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vous en faudra pour l'exploit; il vous en fas
pour le controle. Il vous en faudra pour la p
curation, pour la prefentation, confeils, pro
&tions, & journées du Procureur. Il vous ent
dra pour les confultations & plaidoyeries des
vocats; pour le droit de retirer le fac, & p
les groffes d'écritures. Il vous en faudra pour
rapport des Subftituts; pour les épices de com
clufion; pour l'enregîtrement du Greffier,
çon d'appointement, fentences & arrêts, cont
les, fignatures, & expeditions de leurs Clercs, f
parler de tous les prefens qu'il vous faudra fait
Donnez cet argent-là à cet homme-ci, vous vo
hors d'affaire.

ARGANT E.
Comment, deux cens pistoles?

SCAPIN.

Oui, vous y gagnerez. J'ai fait un petit calcul
en moi-même de tous les frais de la Juftice; &
j'ai trouvé qu'en donnant deux cens piftoles à
vôtre homme, vous en aurez de refte pour
moins cent cinquante, fans compter les foins, les
pas, & les chagrins que vous épargnerez. Quand
n'y auroit à effuyer que les fottifes que difent de-
vant tout le monde de méchans plaifans d'Avocats,
j'aimerois mieux donner trois cens pistoles, que
de plaider.

ARGAN.T E.

Je me moque de cela, & je défie les Avoca
de rien dire de moi.

SCAPIN.

Vous ferez ce qu'il vous plaira; mais fi j'étois
que de vous, je fuirois les procés.

ARGAN, T E.

Je ne donnerai point deux cens piftoles.

S.CAPIN.

Voici l'homme dont il s'agit.

SCE

SCENE VI.

SILVESTRE, deguifé en Spadaffin,
ARGANTE, SCAPIN.

SILVESTRE.

Capin, fais moi connoiftre un peu cet Argante,
qui eft pere d'Octave.

SCAPIN.

Pourquoi, Monfieur?

SILVESTRE.

Je viens d'apprendre qu'il veut me mettre en
rocés, & faire rompre par juftice le mariage de
na fœur.

SCAPIN.

Je ne fçay pas s'il a cette pensée; mais il ne veut
Point confentir aux deux cens piftoles que vous
voulez, & il dit que c'est trop.

SILVESTRE.

Par la mort, par la tête, par le ventre, fi je le
trouve, je le veux échiner, duflay-je être roué tout
vif.

Argante, pour n'être point vû, fe tient en trem-
blant couvert de Scapin.
SCAPIN.

Monfieur, ce pere d'Octave a du cœur, & peut-
être ne vous craindra-t-il point.

SILVESTRE.

Lui? Lui? Par le fang, par la tête, s'il étoit là,
je lui donnerois tout à l'heure de l'épée dans le
ventre. Qui eft cet homme-là ?

SCAPIN.

Ce n'eft pas lui, Monfieur, ce n'est pas lui.

SILVESTRE.

N'eft-ce point quelqu'un de fes amis?

SCAPIN.

Non, Monfieur, au contraire, c'eft fon ennemi

capital.

SILVESTRE,

Son ennemi capital?

Qüi.

SCAPIN,

I

439

SILVESTRE.

Ah, parbleu, j'en fuis ravi. Vous étes ennen
Monfieur, de cé faquin d'Argante; Eh?

SCAPIN.

Our, oüi, je vous en répons.
SILVESTRE lui prend rude-
ment la main.

Touchez-là. Touchez. Je vous donne map
fe, & vous jure fur mon honneur, par l'épéep
je porte, par tous les fermens que je fçauroist
re, qu'avant la fin du jour je vous déterai de
maraut fieffé, de ce faquin d'Argante. Repolt
vous fur moi.

SCAPIN.

Monfieur, les violences ence païs-ci ne font gus
res fouffertes.

SILVESTRE.

Je me moque de tout, & je n'ay rien à perdre.
SCAPIN.

Il fe tiendra fur les gardes affûrément; &ilades
parens, des amis, & des domeffiques, dontil f
feraun fecours contre vôtre reffentiment.

SILVESTRE.

C'eft ce que je demande, morbleu, c'eft ce que
je demande. I met l'épée à la main,& poffe
tous les côtez, comme s'il y avoit plufieurs perfonnt
devant luy. Ah tête! Ah ventre! Quene le trou
ve-je à cette heure avec tout font fecours! Que ne
paroît-il à mes yeux au milieu de trente personnes
Que ne les vois-je fondre fur moi les armes à la
main! Comment, marauts, vous avez la hardieffe
de vous attaquer à moi? Allons, morbleu, tue,
point de quartier. Donnons. Ferme. Pouffons. Bot
pié, bon œil. Ah coquin, ah canaille, vous en
voulez par là, je vous en ferai tâter vôtre foù.
Soûtenez, marauts, foûtencz. Allons. A cette bot-
te. A cette autre. A celle-ci. A celle-là. Comment,
Vous reculez Pié-ferme, morbleu, pié-ferme.
SCAPIN.

Eh, eh, eh, Monfieur, nous n'en fommes pas.
SILVESTRE.
Voilà qui vous apprendra à vous ofer joüer

moy.

SCA

SCAPIN

Hé bien, vous voyez combien de perfonnes tuées
pour deux cens piftoles. Ohfus, je vous fouhaite
Line bonne fortune.

ARGANTE, tout tremblant.

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Je me réfous à donner les deux cens pistoles.

SCAPIN.

J'en fuis ravi, pour l'amour de vous.
ARGANTE,

Allons le trouver, je les ai fur moi.

SCAPIN

Vous n'avez qu'à me les donner. Il ne faut pas
pour vôtre honneur, que vous paroiffiez-là, aprés
avoir paffé ici pour autre que ce que vous étes; &
de plus, je craindrois qu'en vous faifant connoître,
il n'allât s'avifer de vous demander davantage.

AR GANTE.

Oui; mais j'aurois été bien-aife de voir comme
je donne mon argent.

SCAPIN.

Eft-ce que vous vous défiez de moi?

ARGANTE.

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Parbleu, Monfieur, je fuis un fourbe, ou je
fuis honnête homme; c'eft l'un des deux. Eft-ce
que je voudrois vous tromper,
& que
dans tout ce-
ci j'ai d'autre interêt que le vôtre, & celuy de
mon Maître, à qui vous voulez vous allier? Si je
vous fuis fufpect, je ne me mêle plus de rien, &
vous n'avez qu'à chercher dés cette heure qui ac-
commodera vos affaires.

Tien donc.

ARGANTE

SCAPIN

Non, Monfieur, ne me conficz point vôtre ar-
gent. Je ferai bien aife que vous vous ferviez de
quelqu'autre.

AR-

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432

ARGANTE.

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SC-API N.

Non, vous dis-je, ne vous fiez point à moi. Que
fçait-on, fi je ne veux point vous attraper vôtre
argent?

ARGANTE.

Tien, te dis-je, ne me fais point contefter di-
vantage. Mais fonge à bien prendre tes fûretez ave:

lui.

SCAPIN.

Laiffez-moi faire, il n'a pas à faire à un fot.
ARGANTE.
Je vais t'attendre chez moi.

SCAPIN.

Je ne manquerai pas d'y aller. Et un. Je n'ai
qu'à chercher l'autre. Ah, ma foi, le voici. Il
femble que le Cicl, l'un aprés l'autre, les amene dans
mes filets.

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GERONTE, SCAPIN.

SCAPIN, faisant semblant de ne pas
voir Geronte.

Ciel! ô difgrace imprévuë! ô miferable pe-
ô

GERONTE.

Que dit-il là de moi, avec ce vifage affligé!
SCA PIN.

N'ya-t-il perfonne qui puiffe me dire où eft le
Seigneur Geronte ?

GERONTE.

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Où pourrai-je le rencontrer, pour lui dire cette
infortune?

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En vain je cours de tous côtez pour le pouvoir

Trouver.

GE.

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