Page images
PDF
EPUB

près d'un siècle et demi. Mais de quel droit fournirois-je moi-même une de ces pièces de comparaison? Je me suis restreint à jeter de tems en tems au bas des pages quelques morceaux de M. Patru, avec quelques légeres remarques, laissant au lecteur instruit à juger lui-même les différences : ce qui lui sera beaucoup plus utile que de juger des observations.

M. T. CICERONIS

Pro A. Licinio Archia poëta.

ORATI O.

SI quid est in me ingenu, Judices quod sentio quam sit exiguum; aut si qua exercitatio dicendi, in qua me non infi cior mediocriter esse versatum; aut si hujusce rei ratio aliqua, ab optimarum artium studiis, ac disciplina profecta, à qua ego nullum confiteor ætatis meæ tempus abhorruisse earum rerum omnium vel in primis hic A. Licinius fructum à me repetere propè suo jure debet (a).

(a) Trad. de M. Patru. « Si j'ai quelque esprit ; ou » si l'exercice du barreau m'a pu apprendre quelque chose » en l'art de parler; où si ce peu de connoissance que » j'en ai me vient de l'étude des bonnes Lettres , que

je confesse avoir été tout l'entretien de ma vie, c'est, » sans doute, pour cet Archias que je suis particuliére»ment obligé d'employer toutes ces choses »

M. Patru a conservé l'ordre des membres de cette période ; mais il n'en a supprimé le premier incise, quod sentio quàm sit exiguum ; il a affoibli le second, in qua non inficior, etc. au point de le rendre presqu'imperceptible; enfin il a changé la couleur du troisième, en mettant l'affirmatif à la place du négatif.

2. Trad. de M. P. «Si j'ai quelque intelligence et

TRADUCTION

De l'Oraison de Cicéron pour le poëte Archias.

A

[ocr errors]

S'il y a en 'IL y a en moi, Messieurs, quelque foible talent, dont je sens toute la médiocrite; si j'ai quelque usage d'un art, dans lequel je ne disconviens pas que je me suis assez long-temps exercé; enfin si l'étude des Lettres, pour lesquelles javoue que je n'eus d'éloignement dans aucun temps de ma vie, a produit en. moi quelque avantage du côté de la parole c'est à Licinius qu'il appartient. sur-tout d'en recueillir le fruit.

[ocr errors]
[ocr errors]

$12

[ocr errors]

"truire

"

quelque esprit ou si un long exercice a pu m'ins ruire en l'art de parler ou si ce peu de connoissance » que j'en ai, je le dois à la culture des bonnes Lettres », qui certainement ont été tout l'entretien de ma vie : il n'y a personne qui puisse prétendre plus justement » qu'Archias tout le fruit qu'on peut espérer de toutes "' ces choses. »

*

x

La seconde traduction est plus moëlleuse plus nour rie, plus arrondie, plus française: il ne dit point, que je confesse avoir été, qui sent le latinisme, ni cet Archias qui nous paroîtroit aujourd'hui méprisant, et qui peutêtre répond plus au pronom iste, qu'au pronom hic des latins. On peut observer encore qu'aujourd'hui on ne finiroit pas une période à quatre membres par toutes ces choses, qui est une chute traînante.

[ocr errors]

Nam quoad longissime potest mens mea respicere spatium præteriti temporis, et pueritia memoriam recordari ultimam, inde usque repetens, hunc video mihi principem et ad suscipiendam, et ad ingrediendam rationem horum studiorum extitisse (b).

Quòd si hæc vox hujus hortatu, præceptisque conformata, nonnullis aliquando saluti fuit: à quo id accepimus, quo cæteris opitulari, et alios servare possemus huic profectò ipsi, quantum est situm in nobis ; et opem et salutem ferre debemus (c).

(b) 1. Trad. Car lorsque je considere le passé, et » qu'à la prendre du plus loin qu'il me souvienne

[ocr errors]

je

rappelle en mon esprit la mémoire de ma plus tendre » jeunesse je trouve qu'en effet, il est le premier de "mes maîtres et que c'est lui principalement qui m'a

donné du courage et des lumières pour mes études. » 2. Trad. En effet, quand je considere le passé, et « que remontant presque à mon enfance, je rappelle » en ma mémoire la conduite ou les occupations de ma plus tendre jeunesse ; je trouve qu'il est à vrai dire, le premier de mes maîtres et que c'est lui principalement qui m'a donné du courage et des lumiè » res pour mes études. »

[ocr errors]
[ocr errors]

Quand je considere le passé, ne rend ni le sens ni la force du quoad longissimè. D'ailleurs il s'agit ici de remonter d'année en année pour chercher une époque, et non de jeter les yeux sur des événemens antérieurs. Du plus loin qu'il me souvienne est une phrase qui seroit aujourd'hui populaire. Premier de mes maîtres l'expression de Cicéron est plus délicate, principem ad sus cipiendam. Du courage et des lumieres: ces idées sont trop éloignées de celles de Cicéron: studiorum ne répond pas au mot études, sur-tout quand on dit, mes études.

[ocr errors]

Du plus loin que je puis me rappeler le souvenir de mes premières années, en remontant jusqu'à ma plus tendre jeunesse, je le vois qui m'introduit, et qui me guide dans la carrière des Lettres.

Si cette voix formée par ses leçons, animée par ses conseils, a quelquefois servi utilement quelques-uns de nos citoyens celui qui m'a mis en état de défendre et de secourir les autres, nat-il pas droit d'exiger que je le defende lui-même, si je le puis ?

- Dans la seconde traduction, en effet est plus vif que car. Ea conduite et les occupations sont difficiles à retrouver dans le latin. Est-ce la conduite que j'ai tenue ou le conseil qui m'a guidé ? On dit bien occuper un enfant, mais je ne sais si on dira aussi bien les occupa tions d'un enfant! Ce mot semble signifier une suite d'affaires graves et qui ne sont point celles d'un enfant. A vrai dire, est plus familier que simple. On ne dit gueres en français, donner des lumieres pour des études c'est une phrase peu naturelle.

:

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

(c) 1. Trad. «Que si cette voix animée par ses per"suasions et formée par ses enseignemens a été sa» lutaire à quelques-uns ; il est certes très raison»nable qu'aujourd'hui nous défendions de toute notre » puissance, celui qui nous a donné de quoi défendre » les autres. »

[ocr errors]

On diróit aujourd'hui exhortations et non persuasions. Quelques uns est une chute trop vague et trop seche. Un Roi pourroit dire de toute notre puissance.: un Orateur doit dire de tout notre pouvoir. De quoi défendre, il semble qu'il faudroit ici les moyens de défendre: je ne parle point de certes qui a vieilli ce n'est point la Faute de M. Patru.

2. Trad. «Que si cette voix animée par ses persua

« PreviousContinue »