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1679-1682 qu'il n'eût certainement pas composés, s'il avoit Et. 58-61 cru déplaire à l'ancienne. Une de ces pièces de vers Quatrains se compose des quatrains pour mettre au bas de

pour un alina

nach, donné

a Madame de

Fontanges, en

1680.

à Madame

1680.

chaque saison à un almanach, que le roi donna pour étrennes à Mile de Fontanges en 1680; l'autre Epitre est une épître assez longue, que La Fontaine de Forganges adressa à Mme de Fontanges qui venoit d'être faite duchesse". Cette pièce seule, lorsque tous les monuments historiques viendroient à périr, suffiroit pour conserver à la postérité le souvenir des désordres de Louis XIV, et du scandale de sa vie. Le poëte, dans cette épître, a fait entrer l'éloge de la figure noble et majestueuse du roi, de la beauté, des grâces de celle dont les Dieux ont récompensé ce dompteur des humains, et en même temps il y célèbre le mariage du prince de Conti avec Mlle de Blois, fille naturelle de Mme de La Vallière, et celui du dauphin, héritier légitime de la couronne, avec la princesse de Bavière. Ces deux mariages eurent lieu en 1680, de mois d'intervalle : le premier le 16 janvier, et le second le 7 mars suivant ". Si on met à part les inconvenances morales, dont on ne doit pas faire de reproche au poëte, puisqu'elles ne frappoient point la cour ni le monarque, on doit convenir que cette épître est digne de La Fontaine. Le dicu des vers, par lequel il fait prononcer les épithalames de ces deux mariages, ne l'auroit point désavoué. Il commence par celui du prince de Conti :

à

peu

Le dieu des vers lut deux épithalamnes;
En voici l'un: Couple heureux et parfait,

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Le poëte passe ensuite à l'épithalame du Dauphin, dont le mariage étoit arrêté, mais non encore célébré.

Puis le père des vers

Changeant de ton pour l'autre épithalame,
Lut ce qui suit: Chantez, peuples divers;
Que tout fleurisse aux célestes demeures.
Ne tardez plus, avancez, lentes heures,
Allez porter aux humains un printemps
Tel que
celui qui commença les temps.
Heures, volez: hâtez, hâtez la joie

Du fils des dieux à qui l'Olympe envoie
Une princesse au regard enchanteur.

Cette épître à Mme de Fontanges n'a été imprimée qu'après la mort de La Fontaine ; mais elle circula beaucoup dans le temps, et Mme de Sévigné en parle dans une de ses lettres, en date du 22 septembre 1680 13.

Me de Montespan s'étoit trompée dans ses calculs. Dès que Mme de Fontanges connut la passion qu'elle avoit inspirée, elle se livra à toute la hauteur qui faisoit le fond de son caractère; elle fut la dispensatrice des grâces, et donna le ton. Tout le monde sait qu'à une partie de chasse, le vent ayant détaché sa coiffure, elle se la fit rattacher négligemment

1679-1682 Æt. 58-61

1679-1682 avec un ruban, dont les noeuds lui tomboient sur le At. 58-61 front; cette mode passa dans toute l'Europe, et le vocabulaire des modistes, que la frivolité écrit et efface avec une rapidité égale à l'inconstance de ses goûts, a cependant toujours conservé depuis le nom de Fontanges. Mm de Montespan, indignée de se voir supplantée par celle qu'elle avoit cru pouvoir faire agir au gré de son ambition, auroit voulu que les ecclésiastiques qui entouroient le roi s'armassent de toute leur sévérité pour l'arracher à ses nouvelles amours. Ce fut alors qu'elle fit un ignoble jeu de mots sur la trop grande facilité du Père La Chaise, confesseur du roi. Mais Fontanges ne jouit pas longMort de Ma- temps de sa grandeur : les suites d'une couche lui 28 firent perdre tous ses charmes, et avec eux disparut l'amour de Louis XIV. Elle se retira à l'abbaye de Port-Royal : après avoir langui quelque temps, elle mourut âgée seulement de vingt ans.

dame de Fon

juin 1681.

Le roi revint à M de Montespan, mais sans empressement; et, de jour en jour, ses directeurs spirituels et la veuve Scarron, qui les secondoit dans leurs pieux desseins, gagnèrent plus d'influence sur lui; ils réussirent: Louis XIV quitta Mme de Montespan pour toujours, eut quelques intrigues passagères, et s'interdit enfin par scrupule de conscience Louis XIV toute liaison illégitime. La veuve Scarron, devenue me de Mai- Mme de Maintenon, força celle qui l'avoit introduite à la cour, à se retirer dans un couvent. Elle inspira à Louis XIV un attachement assez puissant pour qu'après la mort de la reine, elle conçût le dessein de

épouse Mada

tenon.

la remplacer. On vit enfin le plus orgueilleux des mo- 1679-1682 narques, âgé seulement de quarante-sept ans, épou- Æt. 58-61 ser une femme qui en avoit cinquante, et qui, dans son enfance, avoit été nourrie et élevée par charité 15.

Cet événe

ment ôte a La

Fontaine tout

appui a

cour.

Cet événement extraordinaire anéantit le crédit, dont jouissoient tous les amis de Mme de Montespan. D'ailleurs celui qui avoit le plus d'influence sur le roi, le duc de La Rochefoucauld, étoit mort au mois de mars 1680. Non seulement La Fontaine resta sans appui à la cour, mais ses écrits licencieux indisposoient de plus en plus le monarque contre lui : nous verrons bientôt qu'il éprouva, d'une manière fàcheuse, les effets de ce changement pour la seule chose qu'il ait désiré obtenir, et à la réussite de laquelle il ait travaillé avec constance. Jamais La Fontaine n'a donné un exemple plus frappant de la facilité de son caractère, que lorsqu'à la sollicitation de la duchesse de Bouillon, et comme malgré lui, il se laissa aller à célébrer le quinquina, et composa sur ce sujet un poëme en deux chants, qu'il lui dédia. L'erreur fut complète, et le poëme est détestable : il est difficile de le lire jusqu'au bout, et autres on et c'est peut-être par cette raison que l'on n'a pas remarqué qu'il se termine par une fable fort bien faite, et qu'on auroit dû ajouter au recueil de La Fontaine, dans lequel on a placé deux ou trois compositions qui ne sont pas des fables, et qui n'avoient jamais été insérées par lui dans celles qu'il a publiées: cette nouvelle fable devroit être intitulée, Jupiter et les deux Tonneaux 16.

Poëme

du Quinquina,

la

vrages en vers. 24 janv. 1682.

1679-1682 Si l'on ne connoissoit l'histoire de cette écorce El. 58-61 salutaire, que l'on nomme quinquina, on auroit de Sujet de ce la peine à comprendre comment une femme ai

poème et mo

gagèrent La

Fontaine à le

composer.

tifs qui en mable, gaie et spirituelle, pouvoit engager un poëte, tel que La Fontaine, à s'occuper d'un pareil sujet : mais les discussions des médecins sur ce fébrifuge avoient à cette époque attiré l'attention des gens du monde, qui, selon l'usage, prenoient parti pour ou contre, sans connoissance de cause. L'écorce de l'arbre du Pérou, qu'on nomme quinquina, étoit restée pendant un siècle et demi inconnue aux Espagnols qui avoient découvert l'Amérique. Les Indiens qui en connoissoient les vertus médicales, les avoient soigneusement cachées aux Espagnols', à cause de la haine qu'ils leur portoient. Cependant l'un d'eux, en 1638, sensible aux services qu'il avoit reçus d'un Espagnol, gouverneur de Loxa, pour en témoigner sa reconnoissance, lui fit présent du quinquina, et lui en révéla les propriétés. Par le moyen de cette écorce, cet Espagnol fut assez heureux pour guérir d'une fièvre opiniâtre la comtesse de Cinchon, épouse du vice-roi du Pérou : de là le nom de Cinchona, que les botanistes ont donné à ce genre de végétal, et de poudre de la comtesse, par lequel on désigna le quinquina réduit en poudre. Le procurateur général des Jésuites de l'Amérique, s'étant rendu à Rome en 1649, apporta le quinquina, qu'on nomma poudre des pères, et poudre des Jésuites, puis poudre du cardinal de Lugo ". Mais les médecins s'élevèrent contre ce remède, et il ne réussit

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