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AN. M. 3860.

eût détróné Démétrius, et ensuite de se défaire de ce
jeune prince, et de prendre la couronne pour lui-
même, comme il fit. Zabdiel, soit qu'il pénétrât son
véritable dessein, ou qu'il ne goûtât pas
goûtât pas tout-à-fait son
plan, n'y donna pas d'abord les mains. Tryphon fut
obligé de demeurer assez long-temps auprès de lui pour
le solliciter et le presser. Enfin, à force d'importunités
ou de présents, il y fit consentir Zabdiel, et obtint ce
qu'il demandait.

Jonathas pressait vivement la citadelle de JérusaAv. J. C. 144. lem; mais voyant qu'il n'avançait point, il députa vers Démétrius pour le prier de retirer la garnison, qu'il ne pouvoit pas chasser par la force. Démétrius, qui se trouvait alors dans un grand embarras, causé par les tumultes fréquents qui arrivaient à Antioche, où l'on'avait une aversion insurmontable pour lui et pour son gouvernement, accorda à Jonathas tout ce qu'il demandait, à condition qu'il lui enverrait des troupes pour châtier les mutins. Jonathas lui envoya aussitôt trois mille hommes. Dès que le roi les eut, se croyant assez fort pour tout entreprendre, il voulut désarmer les habitants d'Antioche, et ordonna, pour cet effet, qu'ils eussent tous à apporter leurs armes. Ils se soulevèrent au nombre de six vingt mille hommes, et vinrent investir le palais, dans le dessein de tuer le roi. Les Juifs accoururent aussitôt pour le dégager, écartèrent cette multitude par le fer et par le feu, brûlèrent une grande partie de la ville, et tuèrent ou firent périr par le feu près de cent mille des habitants. Le reste, intimidé par un si grand malheur, demanda la paix. Elle leur fut accordée, et le tumulte cessa. Les Juifs, après avoir tiré cette terrible vengeance des maux que ceux

d'Antioche avaient faits à Juda et à Jérusalem, principalement sous le règne d'Antiochus Épiphane, revinrent dans leur pays chargés d'honneur et de butin.

Démétrius, continuant toujours ses cruautés, sa tyrannie et ses oppressions, fit encore mourir plusieurs personnes pour la dernière sédition, confisqua les biens de plusieurs, et en chassa un grand nombre d'autres. Tous ses sujets en conçurent tant de haine et d'animosité contre lui, qu'il ne leur manquait qu'une occasion pour éclater, et lui faire sentir les effets les plus terribles de leur vengeance.

Malgré les promesses qu'il avait faites à Jonathas, et les grandes obligations qu'il lui avait du secours qui l'avait sauvé, il n'en usa pas mieux avec lui qu'avec les autres. Croyant désormais pouvoir se passer de lui, il ne tint pas le traité dont il était convenu. Quoique la somme de trois cents talents lui eût été payée, il ne laissa pas de demander tous les impôts, les péages, et les tributs ordinaires, avec la même rigueur qu'auparavant, et avec menaces à Jonathas de lui faire la guerre s'il y manquait.

Pendant que les choses étaient dans cet état chan-· celant, Tryphon amena en Syrie Antiochus, le fils d'Alexandre, et fit déclarer par-tout ses prétentions à la couronne par un manifeste. Les soldats que Démétrius avait cassés, et un grand nombre d'autres mécontents, se rangèrent en foule auprès du prétendant, et le proclamèrent roi. Ils marchèrent sous ses étendards contre Démétrius, le battirent, et l'obligèrent à se retirer à Séleucie. Ils lui prirent tous ses éléphants, se rendirent maîtres d'Antioche, y placèrent Antiochus

I Machab.

13, 1-30..

Joseph. Antiq. Jud.

et [1.

Just. 1. 36,

cap. 1. Liv. Epit.

sur le trône des rois de Syrie, et lui donnèrent le surnom de Théos, qui signifie le dieu.

Jonathas, mécontent de l'ingratitude de Démétrius, accepta l'invitation qu'on lui fit de la part du nouveau roi pour l'engager dans ses intérêts. Lui, et son frère Simon, furent comblés de faveurs. On leur envoya une commission, qui leur donnait pouvoir de lever des troupes pour Antiochus dans toute la Célésyrie et la Palestine. Ils formèrent de ces troupes deux corps d'armée, avec lesquels ils agirent séparément, et remportèrent plusieurs victoires contre les ennemis. Tryphon, voyant tout au point où il le voulait pour 12, 39-54; commencer à exécuter le projet qu'il avait formé de faire périr Antiochus, et de prendre pour lui-même la 1. 13, c. 10 couronne de Syrie, ne trouvait plus d'obstacle à ses desseins que de la part de Jonathas, dont il connaissait trop la probité pour tenter même de le faire entrer dans ses vues. Il résolut de se défaire, à quelque prix que ce fût, d'un ennemi si redoutable. Il entra donc en Judée avec une armée pour le prendre et le faire mourir. Jonathas, de son côté, vint aussi à Bethsan, à la tête de quarante mille hommes. Tryphon vit bien qu'il ne gagnerait rien par la force contre une armée si puissante. I tâcha donc de l'attirer par de belles paroles, et par les assurances les plus vives d'une amitié sincère. Il lui fit entendre qu'il n'était venu là que pour le consulter sur leurs intérêts communs, et pour mettre entre ses mains Ptolémaïde, qu'il avait résolu de lui donner en pur don. Il le trompa si bien par ces protestations d'amitié et ces offres engageantes, qu'il lui fit renvoyer toutes ses troupes, à la réserve de trois

lib. 55.

mille hommes, dont il ne garda même que mille auprès de sa personne. Il envoya les autres du côté de la Galilée, et suivit Tryphon à Ptolémaïde, comptant, sur le serment de ce traître, qu'il en serait mis en possession. Il n'y fut pas plus tôt entré avec ses mille hommes, qu'on en ferma les portes. On se saisit aussitôt de Jonathas, et on fit main-basse sur tous les autres. On détacha aussi en même temps des troupes pour aller surprendre les deux mille hommes qui étaient allés en Galilée. Ils avaient déja eu avis de ce qui était arrivé à Jonathas et à sa troupe dans la ville de Ptolémaïde; et s'étant exhortés les uns les autres à se bien défendre, et à vendre bien cher leur vie, l'ennemi n'osa pas les attaquer. On les laissa passer, et ils arrivèrent tous sans aucun mal à Jérusalem.

L'affliction de ce qui venait d'arriver à Jonathas y était extrême. Les Juifs cependant ne perdirent point courage. Ils choisirent d'un consentement universel Simon pour leur général; et sur-le-champ, par ses ordres, ils se mirent à travailler de toute leur force à achever les fortifications de Jérusalem, , que Jonathas avait commencées; et quand on apprit que Tryphon approchait, Simon marcha contre lui à la tête d'une belle armée.

Tryphon n'osa lui livrer bataille, et eut encore une fois recours au même artifice qui lui avait si bien réussi contre Jonathas. Il envoya dire à Simon qu'il n'avait fait arrêter Jonathas que parce qu'il devait cent talents au roi; que s'il voulait lui envoyer cette somme, et les deux fils de Jonathas en ôtage pour lui

' Cent mille écus.

AN. M. 3861.

Diod. Legat.

répondre de la fidélité de leur père, il le ferait mettre en liberté. Quoique Simon vît bien que ce n'était qu'une feinte, cependant, pour n'avoir point à se reprocher d'avoir causé la mort de son frère en refusant de faire ce qu'on lui proposait, il envoya l'argent et les deux enfants de Jonathas. Le traître ne relâcha point pour cela son prisonnier: mais il revint une seconde fois en Judée avec une plus grosse armée qu'auparavant, dans le dessein de mettre tout à feu et à sang. Simon le côtoya de si près dans toutes ses marches et contre-marches, qu'il prévint tous ses desseins, et l'obligea de se retirer.

Tryphon, à son retour au quartier d'hiver dans le pays de Galaad, fit mourir Jonathas; et, croyant après cela n'avoir plus personne à craindre, il donna ordre de tuer secrètement Antiochus. Il fit ensuite courir le bruit qu'il était mort de la pierre, et en même temps il se déclara roi de Syrie en sa place, et prit possession de la couronne. Quand Simon apprit la mort de son frère, il envoya prendre ses os, les enterra dans le sépulcre de ses pères à Modin, et lui fit ériger un superbe monument.

Tryphon souhaitait avec passion de se faire reconAv. J. C. 143. naître par les Romains. Son usurpation était si chan31. celante sans cela, qu'il voyait bien qu'il avait besoin de ce support pour se soutenir. Il leur envoya une ambassade magnifique, qu'il chargea d'une victoire d'or du poids de dix mille pièces d'or. Il fut la dupe des Romains. Ils reçurent la statue, et firent mettre dans l'inscription le nom d'Antiochus, qu'il avait fait assassiner, comme si elle fût venue de lui.

I Machab. 14, 16-40.

Les ambassadeurs que Simon envoya à Rome y fu

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