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L'e muet au dedans d'un mot et à la suite d'une autre voyelle, se supprime toujours, et ne fait pas une syllabe particulière dans la prononciation: ce qui arrive le plus ordinairement dans les futurs des verbes. Ainsi, tuerai, crieront, louerez, sacrifiera, enjouement, elc. se prononcent, tárai, críront, lourez, sacrifira, enjoúment, comme dans ces vers, J'espere toutefois qu'un coeur si magnanime

Ne sacrifiera point les pleurs des malheureux. J'avouerai qu'autrefois, au milieu d'une armée, Mon cœur ne soupiroit que pour la renommée. S'il vient, il paiera cher un si sensible outrage. sacrifiera ne fait que quatre syllabes, j'avouerai n'en fait que trois, et paiera n'en fait que deux. Des Voyelles qui forment ou ne forment pas de diphthongues.

Il est encore très-essentiel de savoir quand plusieurs voyelles forment dans les vers une diphthongue, ou n'en forment pas, c'est-à-dire, quand elles doivent se prononcer en une ou deux syllabes; sur quoi nous donnerons ici quelques regles particulieres, en parcourant les différentes sortes de diphthongues dont nous avons parlé, pages 13 et suivantes, et dont nous avons dit que la plupart devoient se prononcer en deux syllabes, dans la poésie et dans le discours soutenu.

Ia forme généralement deux syllabes, soit dans les noms, soit dans les verbes, comme dans diamant, di-adéme, étudi-a, confi-a, oubli-a, etc. excepté dans quelques mots qui se réduisent à peu près à ceux-ci, diable, fiacre, liard, familiarité, familiariser.

De peur de perdre un liard, souffrir qu'on vous égorge. Sa familiarité jusque-là s'abandonne.

Je hais... ces gens.

Dont la fiere grandeur d'un rien se formalise.

Et qui craint qu'avec elle on ne familiarise.

IE, avec l'e ouvert ou fermé, n'est ordinairement que d'une syllabe, de quelque consonne qu'il

soit suivi, comme dans ciel, troi-sie-me, fie-vre, pierce, ami-tié, bar-rie-re, pa-pier, pre-mier, etc. Il faut ajouter à ce que nous avons observé, page 437 et suivantes, que dans les verbes en ier de la premiere conjugaison, ie forme deux syllabes à l'infinitif, à la seconde personne du pluriel du présent de l'indicatif ou de l'impératif, et au participe passif. Ainsi, il faut prononcer étudi-er, confi-er, déli-er, mari-er; vous étudi-ez, vous confi-ez, vous déli-ez, vous mari-ez; étudi-é, confi-é, déli-é, mari-é.

IAI, dans la premiere personne du prétérit de ces verbes, se prononçant comme ié, forme aussi deux syllabes: j'étudi-ai, je confi-ai, je déli-ai„je mari-ai.

On prononce de même vous ri-ez, vous souri-ez, impi-été, inqui-et, inqui-éter, inqui-étude, hardiesse, matéri-el, essenti-el, et quelques autres mots en el, de plus d'une syllabe.

Hier s'emploie quelquefois en une seule syllabe, comme dans ce vers,

Hier j'étois chez des gens de vertu singuliere.

Mais on en fait plus communément deux syllabes, comme dans ces vers,

Mais hier il m'aborde et me serrant la main,
Ah! Monsieur m'a dit-il dit, je vous attends demain.
Il est d'une syllabe dans avant-hier.

Le bruit court qu'avant-hier on vous assassina.

Io est communément de deux syllabes, comme dans vi-olence, vi-olon, di-ocese. On pourroit en excepter fio-le et pio-che.

Prends la fiole où... Je crains en ce désordre extrême....

Oe ne fait qu'une syllabe, comme dans boe-te, coe-ffe, mo-elle, po-elle; excepté dans po-ésie, po-ëme, poète.

Or, avec le son de l'o et de l'è ouvert, n'est ja mais ue d'une syllabe, comme dans Roi, loi, voilà, emploi, etc.

UE, avec l'e ouvert ou fermé, est toujours de deux syllabes, comme dans du-el, tu-er, tu-é‚ attribu-er, attribu-é, su-er, su-é.

Ur ne forme qu'une syllabe, comme dans lui, ce-lui, dé-duire, con-strui-re, fuir, fui, ai-guiser, etc. excepté dans ru-ine, ru-iner, bru-ine.

IAI est de deux syllabes dans ni-ais; il est quelquefois de deux, et quelquefois d'une seule dans bi-ais, bi-aiser; ou biais, biaiser.

IAU est toujours de deux syllabes, comme dans mi-auler, besti-aux, provinci-aux,impéri-aux, etc.

IEU se prononce ordinairement en deux syllabes, comme dans pi-eux, odi-eux, furi-eux, pré-cieux; excepté dans cieux, Dieu, lieu, lieutenant, mi-lieu, mieux, pieu, é-pieu, aissieu, vieux, jeux.

QUE, avec l'e ouvert ou fermé, est de deux syllabes, comme dans jou-et, lou-er, lou-é, avou-er, avou-é; excepter dans fouet et fouet-ter.

Oui, est de deux syllabes, comme dans ou-ir ou-i, jou-ir, jou-i, éblou-ir, éblou-i; excepté dans bouis, et dans oui, marquant affirmation.

Et deux fois de sa main le bouis tombe en morceaux.

IAN et IEN, avec le même son, forment deux syllabes, comme dans étudi-ant, fortifi-ant, riant, li-ant, cli-ent, pati-ent, impati-ence, expédi-ent, expéri-ence; il faut seulement excepter vian-de.

Autour de cet amas de viandes entassées,

Régnoit un long cordon d'alouettes pressées.

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IEN, avec le son qui approche de celui de l'e fermé ne forme ordinairement qu'une seule syllabe, dans les noms substantifs, les pronoms possessifs, les verbes, et les adverbes, comme dans bien, chien, rien, mien, tien, sien, je viens je tiens, combien, etc. excepté li-en, parce qu'il vient du verbe lier, de deux syllabes.

Ien est de deux syllabes, quand il termine un

nom adjectif d'état, de profession, ou de pays, comme dans grammairi-en, comédi-en, musicien, histori-en, gardi-en, magici-en ; excepté chrétien.

IoN n'est d'une syllabe que dans les premieres personnes du pluriel de l'imparfait de l'indicatif, du conditionnel présent, du présent, et de l'imparfait du subjonctif des verbes, quand il ne se trouve pas, avant la terminaison de ces personnes, une précédée d'une autre consonne comme nous l'avons déjà dit page 433. Il est de deux syllabes dans les premières personnes du pluriel du présent de l'indicatif ou de l'impératif des verbes qui ont l'infinitif en ier, et dans quelque autre mot que ce puisse être, comme dans nous étudi-ons, nous confi-ons, nous déli-ons, nous mari-ons nous ri-ons li-ons, religi-on, union, passi-on, visi-on, créati-on, etc.

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OIN n'est jamais que d'une syllabe, comme dans coin, soin, besoin, appointement, etc.

Enjambement des Vers.

Les vers n'ont ni grace, ni harmonie, quand ils enjambent les uns sur les autres, c'est-àdire, quand le sens demeure suspendu à la fin d'un vers, et ne finit qu'au commencement du vers suivant, ce qui arrive principalement toutes les fois que le commencement d'un vers est régime, où dépendance nécessaire de ce qui se trouve à la fin du vers précédent, comme dans ceux-ci:

C'étoit votre nourrice. Elle vous ramena
Suivit exactement l'ordre que lui donna
Votre pere, etc.

où l'on voit que votre pere a une liaison nécessaire avec la fin du vers précédent, puisqu'il est le

nominatif du verbe donna.

Cette regle est essentielle dans les vers d'un style noble et sérieux. On s'en dispense néanmoins

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quelquefois dans les vers d'un style familier comme dans les comédies, les fables, les contes, les épîtres, etc.

Mais l'harmonie, en quelque style que ce pût être, ne seroit pas blessée, si le régime ou la dépendance d'un vers s'étendoit jusqu'à la fin du vers suivant, comme dans ceux-ci :

L'amour essentiel à notre pénitence,

Doit être heureux fruit de notre repentance.
Mais admire avec moi le sort, dont la poursuite
Me fait courir alors au piege que j'évite.

Transposition des mois.

st qu

ts,

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structio

pro

Quoique le langage de la poésie frêm soit pas différent de celui de la prose, € ni emploie communément les mêmes mo Sla cependant permis d'y faire, dans la cone. de la phrase, certaines transpositions que n'admettroit pas, et qui contribuent beac l'harmonie et à la noblesse des vers. Mais élet sédie. toujours faire ces transpositions avec esprit c goût, de maniere qu'elles n'apportent ni dureie, ni obscurité dans les vers.

:

Elles consistent à changer l'ordre naturel des mots ce qui peut se faire de plusieurs manieres. I. En mettant le nominatif après le verbe, comme on le met aussi quelquefois en prose. Ainsi dans

ces vers,

Ce traitement, Madamé, a droit de vous surprendre ; Mais enfin, c'est ainsi que se venge Alexandre. l'ordre naturel seroit, c'est ainsi qu'Alexandre se venge.

II. En mettant le régime absolu à l'accusatif avant le verbe qui le gouverne ce qui ne doit pourtant se faire qu'avec beaucoup de réserve comme dans ces vers:

Le sort vous y voulut l'une et l'autre amener,
Vous pour porter des fers, elle pour en donner
Vous direz à celui qui vous a fait venir,
Que je ne lui saurois ma parole teniṛ.

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