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res, demeurant dans le païs de Caux, qui étoient en réputation d'avoir d'excellens remèdes. Ces Meffieurs prirent un foin d'autant plus grand de fa perfonne, que les familles étoient amies depuis long tems. Ils employèrent fi heureufement toute l'adreffe de leur art, qu'en fix femaines de tems Civille fut rétabli dans un état qu'on pouvoit apeller de fanté. Il ne parut alors lui reiter d'incommodité que celle d'être un peu fourd, & de ne pouvoir fe fervir du petit doigt de la main droite, dont le tendon avoit été coupé, par la même balle de moufquet qui avoit fait la grande bleffure; deforte qu'il fut capable de rentrer dans le fervice, & qu'il effuya depuis bien de nouveaux coups & bien des fatigues. Mais la plaie de la mâchoire fe rouvrant de tems en tems, il fe formoit* des apoftumes qui l'affligeoient beaucoup, & fouvent il s'eft vû malade à l'extrémité.

Le Roi Henri III ayant chaffé les Proteftans du Royaume en 1585, Civille fe retira en Angleterre, & l'année fuivante s'étant mis entre les mains de deux fameux Médecins qu'il y rencontra, leurs foins eurent de fi heureux fuccès qu'il fut bien guèri. Il écrivit lui-même fon hiftoire l'an 1606, âgé de plus de 70 ans, 44 ans après fa bleffure; & c'eft de cette hiftoire que l'on a tiré le préfent extrait. Ce rare évènement a été raporté par plusieurs Hiftoriens célèbres, mais toujours avec diverfes fautes ou omiffions.

L 2

L'Ecrit

Il fortit auffi de tems en tems des os de fa plaie.

L'Ecrit qui eft entre les mains de Mr. de Sicqueville a une circonftarce qu'il ne faut pas oublier, Ceft que la Reine Elifabeth ayant ouï parler de lui, fouhaita de le voir, & de lui entendre raconter fes avantures de fa bouche, après quoi elle lui fit préfent d'un diamant & de fon portrait.

Mr. d'Aubigné en dit auffi une chofe, laquelle je ne vois pas qu'on puiffe refufer créance, parce qu'il parle en témoin oculaire. Je l'ai vu, dit-il, aux affemblées nationales Député de Normandie, quarante deux ans après sa. bleffure, & j'obfervois que quand nous fignions les refultats, il mettoit toujours, François de Civille, trois fois mort, trois fois enterré, & trois fois, par la grace de Dieu, reffufcité. Quel ques Miniftres contre mon opinion, ont voulu le faire défifter de cette curiofité, mais ils n'ont pûs obtenir cela de lui.

Civille a été marié deux fois, l'une & l'autre depuis fa dernière réfurrection. 11 n'eut point d'enfans de fa prémière femme, mais il en eut plufieurs de la feconde. Il y avoit en 1698 deux de fes arriere-petite-filles en Angleterre; dont l'une étoit femme de M. de Sicqueville, dont je viens de parler, & l'au tre avoit époufé un Gentilhomme Anglois nommé Sandham.

§. VIII.

Je

§. VIII.

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caufe aux mortels bien des maux;

A ma tête eft un des métaux.

Avec mes cinq lettres dernières
Je rends des fons mélodieux;
Et qui n'a pas les trois dernières
Ne peut fe fervir de les yeux.

Le mot est Orgueil. On y trouve Or, Orgue, eil ou Oeil,

§. IX.

Modeftie de l'Electeur FREDERIC de Saxe.

APRE's la mort de l'Empereur Maximilien,

on vit naitre de puiffantes brigues, de la part de ceux qui prétendoient à l'Empire. Les deux plus confidérables concurrens furent François I. & Charles-quint. Les Electeurs, pour mettre fin à ces conteftations, réfolurent de les exclure tous deux comme étrangers, & de mettre la Couronne Impêriale fur la tête d'un homme de leur Nation, & du nombre des Electeurs. Ils choifirent donc, d'une commune voix, Frédéric de Saxe, furnommé le Sage,, qui demanda deux jours pour se déterminer, & au troisième il remercia les Electeurs avec beaucoup de modeftie, en leur répréfentant qu'à l'âge où il étoit, il ne fe fentoit pas affez de force pour foutenir un fi grand poids. Toutes les remontrances qu'on lui fit n'ayant pû vaincre L 3.

fa

fa résistance, les Electeurs le prièrent de nommer la perfonne qu'il jugeroit en çonfcience la plus propre, l'affurant qu'ils s'en raporteroient à fon avis. Frédéric refufa long-tems de le faire, mais enfin forcé par les vives inftances des Electeurs, il se déclara pour le Roi Catholique,

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§. X.

Des Papillons éphémères.

LYA de certains jours en Mai & en Août, où après une pluie douce, on voit éclore, ou paroître tout d'un coup une multitude innombrable de papillons blancs qui vivent peu de tems, & qu'on apelle pour cette raison éphémères, ou papillons d'un jour. Ils cherchent l'eau, parce qu'ils y dépofent leurs œufs. Ils fe précipitent fur la furface du vivier ou de la rivière, de manière à la couvrir en entier. Ils furnagent en s'agitant, & s'y foutenant fur les plumes de leurs queues, qui reffemblent affez aux nageoires des poiffons. Les carpes & tous les habitans des eaux, accourent dans. l'endroit où cette manne tombe. Ils s'en raffafient, & les pêcheurs remarquent qu'après la chute de ces papillons, le poiffon eft plus gras & plus paifible; qu'il ne court ni ne s'agite, n'ayant presque aucun befoin de chercher à vivre durant cinq ou fix femaines. Les vermiffeaux qui fortiront des œufs précipités au fond de l'eau, fe convertiront en chryfali

des,

des, puis en papillons, pour être la provifion d'une autre faifon.

§. XI.

De la Ville de BERLIN.

BERLIN, fur la rivière de Sprée, ville d'Allemagne, dans la Marche de Brandebourg, eft grande, belle, bien bâtie, & eft la capitale des Etats du Markgrave de Brandebourg, Roi de Pruffe, qui y fait fa résidence ordinaire. Elle fut bâtie par Albert l'Ours, de la Maison d'Anhalt, en l'an 1142. Jean, dit le Prudent, la fit fortifier en 1222. La rivière la traverfe, & la divife en deux parties, dont l'une a le nom de Berlin, & l'autre celui de Cöln ou Cologne, L'Electeur Joachim II. bâtit en 1540. une partie du château, l'autre partie y a été ajoûtée en 1595, par Jean George, & dans la fuite par Joachim Frédéric. L'Electeur Frédéric-Guillaume l'aggrandit d'une troifième partie, qu'il fit nommer Dorothée-Stad, du nom de la Princeffe Dorothée de Holftein-Glücksbourg fa feconde femme. Le Palais du Prince, bâti de neuf par les Rois de Pruffe Frédéric, & Frédéric Guillaume, diverses grandes places, des maifons régulières, & de belles rues à la moder ne, contribuent à rendre cette ville très-agréable. Dans le Palais fe trouve 1. la Bibliothè que Royale dont tous les livres font reliés en maroquin de levant & dorés fur le dos, On y a ajoûté la Bibliothèque de M. Spanheim: L 4

2. La

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