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oreille exercée distinguera très-facilement la différence de longueur qu'il y a entre le son i de j'irai et celui de t dans źle; il en sera ainsi du son simple u, dans le mot futur, et du son ú composé dans le mot fumes. J'ai choisi ces deux lettres, parce que leurs sons simples et composés ne se distinguent que par le plus ou le moins de temps qu'on met à les prononcer. Les sons composés, á et ô, ne peuvent se confondre avec leurs sons simples a et o, car, outre qu'ils sont plus longs, ils ont encore une sonorité plus pleine. Le son é est celui qui éprouve le plus grand changement en passant du simple au composé; car, de son fermé, il devient ouvert : dans cette nouvelle transformation, il est encore plus ou moins ouvert, comme dans procès et tétes.

Le son représenté par la lettre e, quoique formé des sons e et u, ne peut être rangé parmi les sons composés et longs. li n'est considéré que comme une demivoyelle c'est la valeur qu'on lui donne dans la poésie. Les vers se composent de rimes masculines et de rimes féminines. Les féminines ont un demi-son de plus que les masculines: ce demi-son est toujours représenté par le son eu, qui ne change jamais, quoique écrit de différentes manières.

La réunion des deux voyelles o et u forme aussi le son ou, qui résonne dans toute la bouche. Il faut le classer parmi les sons composés.

Les sons composés par les voyelles a, i, o, u, et la consonnen, peuvent être appelés voyelles pleines et nasales, à cause du résonnement qu'elles font dans le nez. Ces sons peuvent être aussi considérés comme des voyelles aspirées, car, pour les bien former, il est nécessaire de faire rentrer le son dans la bouche, où il séjourne un instant. Ils sont, sans contredit, les plus difficiles à exécuter; puisqu'on est obligé de faire un double travail, de

les pousser et de les retenir tout à la fois. En effet, pour former le son, an,

AN

on ouvre la bouché comme pour faire la lettre a, ensuite on retire un peu le menton en arrière; ce mouvement porte le son au palais, et lui donne la sonorité qui lui convient. Mais ce n'est pas tout que de former le son, il faut ensuite le chasser de la bouche. Pour réussir entièrement, il faut avoir la précaution de ne la fermer que lorsque le son est bien terminé si vous fermiez la bouche trop tôt, le son, ne pouvant pas sortir par sa route naturelle, s'en fraierait une nouvelle et s'échapperait par le nez, ce qui n'est pas sans inconvénient; en passant par cet organe, il se dénaturerait entièrement. Sans doute le nez fonctionne dans la formation de la voix; mais sa capacité ne lui permet de laisser passer que peu de son; si vous fermiez trop tôt la bouche, il y aurait encombrement, et, par conséquent, on entendrait, au lieu d'un son plein et sonore, un son maigre et sourd, désagréable à l'oreille.

Il en est ainsi des sons in, on et un; seulement pour in les lèvres se retireront un peu, pour on elles s'arrondiront, et pour un elles s'avanceront.

DES DIPHTONGUES.

On appelle Diphtongue toute syllabe composée de deux sons. Elles sont auriculaires ou oculaires. Il y en a quelques-unes qui sont l'une et l'autre. ;

Diphtongues auriculaires.

Les diphtongues auriculaires sont celles qui font entendre deux sons en une seule émission de voix. Ces deux sons n'ont jamais la même valeur. Ainsi, il n'y a point de diphtongue dans les mots client, pria, parce qu'en les prononçant on fait entendre deux sons bien distincts. Pour qu'il y ait diphtongue auriculaire, il faut que le premier son soit prononcé avec vitesse et serve, pour ainsi dire, d'introduction au second. Une diphtongue auriculaire est donc toujours composée d'un son faible et d'un son fort. Les sons faibles sont représentés par les voyelles i, u, ou. Il n'y a que ces trois voyelles qui se fassent légèrement entendre dans les diphtongues auriculaires. Dans ce cas, on peut les considérer comme des voyelles faibles et peu sonores.

mot deux sons de

Lorsqu'il se rencontre dans un suite, dont le premier est un a ou un o, qui sont des voyelles fortes, et le second un i, un a ou un ou, on est obligé, pour faire de ces sons réunis une diphtongue auriculaire, de transformer la voyelle forte en une des faibles, et la voyelle faible en une des fortes. Ainsi, dans les mots foi, loi, etc., on change l'o en ou et l'i en è, et l'on prononce comme si l'on écrivait fou-è, lou-è. Il est à remarquer que la voix passe sur le premier de ces deux sons avec la même vitesse que sur une articulation, et qu'elle ne peut faire de tenue que sur le second son. M. Duclos (1) dit, à ce sujet, qu'on pourrait appeler le premier transitoire et le second reposeur.

C'est vraisemblablement cette rapidité avec laquelle on émet ce premier son, qui a fait croire à certaines personnes que les petites voyelles i, u, ou, devenaient

(1) Remarques sur la Grammaire générale et raisonnée.

de véritables consonnes dans ces occasions, comme si le plus ou le moins de temps qu'on met à former un son pouvait en changer la nature. D'ailleurs, si ce système était adopté, nous n'aurions plus de diphtongues auriculaires, puisqu'elles commencent toutes par l'une de ces prétendues consonnes.

Nous avons dix-huit diphtongues auriculaires: dix commencent par i, trois par a et cinq par ou. En voici le tableau :

ia, ian, iè, ien, ie, rez, io, ion, ieu, iou.
ue, uin, ui,

oua, ouan, oué, ouen, oui.

Diphtongues, tantôt auriculaires et tantôt oculaires ou voyelles composées.

Nous avons six diphtongues qui rendent tantôt un son double et tantôt un son simple, savoir: ua, uan, ue, uin, ui, oi.

Dans le premier cas elles sont diphtongues auriculaires, dans le second voyelles composées.

La première a le son double oua dans équateur, aquatique, et le son simple a dans qualité, qua

rante.

La seconde représente le son double ouan dans quantum, et le son an dans quantité, quantième.

La troisième rend deux sons dans écuelle, et un son unique dans querelle.

La quatrième fait pareillement entendre deux sons dans Quintilien, quinquagésime, et un seul dans guinder, Tarquin.

La cinquième exprime deux sons dans aiguille, aiguiser, Guise (nom propre), et un son simple dans anguille, déguiser, guise.

Et la dernière, la plus remarquable par la diversité

et l'étendue de ses services, est diphtongue auriculaire dans bois, loi, poison, moisi, et elle n'est que diphtongue oculaire dans poignard, poignet, moitié, poitrine, poitrail.

Diphtongues oculaires ou voyelles composées.

Plusieurs grammairiens ont cru voir des diphtongues oculaires partout où ils ont trouvé plusieurs voyelles réunies. C'est une erreur. Il n'y a de vraies diphtongues oculaires que celles auxquelles on a attaché un son qui n'est celui d'aucune des vovelles qui forment la syllabe. Par exemple, ai est une véritable diphtongue oculaire, parce que le son qu'elle représente n'a aucun rapport avec les voyelles qui la forment. En effet, loin d'avoir le son de l'a ou le son de l'i, elle a souvent celui de l'é fermé, comme dans j'irai, j'ai, et, dans aider, j'aime, elle a celui de l'è ouvert.

Quoiqu'il y ait deux voyelles réunies dans les mots SAône, tAon, LAon (nom de saint), fAon, p▲on, LAon (nom de ville), que l'on prononce Sône, tôn, Lôn, fán pán, Lân', on ne doit pas conclure pour cela que ces mots renferment des diphtongues; car, l'a, dans les trois premiers mots, et l'o, dans les trois derniers, ne servent, l'un, qu'à donner plus de valeur à l'o qui suit, et l'autre, à l'a qui précède. Il en est ainsi de l'e dans les deux noms propres de Jean et CaEn.

Il n'y a pas non plus de diphtongue dans les mots mangea, plongeon, gageure. L'e n'est là que pour adoucir le g.

Il en est ainsi de l'i dans les mots bail, soleil, muraille, abeille, que l'on n'a introduit que pour indiquer qu'il faut moniller la consonne simple ou redoublée qui est à sa suite.

On n'en doit pas même reconnaître dans les mots re

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