Page images
PDF
EPUB

Et, pour montrer sa belle voix,

Il ouvre un large bec, laisse tomber sa proie.

Le renard s'en saisit, et dit: Mon beau monsieur. Apprenez que tout flatteur

Vit aux dépens de celui qui l'écoute : Cette leçon vaut bien un fromage, sans doute.

Le corbeau, honteux et confus,

Jura, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendroit plus.

FABLE III.

La Grenouille qui se veut faire aussi grosse que le Bœuf.

UNE grenouille vit un bœuf

Qui lui sembla de belle taille.

Elle, qui n'étoit pas grosse en tout comme un œuf,
Envieuse, s'étend, et s'enfle, et se travaille

Pour égaler l'animal en grosseur;
Disant Regardez bien, ma sœur ;
Est-ce assez ? dites-moi; n'y suis-je point encore ?—
Nenni.--M'y voici done?-Point du tout.-My voilà?—
Vous n'en approchez point. La chétive pécore
S'enfla si bien qu'elle creva.

Le monde est plein de gens qui ne sont pas plus sages:
Tont bourgeois veut batir comme les grands seigneurs ;
Tout petit prince a des ambassadeurs ;
Tout marquis veut avoir des pages.

FABLE IV.

Les deux Malets.

DEUX mulets cheminoient, l'un d'avoine charge,
L'autre portant l'argent de la gabelle.

Celui ci, glorieux d'une charge si belle,
Neût voulu pour beaucoup en être soulage.

Il marchoit d'un pas relevé,

Et faisoit sonner sa sonnette;

Quand l'ennemi se présentant,
Comme il en vouloit à l'argent.

Sur le mulet du fise une troupe se jette,
Le saisit au frein, et l'arréte.

Le mulet, en se defendant,

Se sent percé de coups; il gémit, il soupire.
Est-ce done là, dit-il, ce qu'on m'avoit promis
Ce mulet qui me suit, du danger se retire;
Et moi, j'y tombe, et je péris!
Ami, lui dit son camarade,

Il n'est pas toujours bon d'avoir un haut emploi
Si tu n'avois servi qu'un meunier, comme mei,
Tu ne serois pas si malade.

FABLE V.

Le Loup et le Chien.

Us loup n'avoit que les os et la peau,

Tant les chiens faisoient bonne garde: Ce loup rencontre un dogue aussi puissant que beau, Gras, poli, qui s'étoit fourvoyé par mégarde.

L'attaquer, le mettre en quartiers,

Sire loup l'eût fait volontiers:
Mais il falloit livrer bataille;

Et le matin étoit de taille

A se défendre hardiment.

Le loup done l'aborde humblement,
Entre en propos, et lui fait compliment
Sur son embonpoint, qu'il admire.
Il ne tiendra qu'à vous, beau sire,
D'être aussi gras que moi, lui repartit le chien.
Quittez les bois, vous ferez bien:
Vos pareils y sont misérables,
Caneres, hères, et pauvres diables,
Dont la condition est de mourir de faim.
Car, quoi! rien d'assuré! point de franche lipée !

Tout à la pointe de l'épée!

Suivez-moi, vous aurez un bien meilleur destin.
Le loup reprit: Que me faudra-t-il faire ?
Presque rien, dit le chien: donner la chasse aux gens
Portant bâtons, et mendiants:

Flatter ceux du logis, à son maître complaire:
Moyennant quoi, votre salaire

Sera force reliefs de toutes les façons,

Os de poulets, os de pigeons, Sans parler de mainte caresse. Le loup déjà se forge une félicité

Qui le fait pleurer de tendresse.

Chemin faisant, il vit le cou du chien pelé.

Qu'est-ce là? lui dit-il. - Rien.-Quoi rien! - Peu de chose.-
Mais encor? Le collier dont je suis attache

De ce que vous voyez est peut-être la cause. —
Attaché! dit le loup: vous ne courez donc pas
Où vous voulez ? - Pas toujours; mais qu'importe ?-
Il importe si bien que de tous vos repas

Je ne veux en aucune sorte,

Et ne voudrais pas même à ce prix un trésor.
Cela dit, maître loup s'enfuit, et court encor.

FABLE VI.

La Genisse, la Chèvre et la Brebis, en société aver le Lion.

La génisse, la chèvre, et leur sœur la brebis,
Avec un fier lion, seigneur du voisinage,
Firent société, dit-on, au temps jadis,
Et mirent en commun le gain et le dommage.

[blocks in formation]

JUPITER dit un jour : Que tout ce qui respire
S'en vienne comparoître aux pieds de ma grandeur :
Si dans son composé quelqu'un trouve à redire,
Il peut le déclarer sans peur;

Je mettrai remède à la chose.

Venez, singe; parlez le premier, et pour cause :
Voyez ces animaux, faites comparaison

De leurs beautés avec les vôtres.

Êtes-vous satisfait? Moi! dit-il; pourquoi non?
N'ai-je pas quatre pieds aussi-bien que les autres?
Mon portrait jusqu'ici ne m'a rien reproché :
Mais pour mon frère l'ours, on ne l'a qu'ébauché ;
Jamais, s'il veut me croire, il ne se fera peindre.
L'ours venant là-dessus, on crut qu'il s'alloit plaindre.
Tant s'en faut de sa forme il se loua très fort;
Glosa sur l'éléphant, dit qu'on pourroit encor
Ajouter à sa queue, ôter à ses oreilles ;

Que c'étoit une masse informe et sans beauté.

L'éléphant étant écouté,

Tout sage qu'il étoit, dit des choses pareilles :

Il jugea qu'à son appétit

Dame baleine étoit trop grosse.
Dame fourmi trouva le ciron trop petit,
Se croyant, pour elle, un colosse.
Jupin les renvoya s'étant censurés tous,

Du reste, contents d'eux. Mais parmi les plus fous,
Notre espèce excella; car tout ce que nous sommes,
Lynx envers nos parcils, et taupes envers nous;
Nous nous pardonnons tout, et rien aux autres hommes:
On se voit d'un autre ceil qu'on ne voit son prochain.
Le fabricateur souverain

Nous créa besaciers tous de même manière,
Tant ceux du temps passé que du temps d'aujourd'hui :
Il fit pour nos défauts la poche de derrière,
Et celle de devant pour les défauts d'autrui.

FABLE VIII.

L'Ilirondelle et les petits Oiseaux.

UNE hirondelle, en ses voyages, Avoit beaucoup appris. Quiconque a beaucoup vu Peut avoir beaucoup retenu.

Celle-ci prévoyoit jusqu'aux moindres orages,

Et devant qu'ils fussent éclos,

Les annonçoit aux matelots.

Il arriva qu'au temps que la chanvre se sème
Elle vit un manant en couvrir maints sillons.
Ceci ne me plaît pas, dit-elle aux oisillons:
Je vous plains; ear, pour moi, dans ce péril extreme,
Je saurai m'éloigner, on vivre en quelque coin.
Voyez-vous cette main qui par les airs chemine?

Un jour viendra, qui n'est

pas loin,

Que ce qu'elle répand sera votre ruine.
De là naitront engins à vous envelopper,
Et lacets pour vous attraper.
Enfin mainte et mainte machine
Qui causera, dans la saison,
Votre mort ou votre prison:

Gare la cage ou le chaudron!
C'est pourquoi, leur dit l'hirondelle,
Mangez ce grain; et croyez-moi.
Les oiseaux se moquèrent d'elle:

Ils trouvoient aux champs trop de quoi.
Quand la chenevière fut verte,
L'hirondelle leur dit: Arrachez brin à brin
Ce qu'a produit ce maudit grain,
Ou soyez sûrs de votre perte.
Prophète de malheur ! babillarde! dit-on,
Le bel emploi que tu nous donnes!
Il nous faudroit mille personnes

Pour éplucher tout ce capton.
La chanvre etant tout-à-fait crue,
L'hirondelle ajouta : Ceci ne va pas bien;
Mauvaise graine est tôt venue.

Mais puisque jusqu'ici l'on ne m'a erue en rieu,
Dès que vous verrez que la terre
Sera couverte, et qu'à leurs blés
Les gens n'étant plus occupés
Feront aux oisillous la guerre ;
Quand reginglettes et réseaux
Attraperont petits oiseaux,

Ne volez plus de place en place,
Demeurez au logis, ou changez de climat:
Imitez le canard, la grue, et la bécasse.

Mais vous n'êtes pas en état

De passer, comme nous, les déserts et les ondes,
Ni d'aller chercher d'autres mondes:
C'est pourquoi vous n'avez qu'un parti qui soit sûr ;
C'est de vous renfermer aux trous de quelque mur.
Les oisillons, las de l'entendre,

Se mirent à jaser aussi confusément
Que faisoient les Troyens quand la pauvre Cassandre
Ouvroit la bouche seulement

Il en prit aux uns comme aux autres:

Maint oisillon se vit esclave retenu.

Nous n'écoutons d'instincts que ceux qui sont les nôtres, Et ne croyons le mal que quand il est venu.

FABLE IX.

Le Rat de ville et le Rat des champs.

AUTREFOIS le rat de ville
Invita le rat des champs,
D'une facon fort civile,
A des reliefs d'ortolans.

Sur un tapis de Turquie
Le couvert se trouva mis.
Je laisse à penser la vie
Que firent ces deux amis.
Le régal fut fort honnête ;
Rien ne manquoit au festin:
Mais quelqu'un troubla la fête,
Pendant qu'ils étoient en train.

A la porte de la salle

Ils entendirent du bruit:

Le rat de ville détale;

Son camarade le suit.

Le bruit cesse, on se retire:
Rats en campagne aussitôt :

Et le citadin de dire:
Achevons tout notre rot.

C'est assez, dit le rustique :
Demain vous viendrez chez moi
Ce n'est pas que je me pique
De tous vos festius de roi :

Mais rien ne vient m'interrompre
Je mange tout à loisir.

Adieu done. Fi du plaisir

Que la crainte peut corrompre !

FABLE X.

Le Loup et l'Agneau.

La raison du plus fort est toujours la meilleure : Nous l'allons montrer tout à l'heure.

Un agneau se désaltéroit

Dans le courant d'une onde pure.

Un loup survient à jeun, qui cherchoit aventure. Et que la faim en ces lieux attiroit.

Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage? Dit cet animal plein de rage:

Tu seras châtié de ta témérité.

Sire, répond l'agneau, que votre majesté

Ne se mette pas en colère;

Mais plutôt qu'elle considère
Que je me vas désaltérant
Dans le courant,

Plus de vingt pas au-dessous d'elle ;
Et que, par conséquent, en aucune façon,
Je ne puis troubler sa boisson.
Tu la troubles! reprit cette bête cruelle;
Et je sais que de moi tu médis, l'an passé.
Comment l'aurois-je fait si je n'étois pas né?
Reprit l'agneau; je tette encore ma mère. —
Si ce n'est toi, c'est done ton frère. -
Je n'en ai point. - C'est donc quelqu'un des tiens;
Car vous ne m'épargnez guère,

Vous, vos bergers, et vos chiens,
On me l'a dit : il faut que je me venge.
Là-dessus, au fond des forêts

Le loup l'emporte, et puis le mange,
Sans autre forme de procès

FABLE XI.

L'Homme et son Image.

POUR M. LE DUC DE LA ROCHEFOUCAULD.

Un homme, qui s'aimoit sans avoir de rivaux, Passoit dans son esprit pour le plus beau du monde: Il accusoit toujours les miroirs d'être faux, Vivant plus que content dans son erreur profonde. Afin de le guérir, le sort officieux

Présentoit partout à ses yeux

Les conseillers muets dont se servent nos dames:
Miroirs dans les logis, miroirs chez les marchands,
Miroirs aux poches des galants,

Miroirs aux ceintures des femmes.
Que fait notre Narcisse? Il se va confiner
Aux lieux les plus cachés qu'il peut s'imaginer,
N'osant plus des miroirs éprouver l'aventure.
Mais un canal, formé par une source pure,

Se trouve en ces lieux écartés :

Il s'y voit, il se fàche; et ses yeux irrités
Pensent apercevoir une chimère vaine.

Il fait tout ce qu'il peut pour éviter cette eau :

Mais quoi le canal est si beau,
Qu'il ne le quitte qu'avec peine.

On voit bien où je veux venir.

Je parle à tous; et cette erreur extrême Est un mal que chacun se plaît d'entretenir.

Notre ame, c'est cet homme amoureux de lui-même:

Tant de miroirs, ce sont les sottises d'autrui,
Miroirs, de nos défauts les peintres légitimes;

Et quant au canal, c'est celui
Que chacun sait, le Livre des Maximes.

Comme le Transilvain, le Ture et le Hongrois. Au lieu de deux, j'en ai rencontré trois :

Il est assez de cette marchandise. De nul d'eux n'est souvent la province conquise: Un quart voleur survient, qui les accorde net, Eu se saisissant du baudet.

FABLE XII.

Le Dragon à plusieurs têtes, et le Dragon à plusieurs queues.

Ux envoyé du grand-seigneur

Préféroit, dit l'histoire, un jour chez l'empereur,
Les forces de son maître à celles de l'empire.
Un Allemand se mit à dire :

Notre prince a des dépendants

Qui, de leur chef, sont si puissants,

Que chacun d'eux pourroit soudoyer une armée. Le chiaoux, homme de sens,

Lui dit: Je sais, par renommée, Ce que chaque électeur peut de monde fournir; Et cela me fait souvenir

D'une aventure étrange, et qui pourtant est vraie.

J'étois en un lieu sûr, lorsque je vis passer
Les cent têtes d'une hydre au travers d'une haie.
Mon sang commence à se glacer;
Et je crois qu'à moins on s'effraie.
Je n'en eus toutefois que la peur sans le mal:
Jamais le
de l'animal
corps

Ne put venir vers moi, ni trouver d'ouverture.

Je rêvois à cette aventure,

Quand un autre dragon, qui n'avoit qu'un seul chef, Et bien plus d'une queue, à passer se présente. Me voilà saisi, de rechef,

D'étonnement et d'épouvante.

Ce chef passe, et le corps, et chaque queue aussi :
Rien ne les empêcha; l'un fit chemin à l'autre.
Je soutiens qu'il en est ainsi
De votre empereur et du nôtre.

FABLE XIII.

Les Voleurs et l'Ane.

Por un âne enlevé deux voleurs se battoient : L'un vouloit le garder, l'autre le vouloit vendre. Tandis que coups de poing trottoient,

Et que nos champions songeoient à se défendre, Arrive un troisième larron

Qui saisit maître aliboron.

L'ane, c'est quelquefois une pauvre province : Les voleurs sont tel et tel prince,

[blocks in formation]

L'éloge d'un athlète, et, la chose essayée,
Il trouva son sujet plein de récits tout nus.
Les parents de l'athlète étoient geus inconnus ;
Son père, un bon bourgeois; lui, sans autre mérite:
Matière infertile et petite.

d'écrire

Le poète d'abord parla de son héros.
Après en avoir dit ce qu'il en pouvoit dire,
Il se jette à côté, se met sur le propos
De Castor et Pollux; ne manque pas
Que leur exemple étoit aux lutteurs glorieux;
Elève leurs combats, spécifiant les lieux
Où ces frères s'étoient signalés davantage :
Enfin, l'éloge de ces dieux

Faisoit les deux tiers de l'ouvrage.
L'athlète avoit promis d'en payer un talent:

Mais quand il le vit, le galant

N'en donna que le tiers ; et dit, fort franchement,
Que Castor et Pollux acquittassent le reste :
Faites-vous contenter par ce couple céleste.
Je vous veux traiter cependant :

Venez souper chez moi; nous ferons bonne vie :
Les conviés sont gens choisis,

Mes parents, mes meilleurs amis;
Soyez donc de la compagnie.

Simonide promit. Peut-être qu'il eut peur
De perdre, outre son dû, le gré de sa louange.
Il vient: l'on festine, l'on mange.
Chacun étant en belle humeur,

Un domestique accourt, l'avertit qu'à la porte
Deux hommes demandoient à le voir promptement.
Il sort de table; et la cohorte

N'en perd pas un seul coup de dent.

Ces deux hommes étoient les gémeaux de l'éloge. Tous deux lui rendent grâce ; et, pour prix de ses vers, Ils l'avertissent qu'il déloge,

Et que cette maison va tomber à l'envers.

La prédiction en fut vraie.

Un pilier manque ; et le plafonds,

Ne trouvant plus rien qui l'étaie, Tombe sur le festin, brise plats et flacons,

N'en fait pas moins aux échansons.

Ce ne fut pas le pis: car, pour rendre complète La vengeance due au poète,

Une poutre cassa les jambes à l'athlète,

Et renvoya les conviés

Pour la plupart estropiés.

La Renommée eut soin de publier l'affaire :
Chacun eria miracle. On doubla le salaire

Que méritoient les vers d'un homine aimé des dieux.
Il n'étoit fils de bonne mère

Qui, les payant à qui mieux mieux,
Pour ses ancêtres n'en fit faire.

Je reviens à mon texte et dis premièrement
Qu'on ne sauroit manquer de louer largement
Les dieux et leurs pareils; de plus, que Melpomene
Souvent, sans déroger, trafique de sa peine;
Enfin, qu'on doit tenir notre art en quelque prix.
Les grands se font honneur dès-lors qu'ils nous font grâce:
Jadis l'Olympe et le Parnasse
Étoient frères et bons amis.

FABLE XV.'

La Mort et le Malheureux.

UN malheureux appeloit tous les jours

La Mort à son secours.

O Mort! lui disoit il, que tu me sembles belle! Viens vite, viens finir ma fortune cruelle 1

La Mort crut, en venant, l'obliger en effet.
Elle frappe à sa porte, elle entre, elle se montre.
Que vois-je cria-t-il : ôtez-moi cet objet !

Qu'il est hideux ! que sa rencontre
Me cause d'horreur et d'effroi!

N'approche pas, 6 Mort! 6 Mort, retire-toi!

Mécénas fut un galant homme ;

Il a dit quelque part : Qu'on me rende impotent,
Cul-de-jatte, goutteux, manchot, pourvu qu'en somme
Je vive, c'est assez, je suis plus que content.
Ne viens jamais, û Mort! on t'en dit tout autant.

FABLE XVI.

La Mort et lo Bûcheron.

UN pauvre bûcheron, tout couvert de ramee, Sous le faix du fagot, aussi bien que des ans, Gemissant et courbé, marchoit à pas pesants, Et tachoit de gagner sa chaumine enfumée.

Enfin, n'en pouvant plus d'effort et de douleur,
Il met bas son fagot, il songe à son malheur.
Quel plaisir a-t-il cu depuis qu'il est au monde ?
En est-il un plus pauvre en la machine ronde ?
Point de pain quelquefois, et jamais de repos :
Sa femine, ses enfants, les soldats, les impôts,
Le créancier et la corvée,

Lui font d'un malheureux la peinture achevée.
Il appelle la Mort. Elle vient sans tarder,
Lui demande ce qu'il faut faire.
C'est, dit-il, afin de m'aider

A recharger ce bois; tu ne tarderas guére.

[merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors]

La vicille, à tout moment, de sa part emportoit
Un peu de poil noir qui restoit,

Afin que son amant en fût plus à sa guise.
La jeune saccageoit les poils blanes à son tour.
Toutes deux firent tant, que notre tête grise
Demeura sans cheveux, et se douta du tour.
Je vous rends, leur dit-il, mille grâces, les belles,
Qui m'avez si bien tondu :

J'ai plus gagné que perdu;
Car d'hymen point de nouvelles.

Celle que je prendrois voudroit qu'à sa façon
Je vécusse, et non à la mienne.

Il n'est tête chauve qui tienne :

Je vous suis obligé, belles, de la leçon.

« PreviousContinue »