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DES GENRES

la gagnerez. Si vous la perdez, il faudra payer, par la sentence des Juges. Si vous la gaguez, il faudra il faudra payer en vertu de notre convention. Le disciple répondit : Ou je perdrai ma cause, où je la gagnerai; si je la perds, je ne vous dois rien en vertu de notre convention: si je la gagne, je ne vous dois rien en vertu de la sentence des Juges.

Quand l'objection est susceptible d'une réfutation en règle, on la fait

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argumens contraires

,

par

des

tirés ou des circonstances, ou de la nature de la chose, ou des autres lieux communs.

Quand elle est trop forte, on feint de n'y pas faire attention, ou on promet d'y répondre, et on passe légèrement à un autre objet: on paie de plaisanteries, de bons mots. Un Orateur Athénien entreprenant de réfuter Démosthène qui avoit mis tout en émotion et en feu, cominença en disant : Qu'il n'étoit pas surprenant que du méDémosthène et lui ne fussent pas me avis , parce que Démosthène étoit un buveur d'eau, et que lui il ne buvoit que du vin. Cette mauvaise plaisanterie éteignit le feu qu'avoit allumé le prince des orateurs.

Enfin quand on ne peut détourner le coup, on avoue le crime, et on a recours aux larmes et aux prières pour écarter l'orage.

La peroraison est la conclusion du discours. Elle comprend ordinairement une récapitulation de tout ce qui a été dit de plus frappant, soit pour convaincre, soit pour toucher. Après quoi on fait reparoitre la pro osition, comme résultant de toutes les raisons qui ont été employées.

SECTION TROISIEME.

DE L'ELOCUTION ORATOIRE.

NOUS

Ous avons passé assez rapidement sur l'Invention et la Disposition pour deux raisons: la première est, qu'après tout ce que nous avons dit dans les volumes précédens sur les fonctions du Génie et du Goût, et sur l'application de leurs règles, il n'est pas fort difficile de se faire une idée de ce qu'il doit en résulter par rapport à l'Eloquence. La seconde, qui nous est fournie par Cicéron même, c'est qu'il suffit de donner des notions de ce qui les concerne, de montrer les sources et d'avertir l'Orateur que tout ce qu'il doit dire doit lui être inspiré par sa cause, et ordonné selon son intérét. Le bon sens naturel le conduit dans sa route, et lui fournit les moyens d'ariver Hæc propria magis prudentia quàm eloquentiæ.

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Il n'en est pas de même de l'Elocution. Les personnes qui ont le plus de sens et de goût, ont besoin d'être averties d'une infinité de petits détails qui échappent aux yeux ordinaires, et dont résulte cependant tout l'effet de l'Eloquence, ainsi nommée, non à cause de l'Invention ou de la Disposition, qui en font néanmoins les parties solides, mais à cause de l'Elocution, qui semble seule faire plus que tout le reste sur l'esprit de ceux qui écoutent.

LA

le

CHAPITRE I.

Ce que c'est qu'Elocution.

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A pensée et le sentiment peuvent s'exprimer de trois manières par le ton de voix comme quand on gémit; par geste, comme quand on fait signe à quelqu'un de s'avancer, de s'éloigner; par la parole, quand on prononce des mots. Les deux premières expressions appartiennent à la Prononciation. La dernière est ce qu'on nomme Elocution. L'Elocution en général est donc l'expression de la pensée par la parole.

Comme l'expression et la pensée ont le même objet et les mêmes règles, nous allons les faire marcher à côté l'une de

l'autre

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pour se servir mutuellement

d'appui et de preuves. On nous permet-. tra quelques détails.

La pensée en général est la représentation de quelque chose dans l'esprit : comme quand je me représente en moimême le soleil.

L'expression en général est la représentation de la pensée : je pense au soleil, et je dis le soleil: voilà ma pensée exprimée.

Nous avons dit, il y a un moment, qu'il y avoit trois sortes de pensées, l'idée, le jugement et le raisonnement : et que l'expression de ces trois sortes de pensées étoit le terme, la proposition, l'argument (1).

Quand une idée est seule, et séparée de toute autre idée, on l'appelle simple, un arbre, une fleur.

Lorsqu'elle renferme plusieurs autres idées. on l'appelle complexe: Un arbre orné de fleurs, chargé de fruits; une maison grande et richement meublee.

Le jugement, ou la proposition, contient trois parties: l'une à laquelle on en joint une autre, le soleil; l'autre qui est jointe, rond la troisième qui fait la liaison des deux, est: Le soleil est rond.

(1) Voyez ci-dessus, pag. 21.

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La première de ces parties s'appelle sujet, la seconde attribut, la troisieme liaison.

La proposition est quelquefois renfermée dans un seul mot: Aimez, c'est-àdire, vous soyez aimant. Quelquefois elle a deux mots, je lis, c'est-à dire, je suis lisant. Souvent elle a trois mots, je suis aimé. Toutes ces espèces de propositions sont simples, parce qu'elles n'ont qu'un sujet et qu'un attribut. Celles qui en ont plusieurs sont composées et on les nomme complexes.

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Dans la proposition complexe on distingue la proposition principale, et les propositions incidentes. Celles-ci sont attachées au sujet, ou à l'attribut. La crainte de ceux qui parlent en public est raisonnable. La crainte est raisonnable , c'est la proposition principale ; de ceux qui sont parlans en public, c'est la proposition incidente; puisqu'elle s'appuye, qu'elle tombe sur le sujet de la proposi tion principale. Si on vouloit en ajouter une aussi à l'attribut, on pourroit dire: La crainte de ceux qui parlent en public est l'effet d'une raison qui est éclairée. C'est de ces sortes de propositions que tous ces livres sont remplis.

Nous avons donné ci-dessus quelques détails sur les raisonne mens,

nous

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