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Quelque, quelqu'un, se prononcent aussi comme s'il y avoit quèque, quèqu'un, sans l.

On prononce encore, en conversation, craire. je crais, pour croire, je crois; frét pour froid, etc. Mais on rétablit la véritable prononciation de ces mots, aussi bien que des précédents, dans la Poésie et dans le discours soutenu.

Lorsque François exprime un nom propre, il se prononce toujours avec le son de la diphthongue oi; comme dans ces vers de la Henriade:

La discorde inhumaine, Sous l'habit d'Augustin, sous le froc de FRANÇOIS, Dans les Cloitres sacrés fait entendre sa voix.

Chant I.

Mais lorsqu'il signifie les Habitans de la France, il se prononce présentement avec le son de la voyelle ai, comme s'il y avoit Français, tant dans le discours soutenu que dans le discours familier.

Il est pourtant nécessaire de le prononcer encore en oi dans les vers, quand il rime avec un mot qui a la même prononciation, sans quoi les oreilles seroient choquées de la dissonance des rimes; comme dans ces autres vers de la Hepriade:

Ah! s'écria Bourbon, quand pourront les FRANÇOIS,
Voir d'un regne aussi beau fleurir les justes lois?
Chant I.

Que ne puis je plutôt ravir à la mémoire.
Des succès trop heureux déplorés tant de fois?
Mon bras n'est encore teint du sang des FRANÇOIS
Chant III.

Mais l'usage de prononcer François en ai dans toutes sortes de discours, est devenu si général, que les Poëtes mêmes doivent éviter de le faire rimer avec des mots terminés en oi.

Nous renvoyons, pour les autres différences de prononciation, à l'usage et à l'autorité de certains છે

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C'est ici le lieu de faire quelques observatious sur la prononciation des diphthongues.

Plusieurs voyelles ne forment une diphthongue que quand elles expriment, comme nous avons dit, page 13, un son double qui se prononce en une seule syllabe. Ainsi, quand ces mêmes voyelles se prononcent en deux syllabes, elles cessent alors d'être diphthongues.

Dans le discours familier, presque tous les assemblages de voyelles qui expriment un double son, ne forment qu'une seule syllabe, et on prononce biai-ser, ma-té-riaux, é-tu-diant, pa-lient, am-bi-tion, joué, etc. et non pas bi-ai-ser, ma-téri-aux, é-tu-di-ant, pa-ti-ent, am-bi-ti-on, jou-é, etc. Par conséquent, iai, iau, ian, ien, ion, oué, etc. doivent être regardés, dans ces mots, comme de véritables diphthongues.

Mais la plupart de ces mêmes voyelles qui ne font qu'une syllabe dans le discours familier doivent nécessairement en former deux dans la Poésie et dans le discours soutenu, et cessent, par cette raison, d'y être regardées comme diphthongues. Ainsi, il faut y prononcer vi-o-ler, ru-i-ner, for-ti-fi-ant, mu-si-ci-en, pré-ci-eux, con-di-ti-on, etc. et non pas, vio-ler, rui-ner, for-ti-fiant, mu-si-cien, pré-cieux, con-di-tion, comme on le feroit dans le discours familier.

Il n'est pas aisé de déterminer, par des regles générales, quels sont les assemblages de voyelles exprimant un double son, qui doivent se prononcer en une ou deux syllabes, dans la poésie et dans le discours soutenu. Nous observerons seulement:

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1. Que presque toutes les voyelles que nous avons appelées diphthongues au chapitre Ier. cessent de l'être, et se prononcent en deux temps ou en deux syllabes, quand elles sont à la suite

d'une r ou d'une 7, précédée d'une autre consonne. C'est pour cela qu'on prononce cri-a, pri ant, pu-bli-ons, san-gli-er, meur-tri-er, cli-ent, etc.

2. Or se prononce toujours en une seule syllabe, soit dans le discours familier, soit dans la poésie et le discours soutenu, comme dans Roi, voi-là, droi-tu-re, moi, toi, soi, etc.

3. IoN ne se prononce en une syllabe dans la poésie et dans le discours soutenu, que quand il forme la terminaison des premieres personnes du pluriel de l'imparfait de l'indicatif, du conditionnel présent, du présent ou de l'imparfait du subjonctif des verbes, comme dans nous ai-mions nous ai me-rions, nous ai-mas-sions, etc. à moins qu'il ne soit à la suite d'une r précédée d'une autre consonne; auquel cas on prononce, nous met-tri-ons, nous ren-dri-ons, nous rompri-ons, nous vain-cri-ons, etc.; par-tout ailleurs, ion forme deux syllabes: vi-si-on, es-pi-on, commu-ni-on, li-on, ac-ti-on, etc.

4. On est toujours d'une seule syllabe, dans quelque discours que ce soit : join-tu-re, ap-poin-té te-moin, etc.

5. Les autres assemblages de voyelles, que nous. axons appelés diphthongues simples, composées, ou nasales, se prononcent, dans la poésie et dans le. discours soutenu, tantôt en une syllabe, et tantôt en deux. Ainsi, ie, ui, ieu, îan, ien, ne forment qu'une syllabe dans bie-re, ce-lui, Dieu, vian-de, bien-fait; et ils en forment deux dans. ni-er, ru-i-ner, o-di-eux, ri-ant, li-en, etc. Ce n'est que par l'usage et par la lecture des vers, que l'on apprendra ces différences de pronou

ciations.

Observations particulieres..

Rien n'est plus désagréable que la prononciation

vicieuse que l'on substitue très-communément à celle de l'l mouillée, que l'on prononce dans fille, oreille, feuille, paille, Versailles, etc. comme s'il y avoit fre, oreye, feure, paye, Versares etc. Ce défaut n'est pas moins ordinaire à Paris que dans les provinces; et il ne paroît pas que l'on ait beaucoup d'attention à rompre de bonne heure, dans les enfants, une habitude dont ils ont honte quand ils entrent dans le monde, et dont il est rare qu'ils se défassent aisément.

Il n'est pas moins ordinaire d'entendre prononcer norrir, norriture, norrice, aujord'hui; au lieu que, pour parler purement, il faut dire, nourrir, nourriture, nourrice, aujourd'hui.

On doit prononcer heureux, malheureux, et hureux, malhureux.

non pas,

Bien des gens font entendre séparément l'e et l'u du participe eu, dans j'ai eu, nous avons eu, j'avois eu, etc. et disent, j'ai é-u, nous avons é-u j'avois é-u; au lieu qu'il faut prononcer comme s'il y avoit j'ai u, nous avons u, j'avois u, etc.

Août se prononce en une seule syllabe sans a Le mois d'Août, la mi-Août, comme s'il y avoit le mois d'Oût, la mi-Oút.

le

son

La plupart des Parisiens prononcent anneaux en parlant d'un jeune mouton; mais il faut nécessairement dire agneau, en conservant au gn qu'il a dans ignorant; et on ne doit prononcer anneau, qu'en parlant d'une bague, ou d'un cercle de métal ou autre matiere.

Il ne faut pas manquer de prononcer toujours par un é fermé, et non pas par un è ouvert, comme le font quelques uns, les premieres personnes du singulier des prétérits de l'indicatif des verbes de la premiere conjugaison, et les premieres personnes du singulier de tous les futurs qui s'écrivent par ai. J'allai, j'aimai, je demandui; j'irai, j'ai

merai, je demanderai, etc. comme J'allé, j'aimé, je demandé ; j'iré, j'aimeré, je demanderé.

L'e qui précede les terminaisons du futur de l'indicatif est toujours muet, à moins que ces terminaisons n'aient deux rr, auquel cas l'è précédent devient ouvert. Ainsi on prononce j'aimerai, nous cueillerons, avec l'e muet, et je verrai, avec l'è ouvert, comme s'il y avoit, je vaîrai. Mais c'est une faute très-grossiere, et cependant trèscommune, de prononcer avec un è ouvert, je trouverai, comme s'il y avoit, je trouvaírai; puisque I'r y est simple, et que l'e ne doit pas y avoir d'autre son que dans j'approuverai.

Dans les futurs où les deux rr se prononcent fortement, comme dans j'acquerrai, je courrai je mourrai, etc. on met ordinairement, en prononçant, un e muet entre les deux rr, ce qui allonge le mot d'une syllabe, et on prononce j'acquérerai, je courerai, je mourerai, etc. Cette prononciation est très-vicieuse. Il faut prononcer les deux rr en un seul temps, en sorte que j'acquerrai ne fasse que trois syllabes; courrai et mourrai, chacun deux.

Cé que nous venons de dire du futur, doit s'entendre également du conditionnel présent: J'acquerrois, je courrois, je mourrois, etc.

On prononce avec l'é fermé toutes les secondes personnes du pluriel du futur, aussi bien que des autres temps des verbes, quand elles finissent par ez. Ainsi, quelques personnes font très - mal de prononcer vous ferais, vous dormirais, vous chanterais, etc. au lieu de vous ferez, vous dormirez, vous chanterez, etc.

L'e muet ne se fait point entendre avant les terminaisons du futur et du conditionnel présent, quand il est précédé d'une autre voyelle. Ainsi, on prononce j'étudierai, il essaiera, nous emploierons, vous appuierez, je tuerai, je louerui,

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