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Dans les emplois de Mars fervant la République, Par un coup imprévû vit fes jours emportés:

Le troisième tomba d'un arbre

Que lui-même vouloit enter:

Et pleurés du Vieillard, il grava fur leur marbre, Ce que je viens de raconter.

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L'INDIGO, dont on fe fert pour, teindre en bleu, fe tire d'une plante, qui porte une fleur femblable à celle des chardons & une femence comme celle du fœnugrec Etant une fois femée elle dure trois années entières. Car au bout de la prémière année, on la cou pe à un pied de terre, on arrache toutes fes feuilles, & on les fait fécher au foleil, pendant un jour. Enfuite on les jette dans une Cîterne pleine d'eau nette, & un peu falée: On les y laiffe 4 ou 5 jours, avec de groffes pierres par-deffus, & on a foin de remuër l'eau de tems en tems. Après cela on fait couler cette eau dans une autre Citerne, & on l'y laiffe une nuit entière. Deux hommes entrent le lendemain dans cette feconde Citerne; ils travaillent à force de bras, comme s'ils battoient du beurre, jusqu'à ce que l'eau s'épaisfiffe, & que la Subftance de l'indigo tombe au fonds. Ils paffent & filtrent cette eau, à travers une toile fine, qui retient tout l'IndiF 3

go.

go. Ils le font fêcher au foleil, & c'eft ainfi qu'ils amaffent le meilleur indigo. L'année fuivante, la plante pouffe de nouvelles feuilles; on les coupe, & on procède comme l'année précédente: mais l'Indigo qu'on en tire n'eft pas plus fort que l'Indigo fauvage. La troifième année, la plante diminue encore, & les étrangers n'estiment pas l'Indigo qu'on en tire. Il n'y a que ceux du pays, qui s'en fervent pour faire les Teintures.

Les meilleures marques du bon Indigo font la fêchereffe, & la légèreté qui le font nager fur l'eau. Quand on le met fur des charbons de feu, il doit faire une fumée violette, & ne laiffer que fort peu de cendres. Les Marchands doivent prendre garde, qu'il ne foit pas humide, quand ils l'achetent; car en moins de huit jours, ils en perdroient plus de trois livres fur dix. Pour le bien éprouver, il faut en caffer quelques morceaux, & les regarder au foleil. Car fi l'on remarque quelque-chofe de brillant au milieu, c'eft figne qu'il y a du fable parmi, dont quelques uns fe fervent pour le falfifier, & le rendre plus péfant.

§. LXV.

Chiens de Chrétiens, & Chiens des Chrétiens.

LES

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ES Turcs apellent ordinairement les Chrétiens des Chiens; ce nom fauva autrefois tous ceux qui étoient dans cet Empire, en voi

ci

ci l'Hiftoire. Mahomet III. Empereur des Turcs étant irrité contre les Chrétiens, jura avec ferment, qu'il feroit mourir tous les Chiens de Chrétiens, tant Ambaffadeurs qu'autres, de haute & de baffe qualité, qui fe trouveroient dans fon Empire. Son Grand-Vifir prévoyant les conféquences d'uné cruauté fi barbare & fi peu politique, s'oppofa par fes remontrances & par fes prières à une telle réfolution: mais voyant que l'Empereur ne vouloit point chan ger de deffein, il eut recours au Moufti, qui, pour fatisfaire à la confcience de fa Hauteffe engagée par un ferment, lui confeilla de faire. mourir tous les Chiens des Chrétiens, puisqu'il avoit juré la mort de tous les chiens de Chrétiens. L'exécution s'en fit avec pompe fur ces bêtes, que les Chrétiens apportèrent de toutes parts. Peut-être les accompagnèrent-ils de quelque fomme d'argent pour le Moufti, le Vifir & l'Empereur même; car l'argent eft un grand mobile dans ce pays-là.

LE

§. LXVI.

Du Chameau.

E CHAMEAU eft un animal fort haut, mais en même tems fort doux & fort docile, qui nait en Afrique & en Afie. Il y en a de deux efpèces, ceux qu'on apelle proprement chaineaux, & ceux qu'on apelle dromadaires. Les chameaux ont une boffe de chair fur le dos; ils font gros & grands; its marchent à grands

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pas, mais rudement, & font environ dix bonnes lieues par jour, chargés de leur charge, qui fera de fix, fept, jusqu'à huit cens livres. Pour les Dromadaires ils ont deux boffes de chair fur le dos, qui font comme une felle naturelle. Ils font plus petits, plus grêles & plus légers que les chameaux, & ne fervent guères qu'à porter des hommes. Ils ont un bon trot, affez doux, & font facilement quarante lieues par jour. Du refte ils font femblables aux chameaux. Ils ont tous deux les oreilles & la queue courte, le pied fourchu & mol comme une éponge, le cou long; l'un & l'autre s'agenouillent pour être chargés ou déchargés, puis fe rélévent quand on veut. Ils foufrent facilement la foif, pouvant dans un besoin être cinq jours faus boire; toute-fois plus les chales dromadaires.

meaux que

Le Chameau s'aprivoife & s'inftruit facilement. A peine a-t-il vû le jour qu'on le fait coucher fur le ventre. On le tient dans cette pófture 15 ou 20 jours, lui donnant du lait peu à la fois, pour l'accoutumer à boire peu, & à fe baiffer quand il s'agit de le charger ou de le décharger, & il devient très-docile.

§. LXVII.

Contre les* Faifeurs d'Horoscopes.

Sur

rutateurs des chofes futures,

Curieux des fécrèts divins,

Ceux qui prédisent ce qui doit arriver à quelqu'un.

Ne

UN

vie

Ne confultez plus les Devins,
Pour apprendre vos avantures.
L'art ett faux & pernicieux,

Qui dans les grands chifres des cieux,
Croit découvrir nos deftinées.

Dieu feul, comme Roi des humains,
Tient le compte de nos années,

Et le destin du monde est l'oeuvre de ses mains.

§. LXVIII.

Hiftoire d'un Somnambule.

N Somnambule eft une perfonne, qui fait en dormant les actions ordinaires de la que l'on fait étant éveillé.

Voici ce qu'un François raconte à ce fujet, touchant un Italien attaqué de cette maladie.

Etant allé voir un de mes amis à la campagne, j'y trouvai un Gentilhomme Italien, nommé Monfignor Agostino Fofari, qui étòft somnambule. Il ne paroiffoit pas avoir plus de trente ans, homme fec, noir, d'une mélancolie trèsenfoncée, & d'un efprit froid, mais pénétrant, & capable des fciences les plus abftraites. Les accès de fon déréglement le prenoient d'ordinaire dans le décours de la Lune, & plus fortement durant l'Automne & l'Hiver que pendant le Printems & l'Eté. J'avois une curiofité étrange de voir ce que l'on en racontoit, & j'étois convenu avec fon valet de chambre, qui m'en difoit des

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