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Et sur l'état d'un charbonnier

Il fut couché tout le dernier.

Autre plainte. Quoi donc ! dit le Sort en colère, Ce baudet-ci m'occupe autant

Que cent monarques pourroient faire! Croit-il être le seul qui ne soit pas content? N'ai-je en l'esprit que son affaire?

Le Sort avoit raison. Tous gens sont ainsi faits:
Notre condition jamais ne nous contente;
La pire est toujours la présente.
Nous fatiguons le ciel à force de placets.
Qu'à chacun Jupiter accorde sa requête,
Nous lui romprons encor la tête.

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Aux noces d'un tyran tout le peuple en liesse
Noyoit son souci dans les pots.
Ésope seul trouvoit que les gens étoient sots
De témoigner tant d'allégresse.

Le soleil, disoit-il, eut dessein autrefois
De songer à l'hyménée.

Aussitôt on ouït, d'une commune voix,
Se plaindre de leur destinée

Les citoyennes des étangs.

Que ferons-nous, s'il lui vient des enfants?
Dirent-elles au Sort: un seul Soleil à peine
Se peut souffrir; une demi-douzaine
Mettra la mer à sec, et tous ses habitants.
Adieu joncs et marais: notre race est détruite ;
Bientôt on la verra réduite

A l'eau du Styx. Pour un pauvre animal, Grenouilles, à mon sens, ne raisonnoient pas mal.

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Le Villageois et le Serpent.*

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Ésope conte qu'un manant,
Charitable autant que peu sage,
Un jour d'hiver se promenant
A l'entour de son héritage,

Aperçut un serpent sur la neige étendu,
Transi, gelé, perclus, immobile rendu,

N'ayant pas à vivre un quart d'heure.
Le villageois le prend, l'emporte en sa demeure;
Et, sans considérer quel sera le loyer
D'une action de ce mérite,

Il l'étend le long du foyer,

Le réchauffe, le ressuscite.

L'animal engourdi sent à peine le chaud,
Que l'ame lui revient avecque la colère.
Il lève un peu la tête, et puis siffle aussitôt ;
Puis fait un long repli, puis tâche à faire un saut

Esop Agricola et Serpens. Phædr. Homo el Colubra.

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