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CLEANTE.

Il fe met au devant de Mariane, qui
le veut rendre.

Non Madame, il eft en de trop belles mains. C'eft un prefent que mon Pere vous fait.

Moy!

HARPAGON.

CLEANTE.

N'eft-il pas vray, mon Pere, que vous voulez que Madame le garde pour l'amour de vous ? HARPAGON, àpart à fon Fils.

Comment?

CLEANTE.

Belle demande. Il me fait figne de vous le faire accepter.

MARIAN E.

Je ne veux point.

CLEANTE.

Vous moquez-vous? Il n'a garde de le reprendre, HARPAGON. à part.

J'enrage!

Ce feroit...

MARIAN E.

CLEANTE, en empêchant tokjours
Mariane de rendre la bagne.

Non, vous dis-je, c'eft l'offenfer.

MARIA NE.

De grace...

CLEANT E.

Point du tout.

Pefte foit...

HARPAGON, à part.

CLEANTE.

Le voilà qui fe feandalife de vôtre refus.
HARPAGON, bas à fon Fils.

Ah, traître!

CLEANTE.

Vous voyez qu'il fe defefpere.

HARPAGON, bas à fon Fils,
en le menaçant,

Bourreau que tu es!

CLEANTE.

Mon Pere, ce n'eft pas ma faute. Je fais ce que je

puis

puis pour l'obliger à la garder, mais elle est obstinée. HARPAGON, bas à fon Fils,

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Vous étes caufe, Madame, que mon Pere me querelle.

HARPAGON, bas à fon Fils,
avec les mêmes grimaces.

Le coquin!

CLEANTE.

Vous le ferez tomber malade. De grace, Madame, ne refiftez point davantage.

FROSINE.

Mon Dieu, que de façons! Gardez la bague, puis que Monfieur le veut.

MARIANE.

Pour ne vous point mettre en colere, je la garde maintenant; & je prendray un autre temps pour vous la rendre.

SCENE VIII.

HARPAGON, MARIANE, FROSINE CLEANTE, BRINDA VOINE,

ELISE.

BRINDA VOINE.

Monfieur, il y a là un homme qui veut vous par

ler.

HARPAGON.

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Dy-luy que je suis empêché, & qu'il revienne uRS autre fois.

BRINDA VOINE:

Il dit qu'il vous apporte de l'argent.

HARPAGON.

Je vous demande pardon. Je reviens tour à P'heure.

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SCENE IX.

HARPAGON, MARIANE, CLEANTE, ELISE, FROSINE, LA MERLUCHE.

LA MERLUCHE.

Il vient en courant, & fait tomber Harpagon.

Monfieur...

HARPAGON.

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Qu'eft-ce, mon Pere? vous étes-vous fait mal?
HARPAGON.

Le traître affurément a receu de l'argent de mes debiteurs, pour me faire rompre le coû.

VALER E.

Cela ne fera rien.

LA MERLUCHE.

Monfieur, je vous demande pardon, je croyois bien faire d'acourir vite.

HARPAGON.

Que viens-tu faire ici, Bourreau?

LA MERLUCHE..

Vous dire que vos deux chevaux font déferrez.
HARPAGON.

Qu'on les mene promptement chez le Marêchal,
CLEAN T E.

En attendant qu'ils foient ferrez, je vais faire pour vous, mon Pere, les honneurs de vôtre logis, & conduire Madame dans le Jardin, où je feray porter la collation.

HAR PAGON.

Valere, aye un peu l'œil à tout cela; & pren foin, je te prie, de m'en fauver le plus que tu pourras pour Le renvoyer au Marchand.

C'eft affez.

VALER E.

HARPAGON.

O Fils impertinent, as-tu envie de me ruïner!

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Entrons ici, nous ferons beaucoup mieux. Ii Rn'y a plus autour de nous perfonne de fufpect,& nous pouvons parler librement.

ELISE.

Ouy, Madame, mon Frere m'a fait confidence de la paffion qu'il a pour vous. Je fçay les chagrins & les déplaifirs que font capables de caufer de pareilles traverfes; & c'eft, je vous affûre, avec une tendreffe extréme que je m'intéreffe à vôtre avanture. MARIAN E.

C'est une douce confolation, que de voir dans fes intérêts une perfonne comme vous; & je vous conjure, Madame, de me garder toûjours cette généreufe amitié, fi capable de m'adoucir les cruautez de la fortune.

FROSINE.

Vous étes, par ma foy, de malheureuses gens l'un & l'autre, de ne m'avoir point, avant tout ceci, avertie de vôtre affaire! Je vous aurois fans doute détourné cette inquiétude, & n'aurois point amené les chofes où l'on voit qu'elles font.

CLEANTE.

Que veux-tu? c'eft ma mauvaise destinée qui l'a voulu ainfi.Mais, belle Mariane, quelles réfolutions font les vôtres ?

MARIANE.

Hélas, fuis-je en pouvoir de faire des réfolutions? & dans la dépendance où je me voy, puis-je former que des fouhaits?

CLEANT E.

Point d'autre appuy pour moy dans vôtre cœur que de fimples fouhaits? point de pitié officieufe? point de fecourable bonté; point d'affection agiffanCcc 7

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MA

MARIANE.

Que fçaurois-je vous dire? Mettez-vous en ma place, & voyez ce que je puis faire. Avifez,ordonnez vous-même, je m'en remets à vous; & je vous croy trop raifonnable, pour vouloir exiger de moy que ce qui peut m'être permis par l'honneur & la bienféance.

CLEANTE.

Helas, où me réduifez-vous, que de me renvoyer à ce que voudront me permettre les fâcheux fentimens d'un rigoureux honneur, & d'une fcrupuleufe bienféance!

MARIANE.

Mais que voulez-vous que je faffe: Quand je pourrois paffer fur quantité d'égards où nôtre Sexe est obligé, j'ay de la confidération pour ma Mere. Elle m'a toujours élevée avec une tendreffe extréme;& je ne fçaurois me réfoudre à luy donner du déplaifir. Faites,agiffez auprés d'elle. Employez tous vos foins à gagner fon efprit; vous pouvez faire & dire tout ce que vous voudrez, je vous en donne la licence;& s'il ne tient qu'à me déclarer en vôtre faveur, je veux bien confentir à luy faire un aveu moy-même, de tout ce que je fens pour vous.

CLEANT E.

Frofine,ma pauvre Frofine, voudrois-tu nous fervir? FROSIN E.

Par ma foy, faut-il demander? je le voudrois de tout mon cœur. Vous fçavez que de mon naturel, je fuis affez humaine. Le Ciel ne m'a point fait l'ame de bronze; & je n'ay que trop de tendreffe à rendre de petits fervices, quand je voy des gens qui s'entr'aiment en tout bien, & en tout honneur. Que pourrions-nous faire à ceci?

CLEANT E.

Songe un peu, je te prie.

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Ceci eft affez difficile. Pour vôtre Mere, elle n'eft

pas

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