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L'AUTRE ASPASIE.*

A MADAME DE L'ES...

La voyez-vous cette belle ASPASIE

Qui vous sourit d'un air tant gracieux?
Point ne croyez tenter sa fantaisie :
Son cœur dément ce que disent ses yeux.

En la voyant j'aimai cette ASPASIE :
Sans peine, las! elle sut m'enflammer.
Ses doux regards, sa douce courtoisie,
Tout elle enfin m'invitait à l'aimer.

Voilà qu'un jour seul avec ASPASIE
A ses genoux me jetai tout tremblant :
Entre mes mains je pris sa main jolie,
Puis la posai sur mon cœur palpitant.

Et je lui dis : —«< Toute belle ASPASIE,
« Ah! prends pitié de mon tendre souci;
« Accorde-moi, ô ma tant douce amie,
<< Le don charmant d'amoureuse merci

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Le croirez-vous? cette même ASPASIE,

Si prévenante, et d'accueil si flatteur-:
« Toi, réclamer ma douce fantaisie !
« Ce répond-elle avec un ris moqueur.

<< Brûle d'amour ; languis pour ASPASIE : « Pour toi, chétif, quel plus heureux destin! Mais souviens-toi que ton ame asservie << N'en obtiendra que froideur et dédain —».

Oncques depuis la farouche ASPASIE
Ne m'octroya seulement un souris ;
Et moi je vais, plein de mélancolie,
Traînant par-tout ma chaîne et mes ennuis.

Oh! fuyez-la, fuyez cette ASPASIE
Au cœur de roche, au regard mensonger;
De ses accens n'oyez la mélodie,
Et de sa vue évitez le danger.

Un seul instant sur l'ingrate ASPASIE
Si vous osiez fixer vos yeux charmés,
Ah! redoutez pour toute votre vie

L'affreux tourment d'aimer sans être aimés.

L'ARGUMENT RÉTORQUÉ.

CONTE.

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DEPUIS trente ans un vieux prêtre en chasuble

Avait lié d'un noeud indissoluble

Messer Astor et damoiselle Alix,

Sans qu'aucun hoir, ni mâle ni femelle,
Eût couronné leurs feux purs et bénis.
Messer Astor en perdait la cervelle ;
Fort se doulait de voir périr son nom
Faute d'enfans, et sans espoir d'en faire:
Et du pauvret l'humeur atrabilaire
Troublait souvent la paix de la maison.

Adonc un jour que le vieil hypocondre
Avec chaleur gourmandait sa moitié,
Se lamentant d'être sans héritier,
Madame Alix soudain de lui répondre:-
« A qui la faute?-A moi, peut-être?-A vous,
<< Sans en douter. — Taisez-vous, perronelle !
<< Par la sambleu, vous me la donnez belle!
« Connaissez mieux, s'il vous plaît, votre époux.

« A mon honneur des plus rudes épreuves « Je suis sorti. J'ai fait toutes mes preuves.

« Bel argument! dit Alix en courroux ;

« Eh! crois-tu donc, Hercule octogénaire,

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<< Crois-tu qu'encor les miennes soient à faire-»?

L'ÉPOUX MALHEUREUX.*

Un jeune officier, marié tout récemment à une femme qu'il adorait, avait amené chez lui un de ses camarades, son ami intime. Au bout de trois mois, obligé de s'absenter pour quelques jours, il trouve à son retour sa femme et son ami disparus, avec des preuves non équivoques de leur intelligence. On a su depuis qu'ils étaient passés en Italie. C'est ce malheureux époux qui parle ici.

Ô vous qui portez dans mon cœur

La mort, le désespoir, la rage,
Ingrats! venez voir votre ouvrage,
Venez jouir de mon malheur.

Errant au milieu des ténebres
Sur le bord des rocs menaçans,
Aux accens des oiseaux funebres
Je joins mes lugubres accens.
Seul, isolé dans la nature,
Pleurant sur vos noirs attentats,
Je ne vois aux maux que j'endure
D'autre terme que le trépas.

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