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maritime toutes sortes de sûretés et d'avantages. Galway et Limerick pour correspondre avec l'Amérique, dont l'Irlande est la terre européenne la plus voisine; Derry et Belfast pour communiquer avec l'Écosse; Drogheda, Dundalk, Dublin, Waterford, pour les rapports avec l'Angleterre; Cork dont le port de Queenstown, l'un des plus vastes et des mieux situés du monde, sert de station aux steamers qui se rendent de Liverpool en Amérique et qui, relié à Cherbourg par un service à vapeur, mettrait en communication directe la France et l'Irlande, sans parler de beaucoup d'autres ports ou havres de moindre importance: l'Irlande, on le voit, ne manque d'aucune des ressources capables de créer, de soutenir, de féconder et de développer une véritable industrie nationale.

CHAPITRE II

LE MONOPOLE ANGLAIS AU XVII SIÈCLE.

Depuis que l'Irlande a été définitivement conquise par l'Angleterre, et surtout à partir de la fin du XVIIe siècle, tout a été mis en œuvre de la part de celle-ci pour ruiner, à coups de lois pénales et de règlements prohibitifs, une concurrence qui pouvait lui devenir fatale.

A la fin du XVIIe siècle une industrie était parvenue en Irlande à un haut degré de prospérité; elle était, notamment pour toutes les provinces du sud, la principale source de richesse et de bien-être : c'étaient les manufactures d'étoffes de laine. Mais, comme la supériorité de ces manufactures sur celles de l'Angleterre nuisait aux fabricants anglais, le Parlement de Londres décida qu'elles seraient anéanties. Au mois de juin 1698, la Chambre des lords et la Chambre des communes présentèrent à Guillaume III une adresse à laquelle le roi répondit par ces paroles restées tristement célèbres, comme l'écho fidèle des jalousies britanniques contre

Le mot se trouve textuellement dans l'adresse du Parlement anglais : « We most humbly beseech Your most sacred Majesty that Your

le pays vaincu et conquis: « Je ferai tout ce qui dépen<«<dra de moi pour faire tomber les manufactures de laine <<< en Irlande 1. »

Une résolution conforme à cette requête et à cette promesse fut transmise au Parlement de Dublin, qui eut la bassesse d'en faire une loi. En effet, le 25 mars 1799, les draps irlandais étaient frappés d'un droit d'exportation équivalant à une prohibition absolue, et qui eut pour conséquence immédiate la ruine des manufactures irlandaises. « La ruine de ces manufactures,» ajoute avec raison M. de Beaumont, « n'a donc pas été un effet imprévu de mesures prises elle était précisément la conséquence désirée et attendue 2.

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Onze ans plus tard, nouvelles tracasseries égoïstes et jalouses de la part du gouvernement anglais, nouvelles entraves mises à l'industrie et au commerce de l'Irlande. Une loi de la reine Anne interdit aux catholiques d'employer plus de deux apprentis3.

Majesty would be pleased in the most public and effectual way that may be, to declare to all your subjects of Ireland, that the growth and increase of the woollen manufacture there hath long been, and will be ever looked upon with great jealousy by all your subjects of this kingdom, and if not timely remedied, may occasion very strict laws totally to prohibit it, and suppress the same. »

<< I shall do all that in me lies to discourage the woollen manufacture in Ireland, and to encourage the linen trade there, and to promote the trade of England. » (Cité par Arthur Young dans son Voyage en Irlande, 2o part., p. 407, et par tous les historiens.)

T. 1, p. 99.

3 « Papists not to keep above two apprentices nor under seven years. » (8 Ann., c. III, § 37, 4710.)

Le commerce maritime n'avait pas été moins que l'industrie intérieure l'objet d'une surveillance hostile et égoïste les lois de navigation (The navigation laws), avaient radicalement tué tout commerce colonial, en interdisant aux colonies de porter directement leurs produits en Irlande. Toute denrée coloniale importée en Irlande devait avoir préalablement été débarquée dans un port anglais '.

Non contents d'exclure l'Irlande commerciale et industrielle d'une libre et loyale concurrence, les Anglais prétendaient encore confisquer à leur proflt les éléments de ce développement industriel. Swift affirmait, en 1727, que du bois de construction coupé dans les cinquante années précédentes, c'était à peine si on avait bâti en Irlande une maison d'importance, ou construit un vaisseau: tout le reste avait été conduit en Angleterre, et avait servi à augmenter les flottes destinées à aller chercher et à ramener dans les ports anglais les produits de toutes les parties du monde 2.

De là les questions à la fois si piquantes et si tristes dont un dignitaire de l'Église protestante, ami intelligent et sincère de son pays, le docteur Berkeley, évêque de

<< No colonial produce whatever being permitted to be brought to Ireland until after it had first entered an English port, and been unloaded there. >>

«As to shipping of its own Ireland is so utterly unprovided, that of all the excellent timber cut down within these fifty or sixty years, it can hardly be said, that the nation hath received the benefit of one valuable house to dwell in, or one ship to trade with. » (Dean Swift. — A short view of the state of Ireland.)

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