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D. Dans quelle sorte de phrases emploie-t-on ces pronoms absolus?

R. On les emploie communément dans les phrases qui expriment doute, incertitude, ignorance comme dans celles-ci: Je ne sais A QUI m'adresser. QUE voulez-vous que je fasse? J'examinerai A QUOI vous étes propre. QUEL parti prendrons-nous? etc.

Et si on les emp'oie quelquefois dans des phrases qui marquent connoissance ou certitude, comme quand on dit, je sais qui vous a accusé; cette Connoissance n'est jamais exprimée distinctement, et il reste toujours à spécifier, d'une façon déterminée et précise, la personne ou la chose dont le pronom absolu tient la place, ce que l'on feroit en disant Je sais que c'est votre frere qui vous a

accusé.

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D. De toutes les phrases qui, avec les pronoms absolus, expriment_doute incertitude ignorance quelles sont les plus ordinaires dans le

discours?

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R. Ce sont celles où l'on interroge ; et comme l'interrogation y est presque toujours formée par les pronoms absolus, c'est ce qui a déterminé la plupart des Grammairiens à les appeler simplement pronoms interrogatifs. Mais après avoir réfléchi sur l'usage qu'on en peut faire, nous avons trouvé cette dénomination insuffisante; puisque, si c'est la même chose de dire, je ne sais qui vous êtes, ou QUI étes-vous ? ces pronoms peuvent donc être employés avec la même signification, dans d'autres phrases que celles qui interrogent.

D. Quelles observations avez-vous à faire sur les pronoms Qui, Que, et Quoi, lorsqu'ils sont absolus, c'est à-dire, sans antécédent ?

R. QUI, au nominatif, comme dans les autres cas, ne se dit jamais que des personnes, et véri

tablement on peut toujours le tourner par quelle personne. Ainsi c'est la même chose de dire: Je devine QUI ou QUELLE PERSONNE vous a mal parlé de moi. DE QUI OU DE QUELLE PERSONNE tenezvous cette nouvelle? A qui ou A QUELLE PERSONNE dois-je demander conseil? QUI OU QUELLE PERSONNE soupçonnez-vous?

Ce pronom étant toujours pris dans une signification indéterminée, ne s'emploie ordinairement qu'au masculin, et au singulier; c'est-à-dire que les adjectifs, qui peuvent s'y rapporter, sont au masculin et au singulier, comme quand je dis Qur sera assez hardi pour m'attaquer? Il'est cependant quelquefois suivi de noms qui marquent un féminin et un pluriel, comme quand on dit à une femme Qui Choisissez-vous pour COMPAGNES? et à un homme, qui choissez-vous pour COMPAGNONS?

Ainsi, il arrive quelquefois que qui, pronom absolu, s'emploie au féminin et au pluriel; et l'on a demandé, à cette occasion, s'il falloit dire, au pluriel, qui d'eux, ou de nous, gagneroient du parallele? ou au singulier, gagneroit au parallele? sur quoi on peut établir la regle suivante:

Toutes les fois que qui a une signification absolument générale et indéterminée, sans aucun rapport à une ou à plusieurs personnes, il est et il ne peut être qu'au singulier, comme dans cet exemple: Qui a mieux peint les hommes que la Bruyere? et dans ceux qui ont été rapportés plus haut.

Mais si qui, quoiqu'indéterminé en un sens, a cependant un rapport alternatif d'incertitude, qui tombe nécessairement, de part ou d'autre, sur plusieurs personnes ou plusieurs choses, en ce cas, il est au pluriel, et il faut mettre au pluriel les noms adjectifs ou les verbes qui s'y rapportent, comme dans l'exemple proposé, parce

que, quand on dit, Qui d'eux, ou de nous, gam gneroient au parallele? c'est comme si l'on disoit, Qui sont ceux d'eux ou de nous qui gagneroient au parallele?

On voit, dans cette façon d'exprimer la même chose, que l'on ne peut employer que le pluriel; au lieu qu'il faudroit se servir du singulier, si l'on disoit: Qui de lui ou de moi gagneroit, parce qu'alors, qui étant toujours indéterminé entre lui et moi, il a cependant un rapport alternatif qui tombe, de part ou d'autre, sur une personne dé

terminée.

Il y a encore une autre façon d'employer le pronom absolu qui, en disant: Qui est-ce qui, avec interrogation ou sans interrogation. QUI ESTCE QUI est venu? ou dites-moi QUI EST-CE QUI est venu? Alors c'est le premier qui qui est absolu : le second est relatif, et à le premier pour antécédent; comme si l'on disoit, Quelle est la personne qui est venue?

QUE ne se dit que des choses, et peut toujours se rendre par quelle chose. Je ne sais QUE vous offrir, c'est-à-dire, QUELLE CHOSE vous offrir. QUE souhaitez-vous de moi? c'est-à-dire, QUELLE CHOSE Souhaitez-vous de moi?

Les adjectifs qui peuvent s'y rapporter ne sont jamais mis qu'au masculin et au singulier: QUE dil-on de NOUVEAU?

Les seuls cas où il peut être employé, sont le nominatif et l'accusatif : le nominatif, comme dans cette phrase: QUE sommes-nous devant Dieu ? et l'accusatif, comme dans celle-ci, QUE prétendezvous faire?

On met encore souvent Qu'est-ce que, à la place du pronom absolu que, sur-tout dans les interrogations. Ainsi, QU'EST-CE QUE vous craignez? QU'EST-CE QUE Dieu ? peuvent se tourner par QUE craignez-vous? Qu'est Dieu? et alors le

premier que est toujours absolu. A l'égard du second, il est relatif, et a le premier pour antécédent, quand il est suivi d'un verbe par lequel il est régi ; ce qu'on reconnoîtra, si, au lieu de dire, Qu'est-ce que vous craignez? on dit, Quelle est la chose que vous craignez? Quand le second que n'est suivi que d'un nom, il n'est pas relatif, et il ne sert que de liaison dans la phrase. Qu'est-ce que Dieu ? c'est-à-dire, quelle chose. est Dieu?

Qu'est-ce que, étant employé dans des phrases où il n'y a point d'interrogation, ne peut se tour ner que par quelle chose ou par ce que. Je ne sais QU'EST-CE QUE vous avez fait au lieu d'étudier, c'est-à-dire, je ne sais QUELLE CHOSE vous avez faite, ou CE QUE vous avez fait au lieu

d'étudier.

Quoi, pronom absolu, ne se dit que des choses, et on peut toujours y substituer quelle chose. Je sais DE QUOI il est capable ; c'est-à-dire, DE QUELLE CHOSE il est capable. A quoi vous occupez → vous ? c'est-à-dire, A QUELLE CHOSE vous occupez-vous ? Après QUOI attendez-vous? c'est-à-dire, après. QUELLE CHOSE attendez-vous? DE QUOI tirez-vous votre subsistance? c'est-à-dire, DE QUELLE CHOSE tirez-vous votre subsistance?

Les adjectifs qui peuvent se rapporter à ce pronom, sont toujours au masculin, et au singulier. A QUOI vous attendez-vous de FACHEUX?

Les exemples précédents font connoître qu'il s'emploie dans les mêmes cas que le pronom relatif quoi. Ce qu'il y a de plus, c'est que son nominatif est en usage dans quelques phrases, comme dans celles-ci: Quoi de plus triste! QUOI de plus héroïque! et quand, après cette phrase, Il m'est arrivé quelque chose de bien surprenant, on répond, quoi?

L'usage veut que l'on puisse mettre que pour à quoi ou de quoi, dans ces phrases: QUE sert la science sans la charité? c'est-à-dire, à quoi sert la science, etc. QUE sert à l'insensé d'avoir de grands biens, puisqu'il ne peut pas en acheter la sagesse? c'est-à-dire > DE QUOI sert à l'insensé? etc.

D. Qu'est-ce que le pronom absolu, Quel, quelle.

R. C'est un pronom qui suppose toujours un nom substantif auquel il se rapporte, et dont il emprunte le genre et le nombre.

Ce substantif est le plus souvent exprimé dans la même phrase, comme dans celles-ci: QUEL sera notre SORT? Nous savons QUELLE RÉCOMPENSE nous est promise. DE QUEL PRINCE lisez-vous l'histoire? A QUELS MAUX sommes-nous réservés? QUELLES VERTUS n'ont point pratiquées les Romains ? On n'oublie que trop souvent DE QUELS PARENTS on est né, etc.

Les occasions où le substantif est sous-entendu sont assez rares. C'est, par exemple, quand, en rappelant quelque chose dont on a déjà parlé, ou demande, quel est-il, quelle est-elle ? comme si, après que j'aurois dit, J'ai des nouvelles à vous apprendre, on me demandoit, quelles sont-elles? c'est-à-dire, quelles sont ces nouvelles?

Quel, considéré par le rapport nécessaire qu'il a à un nom substantif le plus souvent exprimé, et n'étant jamais mis à la place d'aucun nom, devroit plutôt être regardé comme un nom adjectif, que comme un pronom. Nous le laissons pourtant au nombre des pronoms absolus, parce qu'il a la même signification que les autres; c'est-à-dire, qu'il marque un objet indéterminé, ou qu'il désigne confusément la nature et les qualités de quelque chose. Toute la différence qui se trouve entre celui-ci et les autres, c'est que l'objet pré

senté

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