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Au moment où commence cette histoire (1780), l'entrée des faïences anglaises, depuis longtemps célèbres, était interdite en France; l'habileté des artistes et ouvriers anglais, l'économie dans la fabrication résultant du bon marché de la main-d'oeuvre et du charbon, étaient telles que toute concurrence était devenue impossible. Sous l'apparence de droits purement protecteurs de l'industrie nationale, on avait en réalité élevé aux produits anglais une barrière infranchissable.

Quel était le véritable état de cette industrie, si redoutée du commerce français? Quels étaient ses inventeurs? A qui devait-on le haut degré de prospérité auquel elle avait été conduite? Nous répondrons brièvement à ces questions,

et uniquement afin de faire comprendre tout l'intérêt que le gouvernement du roi Louis XVI pouvait attacher à l'introduction et au développement en France, de la fabrication des faïences dites Grès anglais.

Nous empruntons à l'excellent ouvrage de M. Édouard Garnier, Histoire de la Céramique, poteries, faïences et porcelaines chez tous les peuples (1882), une définition exacte et complète de ces productions.

«La faïence stannifère, dit-il, c'est-à-dire recouverte » d'un métal blanc à base d'étain, est faite d'une argile >> colorée masquée par l'opacité de la couverte; elle est, >> par conséquent, lourde, forcément un peu épaisse et assez » tendre. La faïence fine, au contraire, ou faïence anglaise, >> est caractérisée par sa pâte composée d'argile blanche à >> texture fine, bien cuite et recouverte d'un vernis cristallin, c'est-à-dire fondu préalablement en verre, plombifère, incolore et qui laisse apercevoir la couleur de la » terre. La première fournit des produits plus gras et se prètant admirablement à une décoration artistique; la >> seconde donne des reliefs plus précis, plus fins, parfois » mème un peu secs, mais convenant mieux au façonnage » des pièces appelées à servir aux usages journaliers.

>>> La composition de la pâte et de la couverte de la >> faïence fine varie beaucoup; quelquefois elle ne contient » que de l'argile blanche plastique et du silex broyé (d'où » le nom de cailloutage qui lui est également donné), et, » dans ce cas, sa glaçure est simplement à base de silice. >> et de plomb; d'autre fois elle se compose d'argile » mélangée de kaolin et de silex et alors sa couverte est » à base feldspathique.

» C'est à Burslem, en Staffordshire, que la pâte de la >> faïence fine reçut, vers la première moitié du XVIIIe » siècle, la qualité remarquable qu'elle tire de l'introduc» tion du silex dans sa composition, et cette découverte » fut due à une circonstance assez singulière. Le fils » d'Asbury, le potier qui avait contrefait l'idiot pour sur

>> prendre les secrets des frères Elers, allant un jour à » Londres, fut forcé de s'arrêter à Dunstable pour faire

soigner une ophtalmie dont son cheval venait d'ètre >> atteint. Le maître de l'auberge où il était descendu lui >> conseilla d'employer, pour le guérir, du silex calciné. » Asbury ayant remarqué que le silex, noir avant la calci» nation, avait pris une belle couleur blanche, pensa qu'il pouvait blanchir la pâte de sa poterie en y introduisant » cette matière, et, de retour chez lui, essaya ce procédé >> dont il obtint les résultats satisfaisants qu'il avait >> prévus.

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» Ce fut le point de départ des perfectionnements ap>> portés plus tard dans la fabrication de ces sortes de po>>teries, qui, suivant la nature de leur pâte, leur degré de >> cuisson et la composition de leur couverte, sont, ou de » véritables faïences fines (earthen-ware), ou des grès » cérames (stone-ware), ou mème de vraies porcelaines ar>>tificielles.

» Cette nouvelle faïence pouvait recevoir tous les genres » de décoration; elle se prêtait, ainsi que nous l'avons dit, >> aux reliefs les plus fins et les plus délicats, et même aux » découpures les plus légères et à l'application des cou>> leurs et des émaux les plus brillants.

>> Des fabriques furent fondées en grand nombre, non >> seulement dans le Staffordshire, mais encore dans toute » l'Angleterre, à Burslem, à Hanley, à Newport, à Leeds, » à Liverpool, à Fulham, à Lambeth, etc., etc. (1) »

En 1760, les frères Green établirent à Leeds, comté de Suffolk, une fabrique de faïences fines, de couleur un peu jaunâtre (cream colour), enrichies de reliefs ou découpées à jour. Ces faïences étaient expédiées dans toute l'Europe, même en Russie.

(1) Extrait de l'« Histoire de la céramique, poteries, faïences et porcelaines chez tous les peuples, depuis les temps anciens jusqu'à nos jours », par Édouard Garnier, pages 518, 519, 520. Édition de 1882.

Wedgwood, né à Burslem en 1730, porta encore plus loin l'art de la céramique. Associé d'abord avec Harrison, et ensuite avec Wheildon, le potier le plus habile de l'époque, il les quitta bientôt pour travailler seul. Il fonda à Burslem successivement trois établissements, dans le dernier desquels il créa cette belle poterie couleur de crème, à laquelle il dût ses succès, et qui, avec l'autorisation de la reine Charlotte, femme de Georges III, reçut le nom de la Poterie de la Reine (Queen's ware). Associé avec Bentley, il se mit à reproduire, en grès de diverses couleurs, des camées antiques, des basaltes, des jaspes, etc. Il reproduisit même le fameux vase Barberini, propriété de la duchesse de Portland.

Les produits de cette manufacture étaient des plus variés Bustes, statues, en composition noire imitant le bronze antique; Théières dans le style étrusque; Pots à fleur, vases imitant l'agale, le porphyre; Médaillons en biscuit, avec portraits se détachant sur un fond bleu, etc., etc.

Wedgwood mourut le 3 janvier 1795, âgé de soixantequatre ans. Il laissa une fortune considérable, dont il avait fait pendant sa vie le plus noble usage. En 1771, il avait fondé une petite ville, à laquelle il avait donné le nom d'Etruria, et qui était tout entière occupée par ses établissements et ses ouvriers.

Ses produits étaient marqués d'un cachet imprimé en creux, et portant le nom de Wedgwood ou la raison sociale Wedgwood el Bentley (1).

Ces détails préliminaires, une fois connus, nous allons assister à l'introduction, en France, de cette belle et grande industrie.

(1) Une partie de ces détails sont tirés de l'ouvrage de M. Édouard Garnier, cité plus

haut.

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