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ARTICLE

PREMIER.

Des Participes actifs.

D. QUEST-CE

UEST-CE que les Participes actifs?

R. On appelle communément participes actifs, ceux qui sont terminés en ant, avec leur prétérit, parce que, dans les verbes actifs, et dans une partie des verbes neutres, ils signifient le sujet comme produisant ou ayant produit une action. Ainsi, dans Dieu aimant les hommes, Adam ayant péché, on fait entendre que Dieu aime les hommes, et qu'Adam a péché; et on pourroit rendre aimant et ayant péché, par qui aime et qui a péché.

D. Comment appelle-t-on les mêmes participes dans les verbes qui n'expriment pas d'action?

R. On les appelle aussi participes actifs, sans autre raison que pour ranger tous les participes en ant sous une même dénomination.

D. Qu'est-ce que les participes actifs ont de commun avec les adjectifs?

R. C'est que, comme les adjectifs, ils n'expriment qu'une qualité ou un attribut, et qu'ils se rapportent toujours à un nom substantif, exprimé ou sous-entendu, de quelque genre et de quelque nombre qu'il soit.

D. En quoi sont-ils différents des autres noms adjectifs?

R. 1. En ce qu'ils ont les mêmes régimes absolus ou relatifs, que les verbes dont ils sont participes. Ainsi, comme on dit, Un écolier sage préfere l'étude au jeu, on dit de même Un écolier sage préférant l'étude au jeu.

2. En ce qu'ils sont pour la plupart indéclinables, c'est-à-dire, qu'ils ne changent point de terminaison, en quelque genre et en quelque nombre que soient les substantifs auxquels ils se rapportent. Ainsi on dit également, Un homme LISANT de bons livres ; une femme LISANT de bons livres; des hommes LISANT de bons livres; des femmes LISANT de bons livres. Et l'on voit que dans ces quatre phrases, où les substantifs sont de divers genres et de divers nombres, le participe lisant ne change pas de terminaison.

D. Cette seconde différence convient-elle sans exception à tous les participes actifs ?

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R. Non: il faut en excepter les participes actifs de quelques verbes neutres qui, en certaines occasions, changent leurs terminaisons, suivant le genre et le nombre du substantif auquel ils se rapportent tels que sont, approchant, dépendant, tendant, usant, jouissant répugnant, et quelques autres en fort petit nombre: car on peut dire, Une étoffe approchante de la vôtre. Les villages dépendants d'une Seigneurie, Une requête tendante à la cassation d'un arrét, Des filles majeures usantes et jouissantes de leurs droits. Une humeur répugnante à la mienne.

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D. Il me semble que vous auriez pu comprendre dans cette exception un plus grand nombre de participes actifs.

Il est vrai qu'on dit encore, Un vice dominant une passion dominante, un effet surprenant, des aventures surprenantes un jardin charmant, des tableaux charmants, etc. Mais ce qui paroît participe dans ces phrases, ne l'est pas ce sont des noms purement adjectifs, qui ne servent qu'à quaJifier, et que l'on appelle adjectifs verbaux, c'està-dire formés de quelques verbes.

D. Comment peut-on distinguer un adjectif ver· bal i erminé en ant, d'avec un participe actif?

R. 1. L'adjectif verbal n'a pas, comme le participe actif, le régime absolu ou relatif du verbe dont il est formé. Ainsi on dira bien Une femme suppliante, mais on ne dira pas, Une femme suppliante ses juges. Il faudra dire, en se servant du participe actif indéclinable, Une femme suppliant ses juges.

2. Le participe actif ne peut jamais subsister seul dans le discours, sans être suivi d'un régime ou de quelques mots qui en dépendent, exprimés ou sous-entendus. Ainsi on ne peut pas dire, Pierre aimant, sans exprimer ce qu'il aime, et quand on dit, Louis XVI actuellement régnant, on sous-entend en France. Au lieu que le nom adjectif verbal n'a ni régime, ni aucune autre suite nécessaire : comme on le voit dans Un effet surprenant, un jardin charmant, etc.

3. On distingue encore plus généralement l'ad-jectif verbal du participe actif, en ce qu'il peut toujours étre mis immédiatement, à la suite du verbe substantif étre, comme tous les autres adjectifs: ce qui ne convient pas au participe actif. Ainsi on dira bien, Ce jardin est brillant, cet effet est surprenant; mais on ne pourra pas dire, sans blesser l'usage, je suis lisant, Pierre est dormant; ni, cette femme est craignant Dieu, cette femme est aimant son mari; quoiqu'on puisse dire, cette femme est sage, attachée à ses devoirs, craignant Dieu et aimant son mari; parce qu'alors, craignant et aimant ne sont pas immédiatement après le

verbe est.

Suivant cette derniere observation, les participes actifs, approchant, dépendant, et les autres que nous avons exceptés, pourroient absolument, joints à leurs régimes, être regardés comme adjectifs verbaux, puisqu'on peut dire, Cette étoffe est approchante de la vôtre. Ces villages sont dépendants de ma Seigneurie, etc.

D. Le Gérondif étant entierement semblable par l'expression au participe actif, lorsqu'il n'est pas précédé de la préposition en, comment peut-on le distinguer?

R. De deux manières :

1. Par la connoissance de la nature de l'un et de l'autre. Le gérondif ne désigne qu'une circonstance, une maniere, ou un moyen de l'action exprimée par le verbe principal auquel il est subordonné; au lieu que le participe marque toujours où l'état du sujet auquel il se rapporte, ou la raison et le fondement d'une action exprimée par quelque verbe.

2. Quoique le gérondif soit souvent employé sans être précédé de la préposition en, on peut néanmoins toujours la mettre avant quelque gérondif que ce soit, excepté avant les gérondifs ayant et étant. On ne peut jamais, au contraire joindre cette préposition à un participe actif, sans altérer le sens de la phrase, et sans faire violence à l'usage.

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D. Rendez-moi cette différence encore plus sensible par des exemples?

R. Si je dis, je suis persuadé que TRAVAILLANT pendant six mois avec application, vous surpasserez votre frere; travaillant n'exprime qu'une maniere ou un moyen de l'action signifiée par le verbe, vous surpasserez, c'est-à-dire, un moyen de surpasser votre frere; et on peut y joindre en, sans changer le sens de la phrase, en disant, je suis persuadé qu'EN TRAVAILLANT pendant six mois, etc. Par conséquent, travaillant est un gérondif en cette occasion.

Mais dans cette autre phrase, La plupart des Grands du Royaume JUGEANT la seconde Croisade contraire au bien de l'État, voulurent en détourner S. Louis: jugeant marque le fondement de l'action exprimée par les verbes voulurent détour

ner: c'est-à-dire, que les Grands du Royaume voulurent détourner S.Louis de la seconde Croisade, PARCE QU'ILS LA JUGEOIENT Contraire au bien de l'Etat et l'on ne pourroit pas dire, sans altérer le sens de la phrase, et sans faire violence à l'usage, La plupart des Grands du Royaume EN JUGEANT la seconde Croisade contraire au bien de l'Etat, voulurent en détourner S. Louis.

On sentira encore mieux la différence d'un gérondif et d'un participe, en se servant d'un même verbe, avec ou sans la préposion en. Par exemple, ce n'est pas la même chose de dire, Je vous ai vu PRIANT Dieu, ou je vous ai vu EN PRIANT Dieu. La première plirase où priant est participe, signifie je vous ai vu lorsque vous priiez Dieu; et la seconde, où priant est gérondif, signifie je vous ai vu pendant que je priois Dieu.

D. Quel temps marque le participe actif en ant?

R. Quoiqu'on l'appelle communément participe actif présent, il ne désigne néanmoins par lui-même aucun temps déterminé, et il se rapporte toujours au temps du verbe auquel il est joint dans la phrase. Mais le prétérit du même participe actif, comme ayant aimé, ayant lu, exprime toujours par lui-même un temps passé. Et quand on veut exprimer la signification d'un participe actif au futur, on joint le participe devant à l'infinitif du verbe et on dit, devant aimer, devant lire, etc.

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D. N'y a-t-il pas quelque regle de construction pour les participes en ant et les gérondifs ?

R. Il y en a une essentielle, et à laquelle on manque assez communément; c'est que ces participes et gérondifs, qui forment toujours des phrases incidentes et subordonnées à d'autres, doivent nécessairement se rapporter au sujet ou nominatif du verbe de la phrase principale, ou

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