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en instituant les curies, avait en vue de contenir le sénat par le peuple et lepeuple par le sénat en dominant également sur tous. Il donna donc au peuple, par cette forme, toute l'autorité du nombre pour balancer celle de la puissance et des richesses, qu'il laissait aux patriciens. Mais, selon l'esprit de la monarchie, il laissa cependant plus d'avantage aux patriciens par l'influence de leurs cliens sur la pluralité des suffrages. Cette admirable institution des patrons et des cliens fut un chef-d'œuvre de politique et d'humanité, sans lequel le patriciat, si contraire à l'esprit de la république, n'eût pu subsister. Rome seule a eu l'honneur de donner au monde ce bel exemple, duquel il ne résulta jamais d'abus, et qui pourtant n'a jamais été suivi.

Cette même forme des curies ayant subsisté sous les rois jusqu'à Servius, et le règne du dernier Tarquin n'étant point compté pour légitime, cela

fit distinguer généralement les lois royales par le nom de leges curiata.

Sous la république, les curies, toujours bornées aux quatre tribus urbaines, et ne contenant plus que la populace de Rome, ne pouvaient convenir ni au sénat qui était à la tête des patriciens, ni aux tribuns qui, quoique plébéiens, étaient à la tête des citoyens aisés. Elles tombèrent donc dans le discrédit, et leur avilisment fut tel, que leurs trente licteurs assemblés faisaient ce que les comices par curie auraient dû faire.

La division par centuries était si favorable à l'aristocratie, qu'on ne voit pas d'abord comment le sénat ne l'emportait pas toujours dans les comices qui portaient ce nom, et par lesquels étaient élus les consuls, les censeurs et les autres magistrats curules. En effet, des cent quatre-vingt - treize centuries, qui formaient les six classes de tout le peuple romain, la première classe en comprenant quatre-vingt

dix-huit, et les voix ne se comptant que par centuries, cette seule première classe l'emportait en nombre de voix sur toutes les autres. Quand toutes ces centuries étaient d'accord, on ne continuait pas même à recueillir les suffrages: ce qu'avait décidé le plus petit nombre passait pour une décision dé la multitude; et l'on peut dire que, dans les comices par centuries, les affaires se réglaient à la pluralité des écus bien plus qu'à celle des voix.

Mais cette extrême autorité se tempérait par deux moyens premièrement, les tribuns pour l'ordinaire, et toujours un grand nombre de plébéiens, étant dans la classe des riches, balançaient le crédit des patriciens dans cette première classe.

Le second moyen consistait en ceci, qu'au lieu de faire d'abord voter les centuries selon leur ordre, ce qui aurait toujours fait commencer par la première, on en tirait une au sort, et

celle-là (1) procédait seule à l'élection; après quoi toutes les centuries, appelées un autre jour selon leur rang, répétaient la même élection, et la confirmaient ordinairement. On ôtait ainsi l'autorité de l'exemple au rang pour la donner au sort, selon le principe de la démocratie.

Il résulterait de cet usage un autre avantage encore; c'est que les citoyens de la campagne avaient le temps, entre les deux élections, de s'informer du mérite du candidat provisionnellement nommé, afin de ne donner leur voix qu'avec connaissance de cause. Mais, sous prétexte de célérité, l'on vint à bout d'abolir cet usage, et les deux élections se firent le même jour.

Les comices par tribus étaient pro

(1) Cette centurie; ainsi tirée au sort, s'appelait prærogativa, à cause qu'elle était la première à qui l'on demandait son suffrage; c'est de là qu'est venu le mot de prérogative.

prement le conseil du peuple romain. Ils ne se convoquaient que par les tribuns les tribuns y étaient élus et y passaient leurs plébiscites. Non-seulement le sénat n'y avait pas de rang, il n'avait pas même le droit d'y assister; et, forcés d'obéir à des lois sur lesquelles ils n'avaient pu voter, les sénateurs, à cet égard, étaient moins libres que les derniers citoyens. Cette injustice était tout-à-fait mal entendue, et suffisait seule pour invalider les décrets d'un corps où tous ses membres n'étaient pas admis. Quand tous les patriciens eussent assisté à ces comices selon le droit qu'ils en avaient comme citoyens, devenus alors simples particuliers, ils n'eussent guère influé sur une forme de suffrages qui se recueillaient par tête, et où le moindre prolétaire pouvait autant que le prince du sénat.

On voit donc qu'outre l'ordre qui résultait de ces diverses distributions pour le recueillement des suffrages

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