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taille de Marengo, mort de Desaix, son dernier mot fut un regret pour la gloire.

La victoire de Marengo fut suprême et définitive. Indépendamment de 15,000 hommes tués ou blessés ou prisonniers, de la perte de douze drapeaux, de 30 canons, l'Autriche se vit arracher une deuxième fois les riches contrées d'Italie, blanchies des ossements de ses soldats pendant huit ans de luttes.

La bataille de Marengo, résultat d'une des plus sublimes conceptions stratégiques, frappa l'Europe d'étonnement et d'admiration; en France elle provoqua un sentiment d'enthousiasme impossible à décrire, et fut célébrée dans toutes les villes et dans tous les villages de la république.

Bonaparte, après avoir confié à Masséna le héros de Zurich et de Gênes, le commandement en chef de son armée, revint à Paris le 12 juillet au milieu de la nuit. Mais à peine son arrivée futelle connue, que, le lendemain, les habitans de la capitale se portèrent en foule aux Tuileries; les boutiques et les ateliers se fermèrent, et ce jour fut un jour de fête et d'allégresse universelle: le soir, toutes les maisons furent illuminées.

La victoire de Marengo eut encore pour résultat la conclusion de la paix générale. Il est juste d'ajouter que les victoires d'Hocstedt et d'Hohenlinden par Moreau, les victoires de Brune en

Italie, les succès de l'armée Gallo-Batave, sous les ordres d'Augereau, et ceux de Macdonald à l'armée des grisons, contribuèrent puissamment à ce résultat. La paix fut signée à Lunéville, le 9 février 1801, par les plénipotentiaires des puissances étrangères. La France était représentée par Joseph Bonaparte (1).

(1) JOSEPH BONAPARTE, roi de Naples et d'Espagne, sous l'empire, aujourd'hui comte de Survilliers, est peut-être l'homme qui a honoré le plus sa haute position par ses vertus.

Élevé par une fortune inouïe de la condition de simple citoyen à la majesté de roi, Joseph Bonaparte conserva, au sein des grandeurs, cette noble simplicité de mœurs, cette aménité d'esprit et de cœur que rien ne peut altérer; et dans son règne, de trop courte durée, chacun de ses jours fut marqué par des actes de bienfaisance et de justice.

Esquissons rapidement la biographie de ce prince justement honoré.

BONAPARTE (Joseph), roi de Naples et roi d'Espagne, est né à Corte le 7 janvier 1768; c'est l'aîné de la famille. Joseph fit d'excellentes études au collège d'Autun. Les événements politiques qui agitèrent l'Europe vers la fin du xvin siècle, exercèrent une grande influence sur les destinées de la famille Bonaparte Joseph vint à Paris, où la fortune de Napoléon lui ouvrit une vaste carrière (1796). Il fut bientôt élu député aux Cinq-Cents. En 1797 il fut envoyé à Parme, et quelque temps après à Rome en qualité d'ambassadeur. Ici Joseph Bonaparte donna des preuves d'une haute capacité politique, et déploya une fermeté active et intelligente, qui lui valut les éloges du Directoire. Assailli dans le palais Corsini, par une multitude exaspérée, Joseph se présenta courageusement à ces forcenés

Quant au vainqueur de Marengo, la France lui témoigna sa reconnaissance en le nommant consul à vie c'était le premier pas fait vers le trône.

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pour les appaiser... Le général Duphot était à ses côtés; il tomba frappé mortellement... L'ambassadeur quitta Rome, et quelque temps après, les états du pape, envahis par les soldats français, furent érigés en république.

Joseph concourut à régulariser l'heureux événement du 18 brumaire, qui devait placer la France sous les auspices du génie et de la fortune de Bonaparte. A cette époque, il fut envoyé à Lunéville en qualité de ministre plénipotentiaire, et signa, en 1801, la paix d'Amiens.

En 1804 il fut créé prince français et grand électeur; il commandait au camp de Boulogne le 4o régiment de ligne.

Bientôt la couronne d'Italie lui fut offerte, mais Joseph refusa cette couronne par un sentiment digne d'être apprécié par l'histoire.

En 1805, pendant la campagne d'Autriche, Joseph présida le sénat et dirigea le gouvernement impérial. Le trône de Naples fut la récompense des services qu'il avait rendus à la Erance. Ce prince, après avoir conquis son royaume, s'appliqua à y faire régner une bonne administration, de sages lois, les sciences et les arts. Les peuples du royaume de Naples bénirent son avènement ; ils conservent encore le souvenir des bienfaits qu'il répandit sur eux.

Après la paix de Tilsitt, Joseph Bonaparte échangea sa couronne de Naples pour celle des Espagnes: on sait que ce ne fut pas l'ambition du prince qui le porta à régner sur l'Espagne, mais l'exigence de la politique.

Joseph vint prendre possession de son trône au milieu des

Zurich et Hohenlinden, ces deux batailles rivales de Marengo, ont été placées à la suite de cette célèbre journée.

RAPPORT DU GÉNÉRAL EN CHEF ALEXANDRE BERTHIER. Le 25 prairial an viii.

BATAILLE DE MARENGO.

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S'emparer de Milan, opérer la jonction avec

circonstances les plus difficiles; le nouveau souverain fit ses efforts pour se concilier les esprits des peuples par de sages et bienfaisantes institutions, et il aurait infailliblement réussi dans cette noble entreprise, si l'or des Anglais n'eût soufflé, sur cette malheureuse contrée, le feu de la guerre et des discordes civiles.

Les désastres de Moscou eurent aussi une influence funeste sur la destinée du trône d'Espagne, et après les retraits successifs de troupes que l'empereur fit dans la Péninsule pour soutenir sa fortune chancelante au Nord, Joseph fut obligé d'évacuer son royaume.

En 1814, il fut chargé de veiller sur le roi de Rome, et nommé commandant-général de la garde nationale.

Après l'abdication de l'empereur, Joseph se retira en Suisse, et y resta jusqu'au retour de l'île d'Elbe. La désastreuse journée de Waterloo l'obligea une seconde fois à partir pour l'exil, et depuis cette époque, ce noble prince erre proscrit sans avoir revu la France qu'il a tant aimée, et après avoir vu tomber tour à tour plusieurs membres de la famille impériale. Ah! qu'il se console de cet ostracisme politique!.... Si la fortune l'a privé du trône, il n'a cessé de régner dans le souvenir des peuples, et surtout dans celui des Français.

la division du général Moncey, couper les derrières de l'ennemi à Brescia, Orsinovi, Marcaria, Plaisance, prendre ses immenses magasins, fermer ses communications, enlever ses dépôts, ses malades et ses parcs, tels étaient les mouvements qui avaient été ordonnés à des partis, tandis que notre armée observait celle de l'ennemi, l'inquiétait sur le Pô et effectuait le passage de ce fleuve devant Stradella; l'activité de nos mouvemens nous en avait donné l'initiative; le génie de Bonaparte en a profité.

» L'ennemi battu à Montébello allait être renforcé successivement des troupes aux ordres de messieurs les généraux Elsnitz et Bellegarde. J'étais instruit, d'un autre côté, que M. de Mélas avait rassemblé toutes ses forces à Alexandrie. Il était important de prévenir ses mouvemens ultérieurs. Tout fut disposé pour atteindre ce but.

>> L'ennemi pouvait ou se porter sur Gênes et de là pénétrer dans la Toscane, ou passer le Pô et le Tesin pour gagner Mantoue, ou se faire jour par la rive droite du Pô, en combattant notre armée, ou enfin se renfermer dans Turin.

>> Les divisions Chabran et Lapoype reçoivent l'ordre de garder le Pô; le détachement laissé à Yrvée observe l'Orci; le corps du général Moncey occupe Plaisance, observe Bobbic, garde le Tesin, la Sesia et l'Oglio depuis le confluent de cette

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