LE BAILLY. (1758-1833.) Antoine-François Le Bailly naquit à Caen, et fut d'abord avocat. Comme tant d'autres, il quitta le barreau pour la littérature. Il débuta par un recueil de Fables, qu'il augmenta successivement. C'est à ce livre qu'il doit sa réputation. Son style n'a ni l'élégance ni la richesse de celui de Florian, mais il a plus de bonhomie, d'abandon et une simplicité plus vraie. Il a encore laissé des opéras, les Vies de quelques poëles dramatiques, plusieurs petits poëmes, des poésies fugitives, etc. Les Métamorphoses du Singe. Gille, histrion de foire, un jour, par aventure, Mon singe, au même instant, de chercher à s'y voir. << O le museau grotesque! ô la plate figure! S'écria-t-il, que je suis laid! Puissant maître des dieux, j'ose implorer tes grâces: Je te demande, au reste, un changement complet. » Sous ce nouvel habit mon drôle s'examine, Aime assez son plumage, et beaucoup son caquet; Mais il n'a pas tout vu: « Peste! la sotte mine Par bonheur en ce moment-là Le seigneur Jupiter était d'humeur à rire: Mais, las! il voit ses vilains pieds; A Jupiter derechef adresse une requête. Mais aussi plus d'autre prière ! Que je n'entende plus ton babil importun. >> La Chèvre et les Moutons. Sur la cime d'un mont pendant en précipice, L'abord tout hérissé de ronces, de buissons. Sentiers battus, fossés profonds, Rien ne l'arrête; elle saute, elle grimpe, Or, vous jugez comme elle broute. Un troupeau de moutons, apercevant d'en bas << Chers compagnons, suivez mes pas, Soit,» répond le plus jeune agneau; Et ce mot entraîna le reste du troupeau. Et nous monterons seuls aussi. » Bientôt de faire la culbute, Puis de grimper encor, puis de tomber toujours. Il fait donc un signe de tête A la chèvre aussitôt l'officieuse bête Accourt, guide sa marche au milieu des détours, Dupes de leur orgueil, descendre au noir rivage. Malheur au talent jeune encor, Lorsqu'il ne prend conseil que de sa seule audace. Il est plus sûr d'atteindre au sommet du Parnasse. LEGOUVÉ. (1764-18 12.) Gabriel-Marie-Jean-Baptiste Legouvé était fils d'un avocat célèbre de Paris. Il s'adonna tout entier aux lettres. Ses tragédies, la Mort d'Abel, Epicharis et Néron, et la mort de Henri IV, eurent du succès. I publia d'autres poëmes; la Sépulture, les Souvenirs, la Mélancolie, le Mérite des femmes. Ce dernier, dans lequel il se propose de Célébrer des humains la plus belle moitié, est une peinture gracieuse des charmes, des vertus, du dévouement des femmes. C'est le plus connu de ses ouvrages. On a dit qu'en combattant pour les Grâces, il avait eu l'avantage d'en être souvent inspiré. Les dernières années de la vie de Legouvé furent tristes. Après la mort de sa femme, qu'il adorait, sa santé s'affaiblit, sa raison s'altéra, son humeur devint sauvage. Une chute qu'il fit dans un fossé l'acheva: il termina sa pénible existence à l'âge de quarante-huit ans, La Tendresse maternelle. Avec notre existence De la femme pour nous le dévoûment commence. |