QUATRIEME LEÇON

Un feul Etre, appellé Dieu, a créé l'Univers.

a que deux moyens d'exiftence. Le premier eft d'avoir toujours exifté: c'eft le plus parfait. Le fecond eft, n'ayant pas toujours exifté & n'ayant pu, ainfi qu'il a été prouvé dans les Leçons précédentes, fe donner à foi-même l'exiftence, d'avoir été formé par un Etre quelconque, puifqu'on ne peut l'avoir été par le hafard, qui n'a ni volonté, ni intelligence, qui n'eft rien.

Donc, puifqu'aucun des Etres primitifs, Homme, Brute, Végétal &c., puifqu'aucun des Etres qui compofent ou ont compofé l'Univers n'a jamais eu une exiftence néceffaire & éternelle, & n'a jamais pu fe donner à foi-même l'existence, (Leç. IIde. & IIIme.) il s'enfuit qu'un autre Etre les a tirés du Néant.

Je dis un autre & non plufieurs. Voici pourquoi. Lorfque, comparant quelques Pieces d'Ecriture, nous y découvrons les mêmes pleins de lettres, également nourris, également diftants les uns des autres, lorfque ce font par-tout les mêmes rondeurs, les mêmes liaisons, nous affurons fur le champ que ces Pieces font du même Ecrivain. Affurons donc auffi, vu le rapport conftant d'un homme avec tous les hommes, d'une brute avec toutes les brutes, d'une plante avec toutes les plantes, que tous les hommes, toutes les brutes, toutes les plantes remontent à un feul Auteur. Les hommes ont & ont toujours eu

les mêmes organes, les mêmes facultés, les mêmes befoins. Dans une brute, on apperçoit & l'on a toujours apperçu les mêmes tendances, le même méchanifme, que dans toutes les autres brutes. Toujours, un Animal quadrupede, couvert de poil, eft vivipare, & toujours il eft ovipare, fi des écailles le revêtent. Toujours, une graine, mife en terre ou dans une liqueur convenable, fe gonfle & fuftente fon germe; toujours, ce germe eft fitué à l'extrêmité de la graine ;) toujours, il renferme la tête & la racine de la plante; toujours, quand cette racine a crû, les fucs dont elle s'alimente la font baiffer, &, quand la tête fe porte au-dehors, une enveloppe bien tiffue la garantit des injures du temps. S'il y a des exceptions dans la Nature, comme elles font le fruit des mêmes circonftances elles concourent à prouver l'unité du Législa

teur.

De plus, les hommes, les brutes, les plantes, les métaux, les aftres &c. fe confervent d'une maniere tout-à-fait femblable: ce qui annonce hautement qu'un feul Etre les a tous créés. L'animal vit par la circulation du fang. La plante végete par la circulation des fucs terreftres. L'or, l'argent, le cuivre, le plomb, croiffent & fe fortifient par la circulation des matieres métalliques. Les aftres fe maintiennent dans leur fplendeur par la circulation de la lumiere. C'eft toujours le même plan de création. C'eft toujours le même Créateur.

Enfin, toutes les parties de, l'Univers s'enchaînent tellement qu'à chaque fouftraction d'un genre, comme du Feu, de l'Eau &c., il y naîtroit un défordre fenfible. Que le Soleil difparoiffe; & auffi-tôt il n'y a plus de chaleur fur la Terre, les plantes fe meurent, les mers & les

rivieres fe glacent, les animaux expirent. Que l'Air foit fupprimé, plus de mouvement dans vos veines, dans les miennes, dans celles d'aucun homme, d'aucune brute; la feve ne coule plus dans les fibres ni des arbres ni des léguines; plus de fons, plus d'odeurs, plus de lumiere pour nous, parce qu'aucun véhicule ne les tranfporte jufqu'à nos fens ; la Nature entiere eft dans la langueur. A l'afpect de l'étonnante harmonie de l'Univers, il faut donc reconnoître un feul Etre, maître fouverain du néant & de l'exiftence, Créateur de la Terre & des Cieux.

QUESTIONS.

jere, Comment tous les Etres, qui compofent ou ont compofé l'Univers, font-ils fortis du néant? 2de. Peuvent-ils avoir été formés par hafard? 3me. Un feul Etre les a-t-il crées tous ?

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4me. Par quels raisonnements pouvez-vous me démontrer l'unité du Grand Etre ?

5me. Les exceptions aux loix de la Nature dèpofent-elles contre cette unité?

CINQUIEME LEÇON.

Dieu eft un Etre néceffaire & éternel.

La toujours été abfurde de fuppofer un moment où Dieu n'ait pas exifté & il l'eft également de fuppofer qu'il n'exiftera plus un jour: donc, Dieu eft un Etre néceffaire & éternel.

Si, dans le paffé, il y avoit eu un instant où Dieu n'eût pas exifté, jamais cet Etre Suprême

n'auroit eu l'existence : puifqu'il lui auroit été impoffible de fe la donner à lui-même, & que, pas un feul Etre n'exiftant alors, il n'auroit pu la recevoir de perfonne.

Si, dans l'avenir, Dieu pouvoit ceffer d'être ce feroit ou parce qu'il auroit des parties tendantes à la défunion, des parties qui, en tel ou tel temps, auroient été jointes les unes aux autres pour la premiere fois, ou parce que, même avantagé d'une meilleure fubftance, il dépendroit d'un autre Etre qui auroit la puiffancè de l'anéantir. Mais Dieu n'eft point compofé de parties qui, en tel ou tel temps, aient été jointes les unes aux autres pour la premiere fois : car, cela fuppofé, il y auroit eu un inftant dans le paffé (& je viens de prouver le contraire) où cet Etre Suprême n'eût point joui de l'exiftence. Dieu ne dépend pas non plus d'un autre Etre qui ait la puiffance de l'anéantir. Eh! quel feroit cet autre Etre ? Une Créature ou un Créateur? Il répugne à la droite raifon que ce foit une Créature, que la foibleffe détruise la force; &, comme je l'ai déjà démontré, il n'y a point d'autre Créateur que Dieu.

QUESTION S.

Iere. Y a-t-il eu un temps où Dieu n'ait point exifié ?

2 de. Viendra-t-il un temps où Dieu n'exifiera plus? 3me. Si Dieu n'avoit pas toujours exifié, ou, s'il étoit poffible qu'il ceffat d'exifier un jour, exif

teroit-il maintenant ?

PU, 2

SIXIEME LEÇON.

Dieu n'eft point un Etre matériel.

REMARQUEZ bien ce que je vous ai dit dans

la Leçon précédente: Dieu n'eft point compofé de parties tendantes à la défunion. Il n'eft donc point d'une nature femblable à celle des Etres qui tombent fous nos fens car toutes les parties de ces Etres tendent à la défunion, toutes font divifibles, toutes fe divifent dans un temps ou dans un autre. Il n'eft donc point matiere. Il n'eft donc point corps.

Dieu n'eft point corps.... Qu'est-il donc ?.......... Il eft efprit, on donne ce nom à une fubftance immatérielle.

:

Vous chercheriez en vain à concevoir ce qu'eft un efprit la Raifon dit fimplement ce qu'il n'eft pas. Si vous vous épuifiez en réflexions fur cet objet, autant vaudroit-il vous efforcer de découvrir comment l'image d'un arbre éloigné de 4 તે 500 pas traverse cette diftance & va fe peindre au fond de votre oil; comment des milliers de mots s'arrangent en très-bon ordre dans l'étroit efpace de votre cerveau; comment, au moindre acte de votre volonté, fe meuvent votre tête, vos bras, vos jambes ou d'autres parties de votre corps.

Ne dites jamais, parce que vous n'avez pas une idée nette de l'efprit, Dieu eft matiere : ce feroit dire en infenfé, je ne conçois pas comment je vois cette tour, & dès-lors je ne la vois pas. II eft, dans la Nature, des chofes cachées à l'Homme, des myfteres. Il en eft auffi dans la Reli