près dans ces limites que se renferment au XVIe siècle les « Rapports des terres et héritages devant rentes au roi (d'Espagne, comte de Flandre), à cause de son Échevinage d'Halluin et s'étendant ès paroisses d'Halluin, Roncq, Bousbecque, Neuville-en-Ferrain, Frelinghien, Bondues et Linselles, Tourcoing et Comines (1).

A cet Échevinage reste étrangère la Seigneurie ou plus précisément la Prévôté d'Halluin, laquelle va être décrite à l'aide des rapports et dénombrements où tout rappelle l'ancien office du prévôt en ses différents états et la situation du titulaire après qu'on lui eut substitué un bailli comme chef de l'Échevinage.

(1) État général des Registres de la Chambre des Comptes, à Lille, relatifs à la Flandre, par l'abbé C. Dehaisnes, archiviste du Nord, No 31.

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par

Le plus ancien rapport et dénombrement de la Prévôté d'Halluin est du 6 novembre 1389 et a été servi Wautier III, qui se qualifie sire d'Halluin et de Watervliet. A ce fief de la Prévôté furent unis, en 1430, une pêcherie achetée au duc Philippe-le-Bon par Jean Ier, seigneur d'Halluin et de Piennes, chevalier, père de Wautier IV, laquelle pêcherie s'étendait en la rivière de la Lys depuis la place nommée le Becque, près de Wervicq, jusqu'au Large-Quesne, entre les paroisses d'Oyghem et de Wielsbeke, c'est-à-dire sur plus de cinq lieues; et trois honniers de prés tenant aux prés de la cour féodale d'Halluin et aux prés de la carité des pauvres dudit lieu. Déjà avaient été réincorporés à la même Prévôté deux fiefs qui en relevaient et qui appartenaient jadis, l'un à messire Robert d'Aisne, chevalier, l'autre à Jean, dit de Calonne, bâtard de Halewin.

Outre la Prévôté, les seigneurs d'Halluin possédaient le fief de la Mairie, qui, soit par suite d'alliance, soit par acquisition, était passé depuis longtemps dans leurs mains. Ils possédaient encore le fief de le Becque audit lieu. Ces trois fiefs furent réunis en un seul, par lettres patentes du 28 avril 1431, pour être tenu de la salle de Lille à 10 livres de relief et à justice vicomtière. Ainsi composée et arrondie, la Seigneurie d'Halluin, puisque seigneurs d'Halluin il y a, devenait un fief très important. En 1614, son revenu de 25 années réunies, supputé pour le paiement du dixième denier de sa valeur, par suite de la donation que la comtesse de Furstemberghe en avait faite au prince de Chimay, atteignait 82,316 livres 10 sous 5 deniers tournois de 40

gros à la livre, soit 162,601 francs 52 centimes, ou 6,504 francs 06 centimes par an; ce qui, au pouvoir actuel de l'argent, représente un revenu annuel de plus de 20,000 francs.

Suivant le rapport et dénombrement du 3 juin 1620, la terre d'Halluin comprenait : un manoir sur motte entourée d'eau, avec 60 bonniers d'héritages en prés, bois et terres ahanables à Halluin: 36 bonniers de prés et bois en ladite paroisse, tous sur la Lys; une autre motte avec un bonnier de pré tenant aux précédents, mais séant en la paroisse de Menin; — une dîme; la pêcherie de la Lys avec les 3 bonniers mentionnés plus haut; ensemble 100 bonniers - des rentes sur 140 bonniers d'héritages gisant à Halluin, Menin, Roncq, Tourcoing, Bondues, Frelinghien et ès paroisses d'environ, savoir: 291 rasières 3 havots 3 quarreaux et un quart d'avoine molle, 88 rasières 3 havots 3 quarreaux et demi de seigle dont moitié pour semence, 41 livres 5 sous 3 deniers maille et un tournois en argent, 84 chapons et les deux parts d'un chapon, 50 corvées à 3 gros l'une.

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La Seigneurie comprenait encore des droits divers ciaprès énumérés et 29 hommages parmi lesquels: Le Mont, le Tilleul, les Tucquelins, Laval et la Vollerie, à Halluin; les Masures à Bousbecque, que je décrirai plus loin.

Au seigneur d'Halluin appartenait le droit exclusif de chasser la perdrix entre les quatre ponts d'Halluin, de Marcq, de Quesnoy et de Grimonpont, à la réserve pourtant que le comte de Flandre et le châtelain de Lille pouvaient y chasser la perdrix à un épervier et à deux blancs épagneuls et non autrement; mais, en retour, le seigneur d'Halluin pouvait chasser à deux blancs levriers dans toutes les garennes que le châtelain de Lille possédait dans la châtellenie.

(1) Dossier aux Archives du Nord, N° 73 de l'État général.

Le seigneur d'Halluin percevait un droit de 2 sous sur chaque plainte à loi que le bailli du comte introduisait à Halluin; - 4 deniers d'issue et 4 deniers d'entrée sur toutes les ventes faites audit Halluin; - 2 sous de chaque mesure que l'on portait en justice pour faire preuve devant les échevins du comte; - tous les droits de géôlage dus par les prisonniers arrêtés entre les quatre ponts et conduits aux prisons d'Halluin; mais, en retour de ces droits, le seigneur devait garder les prisonniers durant trois jours et trois nuits après lesquels les hôtes, tenants et rentiers du fief devaient les mener, à leurs risques et périls, dans les prisons du comte, et pour cela ils avaient le droit de porter leurs armures défensives dans l'étendue du bailliage de Lille, et recevaient du seigneur 2 sous pour chaque voyage.

Quand quelque camp de bataille ou duel judiciaire était adjugé entre parties par le comte en la châtellenie de Lille, le seigneur d'Halluin, à cause de son fief, était l'un des gardes du champ clos (1).

Au seigneur d'Halluin appartenaient aussi les amendes prononcées au fief des Quesnes à Marcq par les échevins que le châtelain de Lille y commettait; - 4 deniers d'issue et 4 deniers d'entrée à la vente des héritages tenus dudit fief des Quesnes; 3 sous de chaque plainte à loi, et pour ce il était tenu de faire les sceultes (2), saisines et relations avec les échevins dudit lieu. Dans un temps où tout était inféodé, la charge de poursuivre judiciairement la rentrée des rentes, des amendes, des forfaitures et de tous autres droits en la terre des Quesnes, comme en celles de Wartembecque, à Comines, du Gavre, à Halluin, et du Mortier,

(1) L'autre garde du camp était le pair de Gamans et c'était le roi des Timaux qui conduisait l'appelant et portait les armes des deux combattants sur lesquels, dès qu'ils étaient entrés en lice, le châtelain de Lille avait toute juridiction (voir mes Chatelains de Lille, chap. IV).

(2) Ou sieulles, suites, poursuites.

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