et le 24 ou le 28 nous nous mettrons en route pour Turin. M. de Salinis sait sans doute comment il faudra nous adresser nos lettres en Italie. Je ne te donne aucuns détails sur ce que j'ai vu et appris. Ce sera pour mon retour dont j'attends l'époque avec assez d'impatience. Cependant je suis fort loin de regretter mon voyage. Il aura été plus utile que je ne l'espérais.

Voici diverses petites commissions:

1° Quatre abonnements pour le Mémorial, dont M. Vuarin m'a payé le prix, ensemble 75 fr. (trois pour l'étranger, à 20 fr. et un pour la France à 15 fr.)

2o Une lettre pour M. Picot (1). M. Vuarin désire qu'elle lui soit remise en mains propres.

3o Une lettre pour madame Dubeye, que je prie Jean-Marie de porter lui-même, afin de s'informer de l'adresse du marquis de Belarbre s'il n'est plus à Paris, comme je le crois.

4o Une lettre pour Charles que tu lui feras parvenir franc de port.

5o Plusieurs lettres que tu feras porter, ou que tu enverras par la petite poste.

6° Une note sur le cours de théologie dans l'Université de Landshut, université catholique, comme on l'est aujourd'hui dans toute l'Allemagne. Il sera bon qu'on en parle dans le Mémorial.

7° M. Vuarin n'a entendu payer les lithographies de M. de Courval qu'à mesure que les livraisons paraîtraient. Je lui ai dit que je te le manderais, et que cela s'arrangerait comme il le désire. Ainsi il est convenu qu'il te tiendrait compte successivement des 325 fr., si tu les acquittes pour lui.

(1) Directeur de l'Ami du roi et de la Religion.

Nous avons vu dans les journaux la nomination de l'abbé Clauzel, à Chartres. Son prédécesseur irait-il à Rome ? Voilà deux pauvres diocèses bien pourvus. Peut-être n'est-ce pas encore chose faite. Si Rennes et Saint-Brieuc viennent à vaquer, ce sera un trait de Providence, et l'on pourra encore sauver la Bretagne.

As-tu reçu les deux derniers tomes de l'Essai que je t'ai envoyés sous le couvert de M. Roger? Ils ont été remis à Ferney au directeur de la poste.

Je ne suis pas très-surpris de ce que tu me dis de Bruté. C'est une belle âme, un esprit facile, une vive imagination, mais une pauvre tête. Son adoration pour les Sulpiciens le rabaisse d'ailleurs à leur niveau, et l'on ne peut guère descendre plus bas sous certains rapports. Ils feront bien du mal sans le savoir. L'Église est en souffrance de tous côtés.

J'ai lu dans les journaux la circulaire du Grand-Maître aux recteurs. C'est une pièce à garder ; je te prie de la mettre à part avec le discours du Garde-des-sceaux. A moins d'événements qui changent tout, il sera nécessaire de parler encore à ces deux hommes. Ils abusent du silence qu'ils ont fait autour d'eux. Quant au ministère, il décline sans doute; je ne crois pas cependant sa chute très-prochaine, et il pourrait bien ne tomber qu'avec la monarchie. Ce serait peut-être la chance la plus heureuse pour la société; mais il y aura un moment terrible. La loi sur le remboursement des rentes est, dans cet ordre, la plus funeste qu'on ait encore imaginée depuis le commencement de la révolution. Les suites en sont incalculables. Quel avenir on voit de tous côtés !

Mille amitiés tendres et respectueuses au bon et digne évêque de Metz. Je ne nommerai plus personne en particulier, mais mon intention est de nommer tous nos amis.

Adieu, je t'embrasse bien tendrement. Que j'ai donc envie de te revoir !

Je reçois ta lettre n° 3. Elle m'apprend beaucoup de choses que je suis fort aise de savoir, et qui pourront m'être trèsutiles. Je voudrais être de retour pour recommencer le combat. Au reste, mon voyage me paraît avoir été voulu par la Providence, car il me contrariait, et je ne sais encore comment je suis parti. Pour ce qui m'est propre, je n'y trouve que de la fatigue et de l'ennui; mais je vois déjà pourquoi il était bon que je le fisse.

Le Mémorial, qui peut devenir le premier journal de l'Europe, n'atteindra jamais le rang qu'il doit occuper, si l'on ne rejette pas avec fermeté tout ce qui est mauvais et tout ce qui est faible. On ne doit être arrêté par aucune considération personnelle. Que l'abbé Martin se fâche, qu'importe? Il se retirera, et c'est tout ce qu'on peut désirer de mieux; car il est, et sera toujours incapable d'écrire rien qui vaille. Il suffit d'un pareil homme pour tuer un journal. Déjà M. Vuarin m'avait prié de faire tout ce qui serait en moi pour qu'on lui ôtât le département du Protestantisme. Plus on tardera, plus on se trouvera embarrassé avec lui. Je ne sais trop non plus s'il faut se réjouir de l'article de M. de Bonald. Il ne s'agit pas uniquement du talent de l'écrivain; il y a encore autre chose à considérer, et il est périlleux aujourd'hui de s'associer certains noms.

Si les missionnaires de France sont sages, ils profiteront de l'occasion qui leur est offerte, pour se dégager entièrement de l'archevêque, qui les étouffera s'ils restent sous sa main.

Saint-Victor m'écrit que l'Essai ne va pas du tout. J'espère

que les articles du Mémorial l'aideront un peu. Dis mille choses de ma part à Ange, Marie, etc.

Totus tuus in Christo.

Ci-joint une pétition des Indiens au congrès des ÉtatsUnis, pour demander des missionnaires jésuites. C'est une bonne pièce pour le Mémorial. Ci-joint aussi une lettre de M. Vuarin pour M. d'Orère; il prie de la lui faire remettre sur-le-champ. Je voulais écrire aujourd'hui à M. de Senfft, mais j'ai un rhume de cerveau qui m'en empêche. Ce sera pour un de ces premiers jours.