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La Fortune et le jeune Enfant.*

Sur le bord d'un puits très profond
Dormoit, étendu de son long,

Un enfant alors dans ses classes.
Tout est aux écoliers couchette et matelas.
Un honnête homme, en pareil cas,
Auroit fait un saut de vingt brasses.
Près de là tout heureusement

La Fortune passa, l'éveilla doucement,
Lui disant Mon mignon, je vous sauve la vie;
Soyez une autre fois plus sage, je vous prie.
Si vous fussiez tombé, l'on s'en fût pris à moi ;
Cependant c'étoit votre faute.

Je vous demande, en bonne foi,

Si cette imprudence si haute

Provient de mon caprice. Elle part à ces mots.

Pour moi, j'approuve son propos.
Il n'arrive rien dans le monde
Qu'il ne faille qu'elle en réponde:
Nous la faisons de tous écots;

Elle est prise à garant de toutes aventures.
Est-on sot, étourdi, prend-on mal ses mesures,
On pense en être quitte en accusant son sort:
Bref, la Fortune a toujours tort.

Esop., 62, Puer et Fortuna; Regnier, sat. xiv, le Malheur et l'Enfant.

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Les Médecins.*

Le médecin Tant-pis alloit voir un malade
Que visitoit aussi son confrère Tant-mieux.
Ce dernier espéroit, quoique son camarade
Soutînt que le gisant iroit voir ses aïeux.
Tous deux s'étant trouvés différents pour la cure,
Leur malade paya le tribut à nature,
Après qu'en ses conseils Tant-pis eut été cru.
Ils triomphoient encor sur cette maladie.

L'un disoit: Il est mort; je l'avois bien prévu.
S'il m'eût cru, disoit l'autre, il seroit plein de vie.

Esop., 126, Egrotus et Medicus.

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