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s'interrogeoit lui-même tous les foirs; & que s'adreffant à fon ame, il lui demandoit compte de tout ce qui s'étoit paffé de fa connoiffance pendant la journée: quotidie, dit-il, apud me cauJam dico: enfuite quand il avoit connu fes fautes par cet examen, il ne fe les pardonnoit qu'à condition qu'il n'y retourneroit plus, fe prononçant à lui-même, en forme de jugement, ces propres termes: Vide ne iftud facias, nunc tibi ignofco. Ceux qui gardent cette méthode font affûrément ceux qui font le moins de fautes dans le commerce du monde.

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§. XCVII.

De l'Ananas.

'ANANAS eft un fruit des Indes, de la groffeur d'un mélon, & d'un goût fucré. Quand les Plantes ont produit leurs fruits, elles pouffent de petits œilletons ou rejettons, qu'on arrache & replante dans de petits pots, pour faire de nouvelles plantes; ayant foin à mesure qu'elles grof fiffent de les remettre dans de plus grands pots. Mais les meilleures plantes proviennent des cou-. ronnes, qui font fur les fruits, lesquelles il faut tordre de deffus le fruit fans les couper. Il fautbferver de renouveller de tems en tems la terre des pots, parce qu'elle s'épuife, & que certe plante n'à guères de racines, les renouvellarr aifément.

Les Ananas viennent auffi en Europe, quoi qu'avec plus de foins & de peines. Il y a quel

ques

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ques années que le Roi de France donna à fon Jardinier des œillerons d'ananas, & lui en recommanda la culture, quoiqu'ils fuffent presque fèchés & fans racines.

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Le cœur en étoit bon:

ils reprirent. Le fruit qui en provint ne put parvenir à fa maturité. Mais deux oeilletons fauvés de la pourriture, & rifqués de nouveau, donnèrent en 1733 deux fruits d'une beauté, qui artira bien des curieux. L'affiduité de la culture & une Autonne favorable les amenèrent à une parfaite maturité. Le Roi lui-même fit l'effai d'un de ces fruits, le 28 Décembre & le trouva très-bon. Toutes les perfonnes à qui Sa Majesté jugea à propos d'envoyer une portion de ces fruits pour confulter les différens goûts, trouvèrent unanimement ces ananas très-mûrs, d'une chair douce & extrêmement fondante, relevée par une pointe d'acide, & accompagnée d'un parfum auffi agréable que celui de la fraife.

§. XCVIII.

Crainte disfipée.

L'ECLIPSE de la Lune fe fait, lorsque la Terre fe trouvant entre elle & le Soleil, empé che qu'elle n'en reçoive la lumière.

PERICLE'S, Capitaine Athénien étant prêt de partir avec une armée navale pour aller afiéger Epidaure, il fe fit une éclipfe de Soleil, qui fut caufe que tous fes Soldats, & particulièrement le Pilote de fa Galère, crurent que c'étoit un mauvais préfage. Periclès voyant ce Pilote fi

effrayé,

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effrayé, étendit fon manteau, & lui en couvrit les yeux, puis lui demanda fi cela lui fembloit un mauvais préfage. Le Pilote répondit que non: „Hé bien, lui dit Périclès, il n'y a point „, d'autre différence entre ceci & ce qui vous fait tant de peur,' fi non que le corps qui fait ces ténèbrès eft plus grand que mon manteau qui vous couvre les yeux.,, Cette remontrance encouragea le Pilote en lui ôtant fa peur.

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§. XCIX.

L'Art & la Nature doivent être d'accord.

UN Capitaine de Dragons dans les

troupes de Saxe, racontoit un jour à un Médecin, homme de grand fens, que dans la Compagnie de ce Capitaine, il y avoit un Chirurgien de peu de conduite, mais qui avoit la main fi fùre, qu'il venoit à bout de guérir toutes fortes de plaies, pourvû qu'il les eût bandées, fouvent avec la dernière négligence. Au contraire le ChirurgienMajor du même Régiment, qui étoit habile, judicieux & expérimenté, n'ofoit rien toucher; car il arrivoit que tout ce qu'il touchoit empiroit ou réuffiffoit mal. Comme il en eut découvert la caufe, il fe contenta dans la fuite d'ordonner ce qu'il faloit faire pour la guérifon des bleffés, fans les toucher lui-même: Et l'on a remarqué que les ayant fait panfer par d'autres, en fuivant les ordres, tout réuffiffoit à merveilles.

Cette hiftoire, qui vient de bonne main, nous fait voir les merveilles ou les fingularités de Tome II.

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la Nature & de l'Art; & que l'Art le plus confommé a befoin d'être fécondé par la Nature.

J. C.

REFLEXIONS fur l'Innocence.
Fille du Ciel, pure innocence,

Azile contre tous nos maux,
Vrai centre du parfait repos,
Heureux celui dont la conftance,
Vous confervant dans l'abondance,
Ne vous perd point dans les travaux
D'une longue & trifte indigence!

Egal dans l'un & l'autre fort,.

Soutenu d'un espoir que rien ne peut éteindre,

Il attend l'infaillible mort,

Sans la défirer ni la craindre.

Heureux de qui l'efprit à la fin rebuté

De l'impérieux efclavage,

Du monde & de fa vanité,
Etablit fa félicité,

Dans un immortel héritage;
Et fe garantit du naufrage,
Qu'on fait pour une éternité.

*

AMUSE.

A MUSE MENS

PHILOLOGIQUES.

SECONDE CENTURIE.

§. I.

De l'Origine de l'Imprimerie.

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CE FUT vers le milieu du quinzième fiècle que l'admirable invention de l'imprimerie fut découverte, & qui changea la face de la focieté par les lumières qu'elle y répandit.

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Perfonne n'a mieux fu, ni mieux débrouillé l'histoire de cette heureufe découverte que le célèbre Trithème, qui s'étoit fouvent entre tenu fur ce fujet avec Pierre Schaeffer de Gernsheim, affocié des deux prémiers inventeurs, & celui fans l'industrie duquel le nouveau projet feroit rentré dans le néant. En nous apuyant principalement fur fon témoignage & fur l'origine de l'imprimerie, raportée dans le fecond tome de fes annales de l'abaye d'Hirfauge, on douter que Jean Guttemberg * de Ma

ne peut

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* Il fe nommoit auffi Gensfleisch & Zumjungen.

yence

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