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footions du ministère public dans une moyenne ou baffe juftice feigneuriale.

On l'appelle procureur d'office, parce qu'il peut agir ex officio, c'eft - à - dire, d'office & de fon propre mouvement, fans aucune inftigation ni requifition de partie.

On ne lui donne pas le titre de procureur-fifcal comme aux procureurs des feigneurs hauts-jufticiers, parce que les feigneurs qui n'ont que la moyenne & baffe-juftice, n'ont pas droit de fifc: par un arrêt du 20 mars 1629, rapporté dans Bardet, fut défendu au procureur d'office du moyen & bas-jufticier, de prendre la qualité de procureurfifcal.

PROCUREUR plus ancien des oppofans, eft celui qui eft le plus ancien en réception entre les procureurs des créanciers oppofans à une faifie-réelle ou à un ordre. Il a le privilège de repréfenter feul tous les créanciers oppofans, & de veiller pour eux; ce qui a été ainsi établi pour diminuer les frais. Il n'y a que le procureur poursuivant & le procureur plus ancien des oppofans auxquels les frais faits légitimement foient alloués; fi les autres créanciers veulent avoir leur procureur en caufe, & débattre les titres des autres parties, ils le peuvent faire, mais c'eft à leurs dépens. Voyez POURSUITE, POURSUIVANT, DÉCRET, ORDRE.

PROCUREUR POSTULANT, eft un procureur ad lites. On l'appelle poftulant, parce que fa fonction eft de poftuler en juftice pour les parties, comme celle des avocats eft de patrociner; on les furnomme poftulans pour les diftinguer des procureurs ad negotia, ou mandataires.

Tous procureurs ad lites font procureurs poftulans; il y a néanmoins quelques tribunaux où les procureurs prennent la qualité de procureurs poftulans. PROCUREUR POURSUIVANT, eft un procureur ad lites qui eft chargé de la pourfuite d'une inftance de préférence ou de contribution, d'une faifie-réelle, d'un ordre entre créanciers, d'une licitation, &c. Voyez POURSUITE, POURSUI

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quantité; de manière que, fans excès, tout pût être confumé en un jour.

A chaque caufe qu'ils pourfuivoient, ils devoient prêter le ferment appellé en droit caIrnia.

Lorfqu'ils prenoient des fubftituts, c'étoit à leurs dépens.

Ils ne pouvoient pas occuper pour les parties, à moins que ce ne fût pour leurs parens.

Philippe V, par fon ordonnance du 18 juillet 1318, fupprima tous les procureurs du roi, à l'exception de ceux des pays de droit écrit; & il ordonna que dans le pays coutumier, les baillisfoutiendroient fes caufes par bon confeil qu'ils prendroient.

Le procureur du roi ne devoit faire aucune pourfuite pour délits & crimes, qu'il n'y eût information & fentence du juge.

Il ne pouvoit pas non plus fe rendre partie dans quelque caufe que ce fût, à moins qu'il ne lui fût ordonné par le juge en jugement, & pare

ties ouies.

Les procureurs du roi qui quittoient leur chargeétoient tenus de refter cinquante jours depuis leur démiffion, dans le lieu où ils exerçoient leurs fonctions, pour répondre aux plaintes que l'on pouvoit faire contre eux.

Il y a préfentement des procureurs du roi, nonfeulement dans tous les fièges royaux ordinaires, mais auffi dans tous les fièges royaux d'attribution. & de privilège.

Ils font fubordonnés au procureur-général de la cour fupérieure à laquelle reffortit le tribunal où. ils font établis; c'eft pourquoi, quand on parle d'eux dans cette cour, on ne les qualifie que de fubftituts du procureur-général, quoique la plupart d'entre eux aient eux-mêmes des fubftituts, mais dans leur fiège ils doivent être qualifiés de procu reurs du roi.

Le procureur du roi pourfuit, à fa requête,, toutes les affaires qui intéreffent le roi ou le public; il donne fes conclufions dans les affaires. appointées qui font fujettes à communication aux gens du roi. Voyez COMMUNICATION, CONCLUSIONS, GENS DU ROI, PARQUET. (A)

PROCUREUR DU ROI EN COUR D'Église, c'eftà-dire, en l'officialité, étoit proprement un promoteur féculier.

Ces fortes d'officiers furent établis pour arrêter les entreprifes que faifoient les officiaux fur la jurifdiction féculière.

L'ordonnance du roi Charles VIII, de l'an 1485, enjoint au procureur du roi en cour d'églife à Paris, d'ailer par chaque femaine, les mercredis &. famedis, & autres jours plaidoyables, aux auditoires. des évêques, officiaux, archidiacres & chapitre. de Paris, pour ouir les matières qui s'y traitoient; ce qui fut confirmé par le réglement de François I, de l'an 1535, fait pour le pays de Provence, &. par un autre réglement fait pour la Normandie.,

en 1540: on lit dans le procès-verbal de l'ancienne coutume de Paris, rédigée en 1510, que Nicolas Charmolue, procureur du roi en cour d'églife, comparut.

L'office de procureur du roi dans les cours ecclé fiaftiques de la prévôté & vicomté de Paris, fut réuni à celui de procureur du roi du châtelet, par édit du mois de novembre 1583.

Il paroît qu'il en fut depuis défuni, puifqu'il y fut encore uni par édit du mois de feptembre 1660. En effet, au mois de feptembre 1660, Armand-Jean de Riants, procureur du roi au châtelet, obtint des lettres-patentes, portant que lui & fes fucceffeurs en la charge de procureur du roi au châtelet, exerceront celle de procureur du roi en cour d'églife, & pourront, en conféquence, affifter en l'officialité de Paris & par-tout ailleurs, y porter la parole pour le roi, & y défendre les droits & privilèges de l'églife gallicane toutes fois & quantes que bon leur femblera. Ces lettres furent enregistrées au parlement le 3 juin 1661, & le même jour le fieur de Riants y fut reçu dans l'office de procureur du roi en cour d'églife.

Il obtint encore au mois de juin 1661, d'autres lettres-patentes, portant confirmation des droits, honneurs, fonctions, prééminences & prérogatives attribuées par les édits, arrêts & réglemens, à la charge de procureur du roi au châtelet & en cour d'églife. Ces lettres furent enregistrées au parlement le premier août 1661. Ces fortes d'offices ont depuis été fupprimés. Voyez le traité de l'abus par Fevret. (A)

PROCUREUR DU ROI DE POLICE, eft celui qui fait les fonctions du ministère public au fiège de la police; en l'abfence du juge, c'eft lui qui fiège. Voyez l'édit du mois de novembre 1699, & la déclaration du 6 août 1701, vers la fin. Voyez auffi POLICE & PROCUREUR DU ROI SYNDIC. (A)

PROCUREUR DU ROI SYNDIC, c'est ainsi qu'on appelle à Nantes celui qui fait la fonction de procureur du roi au fiège de la police, pour le diftinguer du procureur du roi au fiège du bailliage (4).

PROCUREUR SUBSTITUÉ, eft celui auquel un fondé de procuration délègue le pouvoir d'agir en fa place; ce qui ne fe peut faire valablement, à moins que la première procuration ne contienne le pouvoir de fubftituer. Voyez Mandat, ManDATAIRE & PROCURATION. (4)

PROCUREUR-SYNDIC, eft une charge dont la fonction confifte à gérer les affaires de quelque communauté. Les procureurs-fyndics ont été établis en titre d'office dans la plupart des communautés; mais par un édit poftérieur, ces offices ont été réunis aux communautés, lefquelles, par ce moyen, choififfent leur fyndic, comme elles faifoient avant la création de ces offices. (A)

PROCUREUR-TIERS, on fous-entend référendaire, taxateur des dépens, eft un procureur ad lites, qui eft choifi par les parties ou par leurs procureurs, pour régler les conteftations qui furviennent entre eux

dans la taxe des dépens. Voyez ce qui a été dit ci-devant au mot PROCUREUR, & ci-après TIERSRÉFÉRENDAIRE. (A)

PRODIGALITÉ, f. f. PRODIGUE, f. m. (Droit civil.) La prodigalité eft une vaine profufion, qui dépense pour foi, ou qui donne avec excès, fans raison, fans connoiffance & fans prévoyance. Le prodigue et celui qui porte le dérangement dans fes affaires, par une dépenfe infenfée, fuite ordinaire du luxe & de la corruption des mœurs.

La prodigalité eft une espèce de démence; c'est pourquoi les prodigues font de même condition que les furieux; ils font incapables, comme eux, de

gouverner & de régir leurs biens, ni d'en difpofer, foit entre vifs ou par teftament.

Mais il y a cette différence entre l'incapacité qui procède du vice de prodigalité, & celle qui provient de la fureur ou imbécillité, que celle-ci a un effet rétroactif au jour que la fureur ou imbécillité a commencé, au lieu que l'incapacité réfultante de la prodigalité ne commence que du jour de l'interdiction.

Pour faire interdire un prodigue, il faut que quelqu'un des parens ou amis préfente requête au juge du domicile ; &, fur l'avis des parens, le juge prononce l'interdiction, s'il y a lieu. Si les faits de diffipation ne font pas certains, on ordonne une enquête.

Les Aréopagiftes puniffoient la prodigalité, & en plufieurs lieux de la Grèce, les prodigues étoient privés du fépulcre de leurs ancêtres. Suivant les loix romaines, le père peut grever fon fils ou fa fille prodigue d'une fubftitution exemplaire.

Il n'y a point de règles précises fur le degré auquel doit être porté le dérangement, pour provoquer l'interdiction proprement dite. D'Argentré, fur l'article 491 de l'ancienne coutume de Bretagne, & Perchambault, fur l'article 518 de la nouvelle, font entendre que l'ufage de cette province eft d'interdire tout homme qui a diffipé follement le tiers de fon patrimoine. Mais cet ufage, s'il existe encore, eft purement local, & par-tout ailleursc'eft à la prudence du juge à arbitrer, d'après les circonstances, fi la perfonne qu'on lui défère comme prodigue, doit être regardée comme telle dans le fens de la loi.

En général, on peut dire qu'en cette matière la diffipation ne doit pas être auffi grande lorf qu'elle eft jointe à une certaine foibleffe d'efprit, que lorfqu'elle forme le feul titre de la demande en interdiction.

Il est pareillement certain que les excés auxquels il faut qu'elle foit portée, pour déterminer la juftice à priver un homme de fa liberté, doivent être moins confidérables de la part d'un père de famille, que d'un fimple particulier. Celui-ci eft, dans toute l'énergie de ce mot, maître de tout ce qu'il poffède; il ne doit rien à fes collatéraux, point d'alimens pendant fa vie, point de fucceffion après fa mort. Auffi a-t-il été un temps.

où ils étoient non-recevables à pourfuivre fon interdiction. Il y en a un arrêt du 2 août 1600, rapporté par le Grand, fur l'art. 95 de la coutume de Troies. La condition d'un père de famille eft bien différente; fon patrimoine n'eft proprement pas à lui, la nature & la loi le deftinent à fes enfans, elles les regardent en quelque forte comme fes co-propriétaires ; & à fa mort c'est moins une fucceffion qu'une continuation de propriété qu'elles leur défèrent. S'il méconnoît les obligations facrées que lui impofe le titre de père, s'il facrifie les intérêts de fes enfans à ses paffions, il n'y a point à balancer, le juge doit prononcer fon interdiction, & lui dire, comme faifoit anciennement le préteur romain: Quandò tua bona paterna avitaque nequitia tua difperdis, liberofque tuos ad egeftatem perducis, ob eam rem tibi ea re commercioque interdico. Pauli recept. fent. lib. 3, tit. 4, n°. 7. Voyez IN

TERDICTION.

PRODUCTION, f. f. (terme de Pratique.) c'eft tout ce qui eft mis pardevers le juge, pour inftruire une inftance ou procès par écrit.

Chaque partie produit fes titres & fes procédures. Heft d'ufage de les affembler par cotes, qui font chacune marquées d'une lettre.

Pour la confervation de ces pièces, le procureur fait un inventaire de production, dans lequel les pièces font comprifes fous la même lettre que l'on a mis fur la cote: on y tire auffi les inductions des pièces.

On appelle production principale, celle qui a été faite devant les premiers juges; & quand on a de nouvelles pièces à produire devant le juge d'appel, on fait par requête une production nouvelle.

Les productions que l'on fournit dans les appointés à mettre, doivent être faites dans trois jours. Dans les appointemens en droit ou en confeil, on doit produire dans huitaine, & contredire dans le même délai.

Faute de contredire les productions dans les délais de l'ordonnance, on en demeure forclos.

Un arrêt du 3 septembre 1667, fervant de réglement général pour les procédures qui fe poursuivent dans le reffort du parlement de Paris, porte a que toutes les productions des parties pafferont par le greffe, & feront remises au greffier gardefacs, qui fera tenu de les enregistrer fur un regiftre fur lequel chaque officier des fièges préfidiaux, bailliages & autres juftices royales, même des juftices fubalternes, s'en chargera, & mettra fa fignature à côté de l'enregistrement du fac, qui fera rayée lorsque le rapporteur l'aura remise au greffe; & que le greffier en demeurera chargé s'il n'appert que quelque officier en foit chargé fur ie regiftre par fa fignature, qu'il aura appofée ».

Certe néceffité de produire par la voie du greffe a lieu, non-feulement dans les appointemens de conclufions, mais auffi dans les appointemens en droit & au confeil, & même dans les appointemens à mettre, du moins dans les cours. Mais

lorfque les procès appointés à mettre se distribuent nommément à un des juges préfens, nommé par la fentence d'appointement, ainfi que cela fe pratique dans les bailliages & fénéchauffées, on ne les produit point au greffe, on les remet au rapporteur nommé par le jugement.

Au refte, ce qui vient d'être dit ne regarde que les productions principales, & non les productions nouvelles car il fuffit de produire ces dernières entre les mains du rapporteur. Il en est de même des écritures qui fe font depuis que le procès eft diftribué; ces procédures ne fe remettent point au greffe, mais au rapporteur chargé du procès.

PRODUIT, (acte de) on appelle ainfi, en terme de palais, l'acte qu'on fait fignifier, pour déclarer qu'on a mis fa production au greffe. Voyez PRO

DUCTION.

PROESME, ou PROME, ou PRÈME, font de vieux mots françois qui viennent du latin proximus, & qui font ufités dans quelques coutumes, comme Artois, pour exprimer le plus proche parent du défunt ou du vendeur. Voyez RETRAIT LIGNAGER & SUCCESSION. (A)

PROFECTICE, adj. fe dit, en droit, de ce qui provient d'ailleurs; on le joint toujours avec le mot pécule, & tous les deux fignifient les gains qu'un fils de famille fait avec l'argent ou les biens dont fon père lui a confié l'administration. Voyez

PÉCULE.

PROFÈS, f. m. (Jurifprud. canonique.) est celui qui a fait fes vœux de religion, foit dans quelque ordre régulier, tel que l'ordre de Malte, foit dans quelque monastère ou congrégation de religieux ou de chanoines réguliers; les religieux profes font les feuls qui aient voix en chapitre; ils font morts civilement du jour de leur profeffion. Voyez PROFESSION en religion. (A)

PROFESSEUR, I. m. (Droit public.) eft celui qui professe, qui enfeigne quelque fcience, quelque art dans une univerfité, dans un collège.

Les profeffeurs, dans nos univerfités, enfeignent la grammaire & les humanités, en expliquant de vive voix les auteurs claffiques, & en donnant à leurs écoliers des matières de compofition, foit en vers, foit en profe, qu'ils corrigent, pour leur montrer l'application des règles. Ceux de philofophie, de droit, de théologie & de médecine dictent des traités que copient leurs auditeurs, auxquels ils les expliquent enfuite.

Dans l'univerfité de Paris, après un certain nombre d'années d'exercice, les profeffeurs font honorés du titre d'émérite, & gratifiés d'une penfion, qu'ils touchent même après avoir quitté leurs chaires ; récompense bien jufte, & propre à exciter l'émulation.

Il n'y a pas encore long-temps que les profeffeurs étoient payés par leurs écoliers; mais en Tannée 1719, le feu roi a affigné aux professeurs des honoraires fixes, & a, par ce moyen, procuré à fes fujets l'inftruction gratuite, du moins dans

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L'induftrie humaine fe porte ou à l'acquifition des chofes néceffaires à la vie, ou aux fonctions des emplois de la fociété qui font très-variées. Il faut donc que chacun embraffe de bonne heure une profeffion utile & proportionnée à fa capacité; c'est à quoi l'on eft généralement déterminé par une inclination particulière, par une difpofition naturelle de corps ou d'efprit, par la naiffance, par les biens de la fortune, par l'autorité des parens, quelquefois par l'ordre du fouverain, par les occafions, par la coutume, par le befoin, &c. car on ne peut fe fouftraire fans néceffité à prendre quelque emploi de la vie commune.

Il y a des profeffions glorieuses, des professions honnêtes, & des profeffions baffes ou déshon

nêtes.

Les profeffions glorieufes, qui produisent plus ou moins l'eftime de diftinction, & qui toutes tendent à procurer le bien public, font la religion, les armes, la juftice, la politique, l'adminiftration des revenus de l'état, le commerce, les lettres & les beaux-arts. Les profeffions honnêtes font celles de la culture des terres, & des métiers qui font plus ou moins utiles. Il y a en tous pays des profeffions baffes ou déshonnêtes, mais néceffaires dans la fociété ; telles font celles des bourreaux, des bouchers, de ceux qui nettoient les retraits, les égouts, & autres gens de néant; mais comme le fouverain eft obligé de les fouffrir, il eft néceffaire qu'ils jouiffent des droits communs aux autres hommes. Térence fait dire, dans une de fes pièces, à un homme qui exerçoit une profeffion baffe & fouvent criminelle :

Leno fum, fateor, pernicies communis adolefcentium,
Perjurus, peftis; tamen tibi à me nulla eft orta in

juria. Adelph. at. II, fc. j. v. 34 & 35. Je l'avoue, je fuis marchand d'efclaves, la ruine commune des jeunes gens, une pefte publique; cependant, avec tous ces titres, je ne vous ai fait

aucun tort.

- Enfin, chaque profeffion a fon lot. « Le lot de » ceux qui lèvent les tributs eft l'acquifition des "richeffes, dit l'auteur de l'esprit des loix. La gloire » & l'honneur font pour cette nobleffe, qui ne » connoît, qui ne voit, qui ne sent de vrai bien » que l'honneur & la gloire. Le refpect & la confi» dération font pour ces miniftres & ces magiftrats, » qui, ne trouvant que le travail après le travail, » veillent nuit & jour pour le bonheur de l'em» pire ».

Dans le choix d'une profeffion & d'un genre de vie, les enfans font très-bien de fuivre le confeil de leur père tendre, fage & éclairé, qui n'exige

d'eux rien qui foit déraisonnable, & qui leur fournit les dépenfes néceffaires pour l'emploi auquel il les deftine. Mais il feroit également injufte & ridicule de les forcer à prendre un parti contraire à leur inclination, à leur caractère, à leur fanté & à leur génie. Ce feroit, à plus forte raison une tyrannie odieufe de vouloir les engager à embraffer une profeffion déshonnête.

Mais on demande quelquefois, s'il eft bon, s'il eft avantageux, dans un état, d'obliger les enfans à fuivre la profeffion de leur père? Je réponds que c'eft une chofe contraire à la liberté, à l'induftrie, aux talens, au bien public. Les loix qui ordonneroient que chacun reftât dans fa profeffion, & la fit paffer à fes enfans, ne fauroient être établies que dans les états defpotiques, où perfonne ne peut ni ne doit avoir d'émulation. Qu'on ne nous objecte pas que chacun fera mieux fa profeffion, lorf qu'on ne pourra pas la quitter pour une autre; c'eft une idée fauffe que l'expérience détruit tout les jours. Je dis tout au contraire que chacun fera mieux fa profeffion, lorfque ceux qui y auront excellê efpéreront, avec raifon, de parvenir à une autre profeffion plus glorieuse. (D. J.)

PROFESSION EN RELIGION, (Droit ecclef.) qu'on appelle auffi fimplement profeffion, eft l'acte par lequel un novice s'engage à obferver la règle que l'on fuit dans quelque ordre religieux.

On la définit auffi, l'émiffion des vœux fimples ou folemnels qui lie celui qui l'a fait, à une religion approuvée.

On diftingue, dans le droit canonique, deux efpèces de profeffions, l'une tacite, l'autre expreffe.

Pour avoir une idée exacte de la profeffion tacite, il faut avoir recours aux décrétales de Boniface VIII. On y verra les différentes voies par lefquelles on peut fe trouver lié à un ordre monaftique, fans avoir fait de profeffion expreffe. Voici comme Innocent IV s'exprime, capit. 1, de regul. in 6°.: is qui monafterium antè 14 annum ut monachus efficiatur ingreditur, nifi eo completo, profeffionem faciat in fequenti, vel habitum religionis fufcipiat qui dari profitentibus confuevit, feu profeffionem à fe priùs factam ratam exprefsè habeat: liberè poteft intra fequentem annum ad fæculum remeare. Quod fi per totum fequentem annum in monafterio permanferit, ubi profefforum & novitiorum funt habitus indiftinéti, profeffionem per hoc feciffe, vel fi quam prius fecerat, ratam habuiffe videatur: nifi tanta indiftinétio ibi habitus habeatur, quod & profeffi & novitii, ac etiam alii communem vitam cum eis ducentes fimili penitùs habitu induantur. Qui verò poft 14 annum, habitum religionis affumpferit, fi per annum illum geftaverit, ex tunc religionem affumptam præfumitur veraciter effe profeffus: ubi profeffi à novitiis diffimilitudine habitus minimè diftinguntur, etiamfi alii degentes cum eis fimilibus veftibus coutantur: quoniam cum jam hic ad difcretionis annos pervenerit, quid agat agnofcit: & ideo, fufceptum difcretionis tempore ordinem, (poftquam hunc anni probaverit spatio.) intelligitur firmiter approbasse.

Secus autem in illo qui ante difcretionis annos habitum induit regularem: cum eorum quæ nunc agit plenum non habeat intellectum. Diftinctos quoque fuo diffi miles intelligimus effe habitus, five novitiis five profeffis diffimiles veftes dentur: five benedicantur, cum profitentibus conciduntur: five etiam aliquid aliud fiat per quod novitiorum à profefforum habitu, difcernatur. Telles font les règles établies par les papes, & felon lefquelles une profeffion eft cenfée tacite, & produire les mêmes effets qu'une profeffion exprefle. Le concile de Trente a fait quelques changemens à ces règles, mais ne paroit pas avoir abrogé l'ufage des profeffions tacites. Il exige feulement une année complette de probation, c'est-à-dire, de no

viciat.

Nous n'avons point adopté en France l'ufage des profeffions tacites. Perfonne n'eft engagé irrévocablement dans un ordre monaftique, à moins qu'il n'ait contracté cet engagement d'une manière expreffe. Quelqu'un eût-il, pendant quarante années, porté l'habit de religieux profès, les noeuds qui l'attachent au fiècle & à la fociété civile ne feroient pas brifés pour cela ; c'eft dans ce fens qu'il faut entendre la maxime habitus non facit monachum. Rien ne peut fuppléer une profession expreffe.

Ces notions préliminaires établies, la première queftion qui fe préfente eft de favoir quels font ceux qui peuvent faire profeffion monaftique.

La profeffion dans un ordre religieux, formant un engagement irrévocable & pour toute la vie, il étoit naturel que les loix fixaffent l'âge auquel on pouvoit le contracter. Les loix canoniques admettoient à la profeffion ceux qui ont acquis l'âge de 14 ans. L'article 10 de l'ordonnance d'Orléans avoit pris des époques bien différentes; il avoit fixé l'âge pour faire profeffion à vingt-cinq ans pour les mâles, & à vingt pour les filles. Le concile de Trente rendit les perfonnes des deux fexes capables de faire profeffion à 16 ans. L'ordonnance de Blois adopta ce réglement, & il a fubfifté parmi nous jufqu'à l'édit du mois de mars 1768. Louis XV crut qu'il étoit de fa fageffe, en fe réservant d'expliquer encore fes intentions après dix années, d'éprouver un terme mitoyen entre ceux qui avoient été fucceffivement prefcrits, & qui ne fût ni affez reculé pour éloigner du cloître ceux qui y feroient véritablement appellés, ni affez avancé pour y admettre ceux qu'un engagement téméraire pourroit y conduire. En confequence, « aucun de nos fujets ne pourra, à compter du premier avril 1769, s'engager par la profeffion monaftique ou réguHère, s'il n'a atteint, à l'égard des hommes, l'âge de vingt-un ans accomplis; à l'égard des » filles, celui de dix-huit ans pareillement accomplis, nous réservant, après le terme de dix an»nées, d'expliquer de nouveau nos intentions à ce fujet ». Art. 1.

L'édit, par fon article 2, déclare nulle toute profeffion qui feroit faite avant l'âge prefcrit par l'ar

ticle 1. « Voulons que les profeffions qui feront faite » avant ledit âge foient déclarées nulles & de nul » effet, par les juges qui en doivent connoître, » même déclarées par nos cours de parlement nul»lement & abufivement faites, fur les appels com»me d'abus qui pourroient être interjettés en cette » matière par les parties intéreffées, ou par nos » procureurs-généraux: voulons que ceux ou celles qui feroient lesdites profeffions avant ledit âge, » foient & demeurent capables de fucceffion, ainfi " que de tous autres effets civils ».

"

Cette loi, qui n'étoit que provifoire, est devenue une loi perpétuelle, par les lettres-patentes du 17 janvier 1779. Ainfi, parmi nous, l'âge re quis pour faire profeffion eft de vingt-un ans ac complis pour les mâles, & de dix-huit ans égale ment accomplis pour les filles. Toute profeffion faite avant cet âge eft radicalement nulle, & il n'y a point de confentement tacite qui puiffe la va lider.

Mais ce feroit en vain que l'on auroit acquis l'âge prefcrit par la loi pour faire profeffion, fi d'ailleurs on ne jouiffoit de toutes fes facultés intellectuelles. La fureur, la démence, l'imbécillité, pendant qu'elles fubfiftent, forment des obftacles invincibles à l'engagement monaftique, comme tout autre engagement. Il n'en eft pas de même de la fimple foibleffe d'efprit; dès qu'elle n'eft pas pouffée au point de mériter l'interdiction, & qu'elle ne rend point incapable des effets civils, elle ne vicie point la profeffion. Ainfi jugé en la grandchambre du parlement de Paris, le 16 avril 1764; fur les conclufions de M. l'avocat-général de SaintFargeau, dans la caufe du fieur Lelievre, reli gieux Génovéfain.

Si la fureur, la démence, & l'imbécillité ren dent une profeffion nulle, c'est que celui qui émet des oeux dans de pareilles circonftances, ne jouit pas de la liberté, fans laquelle il ne peut y avoir ni véritable contrat, ni véritable engagement; de-là il fuit que toute autre caufe qui priveroit quelqu'un de fa liberté, influeroit fur la profeffion, & l'empêcheroit d'être valable. La violence, les mau vais traitemens, les menaces, la crainte, lorfque ces motifs font capables d'ébranler une per fonne conftante, produiroient cet effet. Il n'y a de difficulté que pour déterminer jufqu'à quel degré ils ont pu gêner ou anéantir la liberté. « Pour con»noître, dit d'Hericourt, fi la crainte à pu rendre » un vœu nul, il faut confidérer quel est l'objet » de cette crainte, la qualité de la perfonne me» nacée, fon âge, fon fexe, la foibleffe ou la » force de fon efprit. La crainte de la mort, & » de quelque traitement cruel, peut ébranler les » perfonnes les plus conftantes. Une crainte moins » forte peut émouvoir des perfonnes plus foibles, » & rendre leur profeffion en quelque forte invo»lontaire. Si une mère répète fouvent à fa fille » qu'elle l'a deftinée pour le cloître ; fi elle lui » fait des reproches & des menaces, parce qu'elle

n'embrafle

A

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