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vrai que là aucun système n'est en jeu, et que je n'ai pas à craindre d'être juge du camp dans un tournoi nouveau. Le Musée royal de la Haye est riche; mais on le connaît assez par cent bonnes descriptions. Je note seulement pour mon souvenir, à titre de simples curiosités, quinze dessins à la gouache et au pastel, par C. Troost. Dix représentent des scènes de comédies hollandaises très-plaisantes, et qui me font regretter de n'avoir pas assez de loisir pour apprendre tant soit peu le hollandais. Il y a là surtout, devant une porte, un grand niais et une jeune fille qui l'éclaire : je voudrais bien connaître leur histoire. Dans les cinq autres dessins, on voit une réunion d'amis, qui débute par une tristesse silencieuse, puis devient bavarde, tumultueuse, folle, et enfin tombe dans les infortunes bachiques les plus ridicules. Tout cela est largement exécuté et avec une franche gaieté (').

grande ville, c'est, en effet, une promenade d'un intérêt incomparable que la mer à une distance de 4 ou 5 kilomètres. Dès que se répand la nouvelle qu'elle sourit ou qu'elle a de belles colères, on accourt. Est-elle, au contraire, laide, terne, d'un gris sale, sottement maussade et hargneuse, à son aise! qu'elle passe sa mauvaise humeur là-bas, derrière le Bois ou les dunes, on lui tourne le dos: chacun chez soi; on a dans la ville et sa verte frontière d'autres spectacles qu'elle ne troublera pas.

Une impression douloureuse m'a fait quitter la Haye brusquement. A midi et demi, le lundi 8 août 1858, comme je traversais un marché, le Groen-Markt, j'ai vu un homme qui frappait une jeune fille d'environ douze ans. C'était un artisan pâle, en casquette et en redingote longue; quarante-cinq ans environ. Il était sans donte le père de cette enfant; il la poussait devant lui à coups de poing dans le dos, et de l'autre main il la menaçait encore. Je déteste toute fausse sensibilité; mais jamais je ne vois frapper un

J'ai passé ma soirée à Schevelinges, au bord de la mer. Le village des pêcheurs, qui, d'après les anciennes relations, était très-pittoresque, commence à prendre la phy-enfant sans être saisi d'une horreur qui trouble tout mon sionomie avide de tous les bourgs ou hameaux maritimes qui vivent du séjour des baigneurs. Les maisonnettes se font bourgeoises tant qu'elles peuvent, afin de se louer chèrement. Les femmes conservent cependant leur singulier petit bonnet blanc, collant sur toute la tête et se relevant sur les côtés comme les rebords des chapeaux de cuir de leurs maris.

L'usage des cabines est inconnu à Schevelinges. On conduit baigneurs et baigneuses à l'eau dans de véritables diligences. Ces lourds véhicules, traînés par des chevaux, se composent d'un intérieur où l'on change de vêtements, et d'une espèce de cabriolet en forme de tente, garni d'une double rampe de fer inclinée et d'une échelle. Quand la voiture est entrée dans la mer, on fait faire un demi-tour au cheval. Le cabriolet qui, sur la grève, était tourné du côté des spectateurs, se trouve alors en face de l'immensité, l'océan et les cieux on abaisse l'échelle; le baigneur ou la baigneuse (quelquefois une famille entière) descend l'escalier en s'appuyant sur les rampes, et se trouve dans l'eau jusqu'à la ceinture. Il existe bien quelque chose de semblable à Trouville et en quelques autres lieux; mais les voitures à bain de Schevelinges se distinguent par une pesanteur et une solidité toutes primitives: quand elles s'ébranlent sur le sable humide pour faire leurs dix tours de roues, on dirait que sérieusement elles se mettent en route pour l'éternité.

On a imaginé une machine, d'un aspect plus étrange encore, à l'usage de ceux qui veulent s'asseoir et s'abriter contre le soleil ou la pluie : c'est un grand et gros fauteuil d'osier, à ample capuchon, à peu près comme la niche où les vieilles estampes représentent Javotte la ravaudeuse assise. Dans chacune de ces niches, il y avait une petite pancarte sur laquelle on avait écrit ces mots : « Les chaises qui se trouvent sur la plage sont la propriété de la veuve et des enfants Spaans dont le mari a péri sur la mer. Elles sont louées à un taux de 10 cents par séance. » Petites observations d'un voyageur très-désœuvré; mais je me Hatte de la pensée que j'aurais l'approbation de Bob: ce sont là des éléments de réalisme. Il faisait un peu froid, et il n'y avait personne dans les voitures ni dans les paniers. Pendant les mois de beau temps, tous les dimanches, le soir, la plage est couverte des familles de la Haye. Pour une (1) Cette réunion, dit le livre, est connue sous le nom de Nelri, mot qu'on a composé avec les premières lettres des inscriptions latines placées sur le cadre des cinq dessins:

NEMO LOQUEBATUR.

ERAT SERMO INTER FRATRES,

LOQUEBANTUR OMNES.

RUMOR ERAT IN CASA.

IBANT QUI POTERANT, QUI NON POTUERE CADEDANŢ.

être. La même cause me fit sortir de la ville de Sienne, il y a plusieurs années; c'était un maître qui, à l'intérieur de sa maison, frappait son apprenti on entendait les coups et les cris. Il y a telle rue de Paris où il me sera toujours impossible de passer; j'y ai vu..... mais le souvenir seul est un supplice.

... Quoi qu'il en soit, et que j'aie tort ou non, l'expérience m'a appris qu'après la scène du Groen-Markt je ne pouvais plus rien voir, de tout le jour, qu'à travers un nuage de tristesse. Adieu donc la Haye! bonne, douce, aimable ville, après tout, et où je n'avais rencontré aucun autre exemple de grossièreté dans les mœurs! Adieu, peut-être pour toujours!

La suite à une autre livraison.

Un vieil ouvrier papetier affirmait que la feuille de papier remuée en forme dans un seul sens se déchirait bientôt dans l'autre, et que pour être vraiment bonne et offrir de la résistance elle devait être agitée à gauche, à droite, en avant, en arrière. Il en est de même de notre âme : si elle n'est tournée, ébranlée, éprouvée en tous sens, elle cédera au premier choc.

Mme BEECHER STOWE.

LESUEUR, NATURALISTE.

En France, nous ne consentons guère à admirer longtemps et à noter dans notre mémoire que les hommes de génie il serait juste cependant de ne pas trop dédaigner et oublier les hommes d'un grand mérite qui, au second rang, ont rendu d'éminents services et honoré la patrie. Charles-Alexandre Lesueur, voyageur, savant, artiste, était un de ces hommes.

Né au Havre, le 1er janvier 1778, il s'embarqua, en qualité de novice, sur la corvette le Géographe, qui sortit du port du Havre le 19 octobre 1800, avec la corvette le Naturaliste, pour entreprendre une exploration des terres australes. Péron et Bory de Saint-Vincent faisaient partie de cette expédition. Après peu de semaines de navigation, Lesueur fut nommé par le commandant en chef, Nicolas Baudin, à la fonction de peintre dessinateur d'histoire naturelle. Le voyage dura trois ans et demi. On découvrit sur la côte occidentale de la Nouvelle-Hollande le golfe du Géographe, le cap du Naturaliste, le cap Leschenault, et la presqu'ile Péron. Sur les côtes méridionales, on avait cru découvrir aussi plusieurs autres points; mais il a été reconnu depuis que les navires français avaient été précédés

dans ces parages par le capitaine anglais Flinders. On donna | Tous les détails de l'existence des naturels : leurs instruaussi le nom de Terre de Baudin à une partie de la côte à l'est de la terre découverte par Flinders.

A leur retour, Lesueur et Péron, liés d'une amitié intime, soumirent ensemble les collections d'histoire naturelle qu'ils avaient rapportées à l'Académie des sciences. Le 6 juin 1806, Cuvier disait à l'Académie : « La collection zoologique de MM. Péron et Lesueur se compose de cent mille échantillons d'animaux, dont plusieurs constituent des genres nouveaux, et les nouvelles espèces, de l'avis des professeurs du Muséum, excèdent deux mille cinq cents. Péron et Lesueur ont découvert plus d'animaux nouveaux que tous les naturalistes voyageurs des temps modernes. » Quinze cents dessins ou peintures, exécutés par Lesueur, reproduisent avec une extrême précision les principaux objets recueillis par ses soins et ceux de son ami. Tous ces dessins, faits sur nature vivante ou sur échantillon frais, forment la plus complète et la plus précieuse collection en ce genre que nous ayons jamais connue. » L'histoire de l'homme ne lui est pas moins redevable.

ments de musique, de guerre, de chasse, de pêche; leurs ustensiles domestiques, costumes, ornements; les habitations, les tombeaux; en un mot, tout ce que leur industrie naïve a pu produire se trouve réuni dans les dessins de cet artiste consciencieux et infatigable. »>

Sur la proposition de l'Académie, le ministre ordonna la publication du Voyage de découvertes aux terres australes. Lesueur aida son ami Péron dans la rédaction du premier volume, qui parut en 1807. La santé de Péron étant fort affaiblie, Lesueur le conduisit à Nice, et y reçut son dernier soupir. Le capitaine Louis Freycinet, sur le refus de Lesueur, termina le second volume de la relation, qui ne parut qu'en 1816.

En 1815 et 1816, Lesueur accompagna William Maclure dans un voyage aux Indes et aux Etats-Unis. Séduit par l'accueil empressé des savants de Philadelphie, il devint le membre le plus actif et le plus utile de l'Académie des sciences naturelles de cette ville. Pendant ce temps, William Maclure, préoccupé de réformes sociales, entreprenait de

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gouverner la ville de New-Harmony, fondée au milieu des forêts de l'Indiana, sur les bords du Wabash, l'un des plus magnifiques affluents du Mississipi. Lesueur alla le rejoindre en 1828, et s'associa pendant neuf années à des efforts désespérés pour faire triompher dans la pratique la théorie hasardée des fondateurs de New-Harmony. Mais il y poursuivit en même temps ses études scientifiques au sein des forêts.

A l'occasion d'un voyage à la Nouvelle-Orléans, il leva les plans et vues des principaux sites des rivages du Wash et du Mississipi; plus tard, il grava sur cuivre ces dessins. Après vingt-deux ans d'absence, il revint en France. Ne trouvant pas les encouragements pécuniaires qu'il espérait pour la publication de ses travaux, et arrêté par

Dessin de Chevignard, d'après une photographie. les frais considérables de la gravure, il se fit enseigner, en 1838, à l'âge de soixante ans, l'art de la lithographie. On a de lui un spécimen remarquable de son talent comme dessinateur sur pierre: c'est un tableau des vues et coupes du cap de la Hève qu'il publia en 1843.

Aimé et honoré par ses concitoyens, il fut nommé, en 1845, conservateur du Muséum d'histoire naturelle du

Havre.

Il est mort le 12 décembre 1846.

Depuis, on a donné son nom à l'une des rues nouvelles du Havre, et 8000 francs ont été consacrés aux frais d'installation de quarante caisses contenant la collection d'histoire naturelle de Lesueur, et offertes à la ville par ses neveux.

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avant la fin du repas, emmenant les plus jeunes des enfants. Quant à Mile Thérèse, cette paysanne qui parlait un très-bon français avec l'accent d'une Parisienne bien élevée, elle dirigeait adroitement la conversation, sachant fournir à chacun l'occasion de parler de ce qu'il savait le mieux. Rose rentra, tenant deux corbeilles pleines de fruits, disposés avec tant de goût qu'on se faisait presque un scrupule de les déranger. Mais l'odeur et la mine des fruits l'emportant sur l'amour de l'art, chacun à l'envi se mit à l'œuvre, et la démolition fut rapide. A la fin, Me Thérèse se leva.

En 1806, entre Sallenches et Chamounix, au fond d'une pas, et prenait par moments un tour sérieux, Bien des vallée entourée de hautes collines, au bord de cette belle sujets apparurent tour à tour: la culture des champs et la cascade que forme le Bonnaut, un pauvre homme, ancien culture de l'esprit, l'éducation du bétail et celle des enmineur de Servoz, pêchait aux truites. C'était le passe-temps fants, l'instinct des abeilles et les immortelles destinées de et le gagne-pain de sa vieillesse. Près du bassin écumant, l'âme humaine. Le père Méval avait un sens droit, une il remarqua une belle source, il en but une gorgée; le goût bonhomie naïve; Jacques, la vive imagination et l'enthoul'étonna : c'était de l'eau minérale. Il en parla, et la dé- siasme de la jeunesse, avec un ton de modeste déférence couverte fit du bruit. Une source qui n'est ni pure ni agréable auquel on n'est plus accoutumé. Chez Mme Méval, la simà boire, ce peut être une bonne fortune pour un pays. On plicité, le naturel du langage et des manières, se joignaient trouva trois autres sources de même nature à très-peu de à une élévation de pensée et de sentiment qui annonçait un distance de la première. La vertu de ces eaux une fois bien développement de facultés surprenant au dernier point chez reconnue, on fonda un établissement de bains qui est au- une villageoise. Rose, la bien nommée, la jolie brune aux jourd'hui célèbre et très-fréquenté. On ne voit point là de yeux bleus, ne disait rien; mais son fin sourire, son regard Kursaal étincelant de lumières, retentissant de voix, d'in-intelligent, montraient assez qu'elle écoutait. Elle disparut struments, de chants, et du cliquetis de l'or sur le tapis vert la maison, immense, isolée dans ce désert, avec son clocher et ses deux tours, a une physionomie incertaine ou de château ou de couvent; au-dedans, cent chambres, la paix pour les souffrants, l'étude pour ceux qui l'aiment, des livres, des médailles, des collections d'histoire naturelle; au dehors, la solitude, le vaste silence que fait mieux sentir le bruit,monotone de la cascade, les sommets hérissés de hêtres et de sapins, les grands effets de lumière et d'ombre, et on ne sait quelle paix solennelle, quelle imposante majesté dans les airs au voisinage des géants des Alpes. De sa fenêtre, chacun a un spectacle tour à tour, suivant les heures, radieux ou sombre, invitant à la joie ou à la mélancolie. Les promenades sont nombreuses; on a le pont du Diable, la fontaine Froide, le Fayet-d'en-haut, le moulin des Râteaux, les Cheminées des Fées (pyramides rondes couvertes de grosses pierres), et plus au loin, la cascade de Chedé, les chutes de l'Arve, le col de Voza, le mont Joli, le glacier de Trélat, etc. Plusieurs chemins conduisent au village de Saint-Gervais, qui a donné son nom à l'établissement; le plus court y conduit en vingt minutes, le plus long en trois quarts d'heure. Ce village est élevé de 150 ou 200 pieds au-dessus de l'Arve, à l'entrée d'une vallée que l'on peut suivre pour aller à l'allée Blanche. Des bains Saint-Gervais à Chamounix il y a cinq ou six heures de route.

UNE HUMBLE TACHE.

NOUVELLE.

Suite. Voy. p. 37, 12.

-Monsieur le professeur, dit-elle, voudra-t-il me faire l'honneur de venir déjeuner avec moi demain matin? L'un des enfants, Luc ou Julienne, le conduira.

L'invitation fut acceptée avec empressement. Mile Thérèse partit, refusant toute escorte.

Le professeur monta dans sa chambre; il se mit un moment å la fenêtre. La pluie avait cessé; la lune tantôt se cachait sous les nuages, tantôt reparaissait dans un espace libre. A ses clartés fantastiques, M. Blarville distinguait un jardin d'où montaient jusqu'à lui les parfums du réséda et du jasmin; plus loin, les arbres touffus du verger se détachaient en masses noires sur les collines opposées. Aut bruit lointain de la rivière se mêlait le doux murmure d'une fontaine. Le professeur fut arraché à sa contemplation par un incident très-vulgaire : il s'aperçut qu'il avait laissé son mouchoir à la cuisine et redescendit le chercher. A travers la porte entr'ouverte, il vit de la lumière; il entendit la voix du père Méval. Il poussa doucement la porte. Toute la famille était là, agenouillée, tandis que le père de famille récitait les prières du soir.

Sans être hostile aux pensées religieuses, notre savant était tombé peu à peu dans une sorte de sceptique indifféLe souper venait d'être servi sur une nappe de la plus rence. Mais ces fronts bruns inclinés, ces fortes mains engageante blancheur. M. Blarville fut mis à la place d'hon- jointes, ces corps vigoureux prosternés, ces cœurs simples neur, à côté de Mlle Thérèse. Les mets étaient des plus élevés en haut, tout cela remua au fond de son âme des simples; mais ils lui eussent paru exquis même quand la sentiments assoupis plutôt qu'éteints. Presque involontai course et la fatigue n'eussent pas aiguisé son appétit. Est-rement ses genoux fléchirent; il humilia sa hautaine inil, en effet, rien de meilleur qu'une omelette toute bouillante, où l'on a mêlé aux œufs pondus de la journée de fines herbes que l'on vient de cueillir? qu'une friture aux pommes de terre cuites à point, dorées, croquantes sans être dures? qu'une salade de laitue blanche et tendre, assaisonnée d'une huile de noix toute fraiche? Mme Méval, en l'honneur de l'hôte, avait décroché de sa cheminée les meilleurs saucissons de sa provision. Le pain était noir, mais très-bien fait. On avait mis devant le voyageur la bouteille de vin que l'on avait entamée pour lui à son arrivée ; mais il voulut boire du cidre comme le reste de la famille héroïsme facile, le cidre était excellent.

telligence devant l'Intelligence souveraine; il rendit, lui aussi, un hommage d'adoration et d'amour à la réconciliation de Dieu et de l'homme en la personne de Jésus-Christ. Il entendit avec émotion le père Méval ajouter à sa prière. cette requête : « Bénissez aussi, mon Dieu, l'étranger qui dort en ce moment sous notre toit. » Nul ne l'avait vu entrer, et il sortit sans bruit, au moment où les parents et les enfants, les maîtres et les serviteurs, se souhaitaient une bonne nuit et se disaient adieu.

Son sommeil, d'abord agité et interrompu, devint calme et profond. Il était grand jour quand il s'éveilla. Sur une chaise, une main inconnue avait déposé ses habits, brossés, Le bon feu, le bon souper, les bonnes gens, le repos, lavés, repassés, ne portant presque nulle trace de leurs si doux après la fatigue et l'inquiétude, tout cela enchan-aventures de la veille; son feutre même avait repris à peu tait notre professeur, Bientôt il se montra aussi gai, aussi près la figure d'un chapeau. Il s'habilla promptement, aimable, aussi spirituel que s'il eût été dans le plus re- sortit, et trouva dans le corridor Luc, le petit berger desnommé des salons parisiens, La conversation ne tarissait sinateur,

dormi?

Bonjour, Monsieur, dit l'enfant; avez-vous bien

-Non, cela nous détournerait. Et puis, Me Thérèse nous explique la perspective. D'ailleurs, nous avons la

- Très-bien, mon garçon; si bien que l'on est entré Bibliothèque... dans la chambre sans m'éveiller.

-Ah! dame, c'est que la mère m'avait bien recommandé de ne point faire de bruit en vous portant vos habits. Mes parents vous font leurs compliments, et vous prient de les excuser s'ils sont partis dès le matin sans vous attendre; mais c'est que l'ouvrage presse.

- Et Mile Rose, est-elle aussi allée aux champs?

-Quoi! il y a une bibliothèque à Lézin?

Pourquoi donc pas, Monsieur, puisqu'on sait lire? Oui, nous avons une bibliothèque, et une belle encore. Unc fois, dans le temps des chasses, il nous est venu un libraire parisien; il s'est plu ici, et il nous envoie des livres toutes les années, avec de la musique pour les chanteurs. --Est-ce Mule Thérèse qui a enseigné le chant aux jeunes

— Ma sœur? Elle lave le linge à la fontaine. Moi, je gens? vais vous conduire chez Mlle Thérèse.

Demeure-t-elle loin d'ici?

Au château, à l'autre bout du village.
-Ah! c'est la propriétaire du château?

- Elle! s'écria l'enfant en riant. Ah bien! oui! Le château est aux héritiers de Mme de Serlat.

— Qui est donc Mule Thérèse?

Eh! c'est la fille de la mère Sézegnin; sa mère et elle gardent le château; les propriétaires n'y viennent que bien rarement.

Tout en jasant, M. Blarville s'était mis en route avec son guide, non sans avoir admiré l'ordre parfait et l'air d'agreste richesse qui régnaient dans la cour de la ferme. L'unique rue du village était bordée de maisons presque toutes en bon état. Devant la plupart d'entre elles s'élevait une sorte de porche ou de vérandah, formé de quelques légers piliers de bois, de quelques lattes autour desquelles s'enlaçaient des plantes grimpantes de toute espèce. On voyait aussi, derrière les haies touffues ou les palissades peintes en vert, de jolis jardins où les fleurs étaient cultivées à côté des légumes. Sur les fontaines, belles, abondantes, mais rustiques de forme et de matériaux, on avait placé des vases de cymbalaires qui retombaient en vertes et légères draperies. Partout une certaine élégance simple et de bon goût. Les paysans que l'on rencontrait de temps à autre étaient vêtus d'habits propres et bien raccommodés, et saluaient le voyageur d'un air bienveillant.

Plus d'une jeune fille, plus d'un jeune garçon, arrêtaient Luc, en lui disant : - Où vas-tu? Sur sa réponse, Chez Mile Thérèse, chacun le chargeait d'une commission: -Demande-lui s'il y aura une veillée ce soir... Quand elle pourra me recevoir pour m'enseigner le tricot double.... Prie-la de me préparer un peu de vieux linge pour le panaris de mon frère... - Dis-lui que la vieille mère Michu voudrait bien qu'elle allât lui faire visite...

- Qu'est-ce donc que ces veillées? demanda M. Blarville à Luc.

De deux soirées l'une, Mile Thérèse reçoit les jeunes filles dans la salle basse du château; elles travaillent, tandis que Me Thérèse lit à haute voix et raconte des histoires. Dans ce moment, on lit le journal du lieutenant Bellot, et les filles grillent de savoir s'il a retrouvé le capitaine Kennedy (1). •

-Les garçons n'ont pas de veillées?

-Si fait. Les jours où Mlle Thérèse ne reçoit pas les femmes, elle enseigne le dessin aux garçons.

Vraiment ! Vous êtes sans doute un de ses meilleurs élèves, Luc? Vous me montrerez vos dessins.

---Oh! non, Monsieur, ils sont trop laids. Je ne dessine que pour moi. Ce sont les dessins de Mile Thérèse qu'il faut voir; comme c'est ferme et léger! et ses arbres done! André Mouillet a de la main; il dessine très-bien, mais pas encore aussi bien qu'elle.

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Elle l'a enseigné à mon frère Jacques et à Étienne Machefer, et ils le montrent aux autres.

---- Elle sait donc tout, Mlle Thérèse?

Tout au monde, Monsieur. Et puis, elle est si bonne ! - Elle a été sans doute élevée à Paris?

- Du tout, Monsieur; elle a toujours vécu à Lézin. Nous voici devant la grille du château; j'entre avec vous pour m'acquitter de mes commissions, si seulement je me les rappelle. Voyez cette bonne vieille qui emplit des carafes à la fontaine, c'est la mère Sézegnin. Elle nous a vus, car elle vient au-devant de nous. La fin à la prochaine livraison.

LA LOI DE LA ROUTE ET DE LA RUE

EN ANGLETERRE.

Il est de jurisprudence en Angleterre :

1° Que tout homme qui conduit un cheval et une voiture doit suivre le côté gauche de la route, de telle manière que, lorsque deux cavaliers ou deux conducteurs de voitures se rencontrent, les mains droites tenant les fouets soient l'une et l'autre du côté du milieu de la route. Quiconque ne se conforme pas à cette règle est responsable de tout dommage qui peut provenir de cette infraction. (Note aux Commentaires de Blackstone, 1809.)

2o Que les deux côtés de la rue sont réservés aux pićtons, et que le milieu est réservé aux voitures; que les piétons doivent donc user de prudence et attendre, s'il est nécessaire, lorsqu'ils veulent traverser la rue; mais qu'aux coins des rues, le milieu appartient autant aux piétons qu'aux voitures, et que par conséquent une personne à pied a le droit, au besoin, de demander à un cocher de s'arrêter pour lui laisser le passage libre, droit qu'elle n'aurait pas au milieu d'une rue. (Décision du juge Coleridge, 1856.)

Pensez à tous les maux dont vous êtes exempts. JOUBERT.

LES DEUX FERMES.

Voy. t. XXVII (1859), p. 59, 100, 124, 155, 252, 331, 363. LES PRESSOIRS.

La question des anciens et des nouveaux pressoirs est parfaitement tranchée pour ceux qui s'occupent de mécanique; mais il n'en est pas de même pour les praticiens. L'ancien pressoir est encore employé par l'immense majorité des vignerons; beaucoup de gens qui ne sont pas vignerons sourient aux tentatives d'innovation, et ne croient pas que l'on puisse jamais faire mieux que ce qui a été fait

-Faites-vous aussi des lectures pendant les leçons de par nos pères. dessin ?

() Voy., sur Bellot, t. XXVI, 1858, p. 15, 22, 30, 38.

Ces mots nos pères» nous reportent à la plus haute antiquité.

On voit par notre dessin ce que sont encore la plupart

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