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Vous aviez pris déja vos réfclutions;
Et vous vous faififfez d'un prétexte frivole,.
Pour vous autorifer à manquer de parole.

MARIANE

Il eft vrai, c'est bien dit.

VALERE.

Sans doute, & vètre cœur

N'a jamais eu pour moy de véritable ardeur.
MARIAN E.

Hélas! permis à vous d'avoir cette penfée,

V.A LER.E.

Oui, cui, permis à moi ; mais mon ame offenfée Vous préviendra, peut-être, en un pareil deffein Et je fçais où porter, & mes voeux, & ma main. MARIAN E.

Ah! je n'en doute point; & les ardeurs qu'excite Le mérite,

VALER E.

Mon Dieu, laiffons-là le mérite; J'en ai fort peu, fans doute, & vous en faites foi: Mais j'espère aux bontez qu'une autre aura pour

moi,

Et j'en fçai de qui l'ame, à ma retraite ouverte,
Confentira fans honte à reparer ma perte.

MARIA NE.

La perte n'eft pas grande, & de ce changement..
Vous vous confolerez affez facilement..

VALER E.

J'y ferai mon poffible, & vous le pouvez croire.
Un coeur qui nous oublie, engage nôtre gloire.
Il faut à l'oublier, mettre auffitous nos foins,
Si l'on n'en vient à bout,on le doit feindre au moins
Et cette lâcheté jamais ne fe pardonne,

De montrer de l'amour pour qui nous abandonne.
MARIANE.

Ce fentiment, fans doute, eft noble, & relevé.
VALER E.

Fort bien, & d'un châcun il doit être approuvé.
Hé quoi vous voudriez qu'à jamais, dans mon ame,
Je gardaffe pour vous les ardeurs de ma flame?
Et vous vide, à mes yeux, paffer en d'autres bras,
Sans mettre ailleurs un coeur dont vous ne voulez,

pas?

MA

MARIA NE.

Au contraire, pour moi, c'est ce que je fouhaite à Et je voudrois déja que la chofe fût faite.

Vous le voudriez ?

VALER E.

MARIA NE.

Oui.

VALERE.

C'eft affez m'infulter,

Madame, & de ce pas je vais vous contenter.
Il fait un pas pour s'en aller, revient toûjours,
MARIA NE.

Fort bien.

VALERE.

Souvenez-vous au moins, que c'est vous même, Qui contraignez mon cœur à cet effort extrême,

Oùi.

MARIANE.

VALERE.

Et que le deffein que mon ame conçoit, N'eft rien qu'à vôtre exemple.

MARIANE.

A mon exemple, foit

VALERE.

Suffit; vous allez être à point nommé servie

Tant-mieux.

MARIANE.

VALER E.

Vous me voyez, c'eft pour toute ma vie,
MARIA NE.

A la bonne heure.

Euh?

VALER E.

It's'en va; & lors

qu'il eft vers la porte, il fe retourne. MARIA NE.

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Hé bien, je pourfuis donc mes pas. '

MA

MARIANE.
Adieu, Monfieur.
DORINE.

Pour moi, je pense

Que vous perdez l'efprit, par cette extravagance;
Et je vous ay laiffé tout du long quereller,
Pour voir où tout cela pourroit enfin aller.
Hola, Seigneur Valere.

Venez ici.

Elle va l'arrêter par le bras, & luy fait mine de grande résistance. VALER E.

He, que veux tu, Dorine?
DORIN E.

VALER E.

Non, non, le dépit me domine.

Ne me détourne point de ce qu'elle a voulu.

Arrêtez.

Ah.

DORIN E...

VALER E.

Non, vois-tu, c'eft un point réfolu.
DORINE.

MARIA NE.

Il fouffre à me voir, ma prefence le chaffe; Et je ferai bien mieux, de lui quitter la place.

DORINE

Elle quitte Valere, & court à Mariane.

A l'autre. Où courez-vous?

MARIANE.

Laifle.

DORIN E.

MARIANE.

Il faut revenir.

Non, non, Dorine, en vain tu veux me retenir.

VALER E.

Je vois bien que ma veuë eft pour elle un fupplice;
Et fans doute, il vaut mieux que je l'en affranchiffe.
DORINE

Elle quite Mariane, & court à Valere.
Encor? Diantre foit fait de vous, fi je le veux,
Ceflez ce badinage, &venez çà tous deux.
Elle les tire l'un & l'autre.

VALER E.

Mais quel eft ton deffein ?

MARIA NE.

Qu'est-ce que tu veux faire?

DORIN E.

Vous bien remettre enfemble, & vous tirer d'affaire,
Eftes-vous fou, d'avoir un pareil démêlé ?
VALER E.

N'as-tu pas entendu comme elle m'a parlé?
DORIN E.

Eftes-vous folle, vous, de vous être emportée ?..
MARIANE.

N'as-tu pas veu la chofe, & comme il m'a traittée ?
DORIN E.

Sottife des deux parts. Elle n'a d'autre foin,
Que de fe conferver à vous, j'en fuis témoin.
Il n'aime que vous feule, & n'a point d'autre envie
Que d'être vôtre époux; j'en répons fur ma vie.
MARIANE.

Pourquoi donc me donner un femblable confeil?
VALER E.

Pourquoi m'en demander fur un sujet pareil?

DORIN E.

Vous étes fous tous deux ; ça, la main l'un,& l'autre Allons, vous.

VALERE

En donnant fa main à Dorine.
A quoy bon ma main ?

DORIN E.

Ah! çà, la vôtre.

MARIA NE

En donnant aussi sa main.

De quoy fert tout cela?

DORIN E.

Mon Dieu, vite, avancez.

Vous vous aimez tous deux plus que vous ne pensez.

VALER E.

Mais ne faites donc point les chofes avec peine,
Et regardez un peu les gens fans nulle haine.
Mariane tourne l'œil fur Valere, & fait un petit foåris.
DORIN E.

A vous dire le vray, les amans font bien fous!

V.ALER E.

Ho çà, n'ay-je pas lieu de me plaindre de vous? Et pour n'en point mentir, n'étes-vous pas méchanDe vous plaire à me dire une chofe affligeante ? (te,. MARIANE.

Mais vous, n'étes vous pas l'homme le plus ingrat....
DORIN E.

Pour une autre faifon, laiffons tout ce débat,
Et fongeons à parer ce fâcheux mariage.

MARIA NE

Di-nous donc quels refforts il faut mettre en usage.
DORIN E.

Nous en ferons agir de toutes les façons,
Vôtre Pere fe mocque, & ce font des chanfons.
Mais, pour vous, il vaut mieux qu'à son extrava-
gance,

D'un doux confentement vous prêtiez l'apparance,
Afin qu'en cas d'alarme, il vous foit plus aifé
De tires en longueur cet hymen propofé.
En attrapant du temps, à tout on remédie,
Tantôt vous payerez de quelque maladie,
Qui viendra tout à coup, & voudra des délais :
Tantôt vous payerez de préfages mauvais;
Vous aurez fait d'un mort la rencontre fâcheufe,.
Caffé quelque miroir, ou fongé d'eau bourbeuse.
Enfin le bon de tout, c'eft qu'à d'autres qu'à lui,
On ne vous peut lier, que vous ne difiez oüi.

Mais pour mieux réüffir, il eft bon, ce me femble,
Qu'on ne vous trouve point tous deux parlant en-

femble.

à Valere. Sortez,& fans tarder,employez vos amis
Pour vous faire tenir ce qu'on vous a promis,
Nous allons réveiller les efforts de ton Frere,
Et dans nôtre parti jetter la Belle-Mere.
Adieu.

VALERE à Mariane.

Quelques efforts que nous préparions tous, Ma plus grande efpérance, à vrai dire, eft en vous. MARIANE à Valere.

Je ne vous répons pas des volontez d'un Pere,
Mais je ne feray point à d'autre qu'à Valere.
VALERE.

Que vous me comblez d'aife:& quoi que puiffe ofer..

DO

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