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cueillement des fuffrages d'un fi grand peuple, ces diftributions ne fe réduifoient pas à des formes indifférentes en elles-mêmes ; mais que chacune avoit des effets relatifs aux vues qui la faifoient préferer.

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Sans entrer là-deffus en de plus longs détails, il résulte des éclairciffemens précédens que les Comices par Tribus étoient les plus favorables au Gouvernement populaire, & les Comices par Centuries à l'Ariftocratie. A l'égard des Comices par Curies, où la feule populace de Rome formoit la pluralité, comme ils n'étoient bons qu'à favorifer la tyrannie & les mauvais desseins, ils durent tomber dans le décri, les feditieux eux-mêmes s'abstenant d'un moyen qui mettoit trop à découvert leurs projets. Il est certain que toute la majefté du peuple Romain ne fe trouvoit que dans les Comices par Centuries, qui feuls étoient complets, attendu que dans les Comices par Curies," manquoient les Tribus ruftiques, & dans. les Comices par Tribus, le Senát & les Patriciens.

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Quant à la maniere de récueillir les fuffrages, elle étoit chez les premiers Romains auffi fimple que leurs mœurs, quoique moins fimple encore qu'à Sparte. Chacun donnoit fon fuffrage à haute voix, un Greffier les écrivoit à mefure; la pluralité des voix dans chaque Tribu déterminoit le fuffrage de la Tribu, pluralité de voix entre les Tribus déterminoit le fuffrage du peuple, & ainfi des Curies & des Centuries. Cet honnêteté regnoit entre les Citoyens, & que chacun avoit honte de donner publiquement son fuffrage à un avis injufte ou à un fujet indigne, mais quant le peuple fe corrompit & qu'on acheta les voix, il convint qu'elles fe donnaffent en fecret pour contenir les acheturs. par la défiance, & fournir aux fiipons le moyen de n'être pas des traîtres.

Je fçais que Ciceron blâme ce changement & lui attribue en partie la ruine de la République. Mais, quoique je fente le poids que doit avoir ici l'autorité de Ciceron, je ne puis être de fon avis. Je penfe au contraire, que pour n'avoir pas fait affez de chan

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gemens femblables, on accélera la perte de l'Etat. Comme le régime des gens fains n'est pas propre aux malades, il ne faut loir gouverner un peuple corrompu par les mêmes Loix qui conviennent à un bon peuple. Rien ne prouve mieux cette maxime que la duree de la République de Venise, dont le fimulacre exifte encore, uniquement parce que fes loix ne convienent qu'à des méchants hommes.

On diftribua donc aux Citoyens des tablettes par lesquelles chacun pouvoit voter fans qu'on fçût quel étoit fon avis. On établit auffi des nouvelles formalités pour le recueillement des tablettes, le compte des voix, Ja comparaifon des nombres, &c. Ce qui n'empêcha pas que la fidélité des Officiers chargés de ces fonctions* ne fût fouvent fufpectée. On fit enfin, pour empêcher la brigue & le trafic des fuffrages, des Edits, 'dont la multitude montre l'inutilité.

Vers le derniers tems, on étoit fouveut contraint de récourir à des expédients ex

Cuftodes, Diribitores, Rogatores fuffragiorum,

tra ordinaires pour fuppléer à l'infuffifance, des Loix. Tantôt on supposoit des prodiges; mais ce moyen qui pouvoit en imposer au Peuple, n'en impofoit pas à ceux qui le gouvernoient; tantôt on convoquoit brusquement une affemblée avant que les Candidats euffent eu le temps de faire leurs brigues; tantôt on confumoit toute une feance à parler quand on voyoit le peuple gagné prêt à prendre un mauvais parti. Mais enfin l'ambition éluda tout; & ce qu'il y a d'incroya ble; c'eft qu'au milieu de tant d'abus, ce peuple immense, à la faveur de fes anciens Réglements, ne laiffoit pas d'élire des Magiftrats, de paffer les Loix, de juger les caufes, d'expedier les affaires particulieres & publiques, prefque avec autant de facilité qu'eût pû faire le Sénat lui-même.

CHAPITRE V.

QUAN

Du Tribunal.

U AND on ne peut établir une exacte proportion entre les parties conftitutives de l'État, ou que des caufes indeftructibles en altérent fans çeffe les rapports, alors on inftitue une Magiftrature particuliere qui ne fait point corps avec les autres, qui réplace chaque terme dans son vrai rapport, & qui ait une liaison ou un moyen terme, foit entre le Prince & le Peuple, foit entre le Prince & le Souverain, foit à la fois des deux côtés, s'il eft néceffaire.

Ce Corps que j'appellerai Tribunal, eft le/confervateur des Loix & du pouvoir légiflatif. Il fert quelquefois à protéger le Souverain contre le Gouvernement; comme faifoient à Rome les Tribuns du peuple à quelquefois à foutenir le Gouvernement contre le Peuple, comme fait maintenant à Venife le Confeil de Dix, & quelquefois à maintenir l'équilibre de part & d'autre,

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