Vois llion fumant et chante sur sa cendre; Suis-les au temple, unis ta voix à leurs concerts; J'accours soudain ; je vole, et crie: Ah! malheureux ! Ils m'osaient dédaigner... ton erreur est pareille. AGAMEMNON. Sa raison l'abandonne... hélas ! Troie embrasée ARNAULT. (1766-1834.) Antoine-Vincent Arnault, né à Paris, débuta à vingt-cinq ans dans la littérature par la tragédie de Marius à Minturnes, qui eut du succes. Sous le consulat, il fut nommé membre de l'Institut et secrétaire général de l'Université. Il est mort secrétaire de l'Académie française. Outre Marius, Arnault a donné plusieurs autres tragédies, faiblemen écrites; les plus connues sont Germanicus et les Vénitiens. Ses fables valent mieux que ses tragédies. Au lieu de s'efforcer d'imiter la manière de La Fontaine, qui est inimitable, il a donné à la fable une nouvelle forme. Il s'occupe peu de l'action; il vise surtout à l'effet final, et termine par une pensée piquante qui fait ressembler la plupart de ses apologues à des épigrammes ou à de petites satires. La Feuille. De ta tige détachée, Où vas-tu?-Je n'en sais rien ! Qui seul était mon soutien; Sans me plaindre ou m'effrayer; Je vais où va toute chose, Où va la feuille de rose, Et la feuille de laurier. Le Colimaçon. Sans ami, comme sans famille, Au signal du moindre danger; Pour faire à son prochain les cornes; Par les traces les plus impures; Et celle du colimaçon. L'Ours, le Sansonnet, le Singe et le Serpent. Naguère un ours encor sauvage, Ours sans esprit et sans usage, Mais non pas sans ambition, Disait à ses amis: « A la cour du lion Apprenez-moi comme l'on entre. » Le singe dit : « C'est en sautant. » Le sansonnet: « C'est en chantant. » << Ou bien, dit le serpent, en marchant sur le ventre. »> Le Chêne et les Buissons, Les buissons, indignés qu'en une année ou deux Se récriaient contre l'audace De cet aventurier qui, comme un champignon, De son robuste tronc à ses rameaux nombreux, Et l'arbre comme on en voit tant De protégé qu'il fut, le voilà protecteur, Vont dormir en paix sous son ombre; L'abeille dans son sein vient déposer son miel, Et l'aigle suspendre son aire A l'un des mille bras dont il perce le ciel, Cybèle aussi n'a pas de nourrissons, De l'orme le plus fort au genêt le plus mince, Qui des forêts en lui ne respectent le prince: Tout l'admire aujourd'hui, tout, hormis les buissons. « L'orgueilleux! disent-ils, il ne se souvient guères De notre ancienne égalité; Enflé de sa prospérité, A-t-il donc oublié que les arbres sont frères ? Si nous naissons égaux, repart avec bonté L'arbre de Jupiter, dans la même mesure Nous ne végétons pas ; et ce tort, je vous jure, Est l'ouvrage de la nature, Et non pas de ma volonté. Le chêne vers les cieux portant un front superbe, Ne font qu'obéir à sa loi. Vous la voulez changer; ce n'est pas mon affaire; Je ne dois pas, en bonne foi, Me rapetisser pour vous plaire. Mes frères, tâchez donc de grandir comme moi. »> 1 Vent d'est. 2 Cybele, prise ici pour la terre, dont elle était la déesse. |